INTERNATIONAL

79ème Assemblée générale des Nations-Unies : le Tchad appelle à la paix, à la solidarité et à l’action


Alwihda Info | Par Olivier Noudjalbaye Dedingar, Expert-consultant international, humanitaire et journaliste indépendant. - 5 Octobre 2024


Dans un discours prononcé par Allah Maye Halina, Premier ministre et chef du gouvernement de la République du Tchad, le pays a souligné son engagement en faveur de la paix mondiale, du développement durable et de la dignité humaine lors de la 79ème session de l'Assemblée générale des Nations-Unies.


Allah Maye Halina, Premier ministre, chef du gouvernement de la République du Tchad, intervient lors du débat général de la 79ème session de l'Assemblée générale. Photo : media.un.org
Le message était clair : pour construire un monde juste et pacifique, l’unité et la diversité doivent être mises à profit pour le progrès.

Le Premier ministre tchadien Allah Maye Halina a commencé son discours, le 25 septembre dernier, en félicitant chaleureusement Philemon Yang, l'ancien Premier ministre du Cameroun, pour son élection à la présidence de la 79ème session de l'Assemblée générale. Ses paroles reflètent l'appréciation du Tchad pour le travail des Nations-Unies, et ses efforts continus pour promouvoir la paix et la sécurité à l'échelle mondiale.

Le thème de la 79ème session, « L’unité et la diversité pour l’avancement de la paix, du développement durable et de la dignité humaine partout et pour tous », résonnait profondément avec la vision nationale du Tchad. Le Premier ministre Halina a appelé la communauté internationale à aller au-delà de la simple rhétorique, en appelant à des actions concertées pour surmonter les nombreux obstacles mondiaux. Le Tchad estime qu'un monde juste et pacifique ne peut être construit que si toutes les nations agissent avec détermination et compassion, garantissant que chaque individu et chaque communauté puisse prospérer.

Lutter contre le terrorisme au Sahel
La région du Sahel, où se trouve le Tchad, n’est pas étrangère aux conflits et à l’instabilité. Le Tchad est depuis longtemps un État de première ligne dans la lutte contre le terrorisme, un défi qui reste une menace persistante pour la paix et le développement dans la région. Le Premier ministre tchadien a souligné que son pays est confronté à des menaces constantes, de la part de groupes terroristes dont les origines et les sources de financement restent souvent insaisissables. Ces groupes sapent les institutions nationales, déstabilisent les communautés et entravent les efforts de développement, aggravant ainsi les conditions déjà difficiles auxquelles beaucoup sont confrontés.

Le Premier ministre a souligné que malgré les efforts du Tchad et d'autres pays du Sahel, la communauté internationale n'a pas fait preuve d'une véritable volonté collective pour lutter efficacement contre le fléau du terrorisme. Il a appelé à un engagement ferme de toutes les nations pour lutter contre le terrorisme, soulignant que la coopération est essentielle pour restaurer la stabilité, garantir la sécurité et créer un environnement dans lequel tous les peuples peuvent vivre sans crainte.

Il a en outre déclaré que la lutte contre le terrorisme devait être considérée comme une responsabilité mondiale. Selon le Premier ministre tchadien, le terrorisme ne se limite pas aux frontières ; ses impacts se propagent bien au-delà des zones de conflit immédiates. Par conséquent, la communauté internationale doit unir ses forces et œuvrer pour vaincre le terrorisme et établir les conditions nécessaires pour une paix durable au Tchad, dans toute l’Afrique et dans le monde.

Changement climatique : une menace pressante
Le changement climatique est apparu comme un axe important de la déclaration du Tchad. Le pays a été profondément touché par ses impacts, qui ont perturbé la production agricole, conduit à l’insécurité alimentaire et déplacé les populations vulnérables. Le Sahel est particulièrement exposé à la dégradation de l’environnement, le Tchad étant confronté à des sécheresses prolongées, à la désertification et à des inondations imprévisibles, qui compromettent la stabilité économique et menacent les moyens de subsistance de millions de personnes.

Le Premier ministre Halina a appelé la communauté internationale à honorer les engagements pris dans les accords mondiaux sur le climat, notamment ceux liés au financement climatique, à la justice climatique et au transfert de technologies vertes. Il a fait valoir que les pays développés doivent assumer la responsabilité de leur rôle, dans la contribution au changement climatique en fournissant un soutien adéquat aux pays touchés de manière disproportionnée comme le Tchad.

Sous la direction du président Mahamat Idriss Deby, le Tchad travaille sans relâche pour améliorer l’accès aux produits de première nécessité, notamment l’éducation, l’eau potable, l’énergie, les soins de santé et les opportunités économiques. Ces efforts s'inscrivent dans le cadre de l'objectif plus large du Tchad visant à renforcer la résilience au changement climatique, et à s'attaquer aux causes profondes de la pauvreté et des inégalités.

Le Tchad a également appelé à des investissements plus importants dans l'adaptation et la résilience climatiques, exhortant les pays les plus riches à remplir leurs engagements financiers envers le Fonds vert pour le climat. Le Premier ministre Halina a souligné que sans un soutien adéquat, des pays comme le Tchad auront du mal à faire face aux impacts croissants du changement climatique, qui mettent déjà à rude épreuve les ressources nationales et exacerbent les défis socio-économiques.

