Accueil
Envoyer à un ami
Imprimer
Grand
Petit
Partager
CINEMA

Tchad : N'Djamena City, sortie d'un film fin decembre


Alwihda Info | Par Abou-Adil Ahmat - 4 Décembre 2008


Adoum est un jeune journaliste tchadien prêt à partir pour la Belgique quand il est arrêté par la police et accusé d'être un activiste politique. Emprisonné et torturé par le redouté Koulbou à l'instar de dizaines d'autres innocents, il va pourtant réussir à s'échapper et à fuir, accompagné de la seconde compagne de ce dernier...


Tchad : N'Djamena City, sortie d'un film fin decembre
Sur une trame vigoureusement politique inscrite dans le contexte du régime autoritaire d'Hissen Habre, Issa Serge Coelo avec N'Djamena City nous donne à voir l'Afrique et plus particulièrement le Tchad sous leur plus mauvais jour. Or, si le scénario qui soutient le métrage mérite que l'on s'y arrête, la forme de ce dernier et sa mise en scène peine à convaincre. Par la modestie des moyens mis en oeuvre certes mais surtout en raison de choix de monstration assez discutables.

N'DJAMENA CITY
Un film de Issa Serge Coelo
Avec Youssouf Djaoro, Billy Joséphine, Adama Rahama, Felkissam Mahamat
Durée : 1h30
Date de sortie : 24 décembre 2008

N'Djamena City ou l'histoire politique du Tchad d'Hissen Habré

« C'est un devoir de mémoire adressé aux victimes des abus et des dérives totalitaires, aux spectateurs, aux historiens, mais aussi aux simples citoyens. Nous espérons ainsi que le travail de deuil puisse être facilité à travers des films ou des oeuvres audiovisuelles. »
Issa Serge Coelo, réalisateur de N'Djamena City

Adoum est un jeune journaliste tchadien prêt à partir pour la Belgique quand il est arrêté par la police et accusé d'être un activiste politique. Emprisonné et torturé par le redouté Koulbou à l'instar de dizaines d'autres innocents, il va pourtant réussir à s'échapper et à fuir, accompagné de la seconde compagne de ce dernier...

En dénonçant l'histoire du régime qui ensanglanta le Tchad durant les années 1980 et suivante, Issa Serge Coelo s'inscrit dans une tradition politique chère au cinéma, celle des brûlots politiques. Ainsi, le jeune cinéaste qu'il est montre-t-il la violence de ces années et les différences de subtilité entre plusieurs formes de torture avec une acuité marquée. Excluant de fait, toute pudeur, la visée est frontale et l'on n'échappe pas à un récit plus qu'appuyé de ce qui arrive ou pourrait arriver à Adoum s'il s'entête à ne révéler une culpabilité qui n'est pas sienne. Dès lors, usant du cinéma comme d'un révélateur et d'un formidable amplificateur, celui à qui l'on doit Daresalam, insiste et ne cesse de renouveler ses attaques par personnages interposées. Et cela sans la moindre fausse polémique possible au regard des crimes commis par ce pays stratégique et ceux qui l'ont dirigé.
Vibrant de l'émotion que suscite la dénonciation d'abjections que l'on pensait réservées à des dictatures d'un autre temps, N'Djamena City touche et remue par sa profonde sincérité. De surcroît, en explorant le passé de son propre pays, le cinéaste opère un retour sur soi et sur la mémoire des siens qui dépasse le simple récit. L'envie de creuser et la nécessité d'approfondir l'histoire tue d'un peuple en souffrance de démocratie et de droits sont ici fondamentales. Et c'est justement là que réside la principale force du film d'Issa Serge Coelo. Mais aussi la raison première de ses propres faiblesses.
Des intentions que maltraitent une forme modeste et inaboutie

En effet, N'Djamena City pâtit de la richesse de son matériau et de la profondeur de ses ambitions au regard de ses moyens. Doté d'une économie plus que chiche, le film opère à faible coût et bien vite, on sent s'afficher à l'écran toute la faiblesse d'un cinéma africain anémié et sans grandes possibilités financières. Et ceci n'engage que peu le talent des éventuels participants ou leurs idées, tout est avant tout, affaire de professionnalisme, d'expérience et de budget trop peu étoffés. Le métrage donne par ses couleurs et ses options visuelles, l'impression d'avoir été tourné il y a plus d'une vingtaine d'années. Et c'est justement là que le déficit d'expérience et de recul sur le cinéma en soi font prendre à l'ex-Tartina City, un tour très éloigné des intentions de son auteur.

