Désoccidentalisons les Droits de l’Homme (1ère partie)
Il y a quelques années en arrière, j’ai été l’invité par la Convention annuelle des étudiants de l’Université de Berne pour présenter une conférence sur le thème des droits de l’homme en Afrique, c’est-à-dire « les Droits de l’Homme » tels que vus en Afrique par les africains. J'ai accepté l’invitation non pas que je me considère comme expert en la matière. Mais simplement parce que c’est une chose que j’ai vécu quotidiennement en tant qu’africain. C’est un sujet qui me tient beaucoup à cœur. Et aussi parce que l’occasion était belle pour envoyer un message de vérité à l’Europe occidentale. Je me suis donc adressé à un public de près d’un millier de jeunes étudiants. Des jeunes dont la plupart sera des décideurs de demain dans leurs pays et dont toute parcelle de décision aura un impact considérable sur la marche de l’Afrique. C’est avec et dans cet esprit que j’ai eu à intervenir pour parler « des Droits de l’Homme » vus d’Afrique.
Aujourd’hui, douze ans après, j’ai décidé de réactualiser le brouillon de cette conférence pour le porter à la connaissance du public africain par le billet d’Internet.
Cet exposé, de mon humble point de vue, a été présenté de manière remarquable, sans complexe et en toute sincérité. D’entrer de jeu, j’ai déclaré que les « Droits de l’Homme » ne sont qu’une invention de l’occident. Qu’ils n’ont rien d’universel car ils ne concernent qu’une infime partie (un quart) de l’humanité. C’est pourquoi, disais-je, je n’utiliserai pas le terme « Droits de l’Homme » mais plutôt « Droits Humains ». L’auditoire a acquiescé par un applaudissement nourri. Le sujet me tient beaucoup à cœur et j’ai la ferme intention de demander à l’Union Africaine de « désoccidentaliser » les droits humains de les rendre vraiment africainement universels et de laisser à l’occident ses « Droits de l’Homme », lesquels ne sont point faits pour les trois autres quarts de l’humanité auxquels nous appartenons.
Après avoir passé en revu quelques constatations pertinentes saupoudrées de quelques simples mais évidentes réflexions (première partie de mon exposé), je vous proposerai d’amorcer la discussion non seulement sur ce qui serait, pour nous, peuples africains, le concept des « Droits humains », mais aussi et plus généralement sur l’identité africaine, notre civilisation, et nos spécificités culturelles qui font que ce serait suicidaire pour nous d’embrasser les « Droits humains » tels qu’ils ont été conçus en occident pour l’Occident (première et deuxième parties) et évangélisés en Afrique.
Mes propos peuvent paraître à la limite de la provocation. Je l’admets et en assume pleinement la responsabilité. Mais je trouve que c’est nécessaire. Car pour nous africains, il est plus que urgent de se poser cette question : pourquoi avons-nous beaucoup plus que tout autre peuple au monde, d’inclinaison à abandonner notre identité, nos plus belles traditions issues de notre plus belle civilisation pour mimer l’identité et la civilisation des autres, notamment de l’occident?
1.les droits de l’homme sont une conception occidentale. Ils n’ont point d’utilité pour le reste trois quart de l’humanité.
Les droits de l’Homme sont une invention de l'Occident qui y avait d’ailleurs laissé sa marque indélébile. Et pour cause la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 a été proclamée à Paris après avoir été rédigée essentiellement par des Occidentaux. Cette Déclaration universelle des droits de l'homme elle-même fait suite à celle des droits de l'homme et du citoyen de 1789, à l'aube de la Révolution française, qui a des antécédents dans la philosophie anglaise (Locke, Hume), allemande (AufkJàrung), italienne (Beccaria) et aux Etats-Unis (Déclaration de Philadelphie, etc.).
Par la suite, les Européens ont signé en 1950 leur Convention : « La convention européenne des droits de l'homme. Les Pactes des Nations Unies sur « les droits civiques et politiques » d'une part et d'autre part sur « les droits économiques, sociaux et culturels », eux, ne sont signés qu’en 1966. Et il a fallu attendre 1969 pour avoir « la Convention interaméricaine des droits de l'homme », et seulement en 1981 que « la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples » a vu le jour. Dans la foulé on a eu « le mécanisme asiatique de régulation des droits humains » ainsi que « la Déclaration du Caire sur « les droits humains en Islam ».
Ce premier flash de remarque nous indique pour ainsi dire qu’effectivement l'Occident est beaucoup plus engagé que les autres régions du monde dans le domaine des droits humains. Par ailleurs, si l'on regarde du côté des organisations non gouvernementales (ONG), on est forcé de constater que, là aussi, les plus connues des ONG qui s'occupent de droits humains ou humanitaires ont leur siège en Occident: Amnesty international à Londres, la Croix-Rouge internationale à Genève, et tant d'autres.
Notons enfin qu’en juin 1993, lors des réunions préparatoires de la Conférence mondiale pour les droits de l'homme qui se sont déroulées à Vienne en Autriche, des délégations du tiers-monde - de pays asiatiques essentiellement- ont remis en question l'universalité des droits de l’homme et même proclamé que c'était un moyen pour les Occidentaux d'imposer leur philosophie, voire même de recoloniser les pays du tiers-monde qui avaient échappé à leur tutelle.