Crise des réfugiés et conflit au Soudan
Le Tchad est actuellement confronté à une grave crise humanitaire car il accueille plus de deux millions de réfugiés, qui représentent environ 15 % de la population du pays. Cette situation a exercé une immense pression sur les ressources déjà limitées du Tchad, créant des défis supplémentaires pour le gouvernement qui doit répondre aux besoins des réfugiés et de ses propres citoyens. Le Premier ministre a évoqué le conflit en cours au Soudan, qui a entraîné un flux continu de réfugiés vers le Tchad. Il a appelé la communauté mondiale à soutenir les réfugiés et les populations d'accueil frappés par cette crise.

Le Premier ministre Halina a également attiré l'attention sur la détérioration de la situation au Soudan, soulignant l'impact dévastateur du conflit sur les populations civiles. Il a réitéré l’appel urgent du Tchad à un cessez-le-feu immédiat au Soudan, et a appelé à un accès humanitaire sans entrave aux millions de victimes touchées par la guerre. Le Premier ministre a souligné que la crise ne peut être résolue par des moyens militaires ; cela nécessite plutôt une solution pacifique ancrée dans le dialogue et la négociation.

Condamnation de la violence et engagement en faveur de la solidarité mondiale
Le Premier ministre a également abordé d’autres domaines de conflit à travers le monde. Il s'est dit préoccupé par l'escalade de la violence et ses conséquences humanitaires dévastatrices en Ukraine et au Moyen-Orient, en particulier le conflit israélo-palestinien. Il a appelé à la fin des violences contre les civils innocents, et a réaffirmé l’engagement du Tchad en faveur d’une solution à deux États, reconnaissant le droit du peuple palestinien à l’autodétermination.

Le Tchad a condamné les atrocités commises contre les civils à Gaza et dans d'autres régions de Palestine, appelant à une solution pacifique et négociée au conflit. Soulignant que la communauté internationale ne peut rester indifférente aux souffrances des civils innocents, il a exhorté l'ONU à agir pour désamorcer les tensions dans la région. La propagation du conflit au Liban, a-t-il noté, a encore compliqué la situation, posant une menace sérieuse à la stabilité régionale et internationale.

Le Premier ministre tchadien a par ailleurs exprimé le soutien de son pays à la levée de l'embargo économique contre Cuba, soulignant l'importance de la solidarité en cas de besoin. Il a fait valoir que de telles mesures ne font que nuire aux gens ordinaires et entravent leur capacité à se développer et à prospérer.

Appel à une réforme du Conseil de sécurité et à une plus grande représentation africaine
Un autre aspect important de la déclaration du Tchad était l’appel à la réforme du Conseil de sécurité des Nations-Unies. Le Premier ministre Halina a réitéré la demande de l'Afrique pour une plus grande représentation dans la gouvernance mondiale. Il a fait référence au Consensus d'Ezulwini et à la Déclaration de Syrte, qui exposent la position de l'Afrique sur la nécessité d'une réforme, y compris une représentation permanente des pays africains au Conseil de sécurité.

Le Premier ministre a soutenu qu’il était temps de rectifier l’injustice historique consistant à exclure l’Afrique, un continent de plus d’un milliard d’habitants, du rôle légitime qu’elle joue dans l’élaboration de la politique internationale.

« L’Afrique ne demande pas un traitement spécial mais plutôt la reconnaissance de la place qui lui revient au sein de la communauté mondiale. »

Il a fait valoir qu'une telle réforme ne serait pas seulement une question de justice, mais renforcerait également la légitimité et l'efficacité du Conseil de sécurité face aux défis complexes auxquels le monde est confronté aujourd'hui.

Une vision pour les générations futures
Le Premier ministre Halina a également souligné l’importance d’investir dans la jeunesse tchadienne, qui représente plus de 65 % de la population du pays. « Le gouvernement s'engage à autonomiser les jeunes en leur donnant accès à une éducation de qualité et en créant des opportunités pour leur participation active à la vie politique et économique. »

Le Premier ministre a souligné qu'il est crucial d'investir dans la jeunesse pour éviter qu'elle ne soit attirée vers le radicalisme et l'extrémisme violent, qui restent des défis importants dans la région. Le Tchad a appelé les Nations-Unies à soutenir un marché du travail ouvert et à créer un environnement permettant à la jeunesse africaine de s'épanouir.

Le Premier ministre a souligné que les raisons de la migration de la jeunesse africaine sont souvent liées à la fracture économique qui sépare les pays, même au sein d'une même région. Il a exhorté la communauté internationale à remédier à ces disparités et à créer des opportunités pour les jeunes afin qu'ils puissent contribuer au développement de leur pays d'origine plutôt que de chercher des opportunités à l'étranger.

Engagement envers le multilatéralisme et les idéaux des Nations-Unies
En concluant son discours, le Premier ministre Halina a réaffirmé l’attachement de son pays aux idéaux et principes fondateurs de la Charte des Nations-Unies. Il a appelé la communauté internationale à renforcer le multilatéralisme, soulignant que seule une action collective pourra permettre à l’humanité de surmonter les défis auxquels elle est confrontée. Il a souligné l'importance de construire un monde caractérisé par la justice, l'équité et la solidarité, valeurs qui sont au cœur de la mission des Nations-Unies.

Le Premier ministre Halina a exprimé la conviction du Tchad que, malgré les nombreux obstacles sur le chemin de la paix, du développement et de la dignité humaine, il est de la responsabilité collective de toutes les nations de poursuivre ces objectifs.

Cinquième plus grand pays d'Afrique, le Tchad a connu plusieurs catastrophes liées à la sécheresse et aux inondations. Photo : PNUD/Aurélia Rusek

L’appel de l’Afrique à une réforme du Conseil de sécurité des Nations-Unies, est devenu un argument convaincant pour y ajouter un ou plusieurs membres permanents africains. Photo : accord.org.za

Dans la même rubrique :