Très vite, on sent l'amateurisme des acteurs, la pauvreté des moyens mis à la disposition du cinéaste et tout autant, une conception des plans et un découpage des séquences qui caractérisent une évidente inexpérience du médium et de ses aboutissements. Sans conteste, une modestie de moyens n'excuse pas tout et c'est là où Issa Serge Coelo montre ses limites derrière la caméra. Tout d'abord, il peine à réellement caractériser l'ensemble ses personnages autrement que sur un mode binaire, c'est-à-dire au service ou nom du pouvoir et de ses horreurs. Ainsi, tous s'inscrivent dans une logique très stéréo-typique et exemplaire qui peut agacer. Ensuite, ces derniers malgré leur bonne volonté manquent d'une direction et d'une formation suffisante pour dépasser cette faiblesse initiale.

Mais ce sont surtout deux autres choses qui déçoivent davantage et amène à considérer N'Djamena City sous un angle plus sévère.

Premièrement, le recours à une monstration orchestrant avec complaisance et fascination, la torture et ses dérivés. Certes, le procédé est efficient pour dénoncer et Ken Loach ne fut pas le dernier à s'en servir dans Le Vent se lève . Néanmoins, sa récurrence et la facilité de son exploration conduisent à une construction malséante, du moins, injustifiable car trop répétitive et au final, improductive.
Deuxièmement, ce film opère dans son montage des ruptures de ton bien maladroites en inscrivant entre deux scènes de torture, des séquences oniriques et difficilement raccord avec ce qui suit et précède, comme celles où Koulbou vole au dessus du ciel dans une presque bulle, sur fond de musique criarde. Restituée par des procédés de trucage grossiers, l'ensemble sidère à son apparition et plombe un métrage portant pourtant quelque chose de très singulier en soi. Inutiles et malhabiles, ces intermèdes qui se justifieraient par l'envie de montrer la paix du bourreau et le fait que ses agissements s'appliquent à tout le pays, sont confondants. En effet, tous ces instants dans le métrage sont tout aussi inappropriés formellement que scénaristiquement.

Ainsi, N'Djamena City décrédibilise par ses excès et ces séquences étonnantes, ses propres enjeux, ce qui est plus que dommage au regard des véritables qualités de ce dernier et surtout de ses intentions. Sans conteste, toutes les raisons liées à l'économie même du métrage auraient pu s'expliquer, être atténuées puis relativiser pour des questions bien compréhensibles de moyens trop modestes. Mais de tels errements formels et narratifs émoussent la portée du métrage et sa force de conviction, au point de lasser et de dérouter le spectateur le plus avenant. Par conséquent, si l'on attend plus à l'avenir d'Issa Serge Coelo, on espère surtout que la substance qui sourd de N'Djamena City et la leçon qu'il tirera de son filmage lui serviront à incarner l'avenir d'un cinéma politique africain aux côtés des Jean-Stéphane Sauvaire, Gavin Hood ou Newton I. Aduaka, les réalisateurs de Johnny Mad Dog , Mon Nom est Tsotsi et Ezra.

Jean-Baptiste Guégan

Dénonçant le régime tchadien d’Hissen Habré, N’Djamena City narre le devenir chaotique d’Adoum, un jeune journaliste. Usant d’une frontalité marquante (tortures, séquestrations) pour montrer ces excès, Issa Serge Coelo intéresse et promet mais peine pourtant à convaincre, du fait de la modestie de sa mise en scène et de la faiblesse de ses moyens.
http://www.dvdrama.com/commentnote.php?keyc=30603&zone=cine



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)