On peut ajouter à cela le rôle suspect des Eglises venues pour la plus part de l’occident, ou, du moins, le rôle de certains milieux chrétiens, qui affirment que seule la foi chrétienne est capable de fonder les droits humains ; que c'est la révélation biblique, voire la seule personne du Christ, qui peut nous faire considérer tout être humain comme son prochain. Eh bien je dis que tout ceci c’est de l’aberration. Les africains que nous sommes doivent se débarrasser le plus rapidement possible maintenant de ces insanités. Ces fausses idées qu’on inculquait dans l’esprit des africains constituent de l’élixir, sinon du gaz au plutonium pour notre identité, pour nos cultures, pour notre civilisation séculaire. Car au fait elles nous laissent admettre que les adeptes d'autres religions ou ceux qui - comme les marxistes - ont renoncé au christianisme sont incapables de concevoir les droits humains. C’est archi faux, évidemment. C’est du pur complexe de supériorité supposée de la civilisation occidentale qui nous a déjà fait tant de mal en Afrique.
Je ne partage pas du tout ce point de vue. Et pourtant, je suis un fervent défenseur de « droits humains ». Comment alors comprendre ma position ? En effet, je ne dis pas qu’il faille abandonner « les droits humains ». Je constate tout simplement et amèrement qu’il y a, dans beaucoup des articles de « la Déclaration universelle des droits de l'homme » (DUDH), une empreinte évidente de la civilisation occidentale, et donc difficilement acceptables et compréhensibles pour des hommes et des femmes d'autres cultures que nous sommes. D’où ma recommandation de « désoccidentaliser »absolument les droits humains pour qu’ils deviennent véritablement et universellement humains. L’occident n’a pas le monopole de l’humanisme. Comment ? C’est ce que nous nous efforcerons de démontrer ensemble, après avoir préalablement fait deux remarques.
Revenez donc de temps en temps sur ce site pour la suite du débat. (À suivre donc…).
Michelot Yogogombaye
King.abe@hotmail.com
Il y a quelques années en arrière, j’ai été l’invité par la Convention annuelle des étudiants de l’Université de Berne pour présenter une conférence sur le thème des droits de l’homme en Afrique, c’est-à-dire « les Droits de l’Homme » tels que vus en Afrique par les africains. J'ai accepté l’invitation non pas que je me considère comme expert en la matière. Mais simplement parce que c’est une chose que j’ai vécu quotidiennement en tant qu’africain. C’est un sujet qui me tient beaucoup à cœur. Et aussi parce que l’occasion était belle pour envoyer un message de vérité à l’Europe occidentale. Je me suis donc adressé à un public de près d’un millier de jeunes étudiants. Des jeunes dont la plupart sera des décideurs de demain dans leurs pays et dont toute parcelle de décision aura un impact considérable sur la marche de l’Afrique. C’est avec et dans cet esprit que j’ai eu à intervenir pour parler « des Droits de l’Homme » vus d’Afrique.
Aujourd’hui, douze ans après, j’ai décidé de réactualiser le brouillon de cette conférence pour le porter à la connaissance du public africain par le billet d’Internet.
Cet exposé, de mon humble point de vue, a été présenté de manière remarquable, sans complexe et en toute sincérité. D’entrer de jeu, j’ai déclaré que les « Droits de l’Homme » ne sont qu’une invention de l’occident. Qu’ils n’ont rien d’universel car ils ne concernent qu’une infime partie (un quart) de l’humanité. C’est pourquoi, disais-je, je n’utiliserai pas le terme « Droits de l’Homme » mais plutôt « Droits Humains ». L’auditoire a acquiescé par un applaudissement nourri. Le sujet me tient beaucoup à cœur et j’ai la ferme intention de demander à l’Union Africaine de « désoccidentaliser » les droits humains de les rendre vraiment africainement universels et de laisser à l’occident ses « Droits de l’Homme », lesquels ne sont point faits pour les trois autres quarts de l’humanité auxquels nous appartenons.
Après avoir passé en revu quelques constatations pertinentes saupoudrées de quelques simples mais évidentes réflexions (première partie de mon exposé), je vous proposerai d’amorcer la discussion non seulement sur ce qui serait, pour nous, peuples africains, le concept des « Droits humains », mais aussi et plus généralement sur l’identité africaine, notre civilisation, et nos spécificités culturelles qui font que ce serait suicidaire pour nous d’embrasser les « Droits humains » tels qu’ils ont été conçus en occident pour l’Occident (première et deuxième parties) et évangélisés en Afrique.
Mes propos peuvent paraître à la limite de la provocation. Je l’admets et en assume pleinement la responsabilité. Mais je trouve que c’est nécessaire. Car pour nous africains, il est plus que urgent de se poser cette question : pourquoi avons-nous beaucoup plus que tout autre peuple au monde, d’inclinaison à abandonner notre identité, nos plus belles traditions issues de notre plus belle civilisation pour mimer l’identité et la civilisation des autres, notamment de l’occident?
1.les droits de l’homme sont une conception occidentale. Ils n’ont point d’utilité pour le reste trois quart de l’humanité.
Les droits de l’Homme sont une invention de l'Occident qui y avait d’ailleurs laissé sa marque indélébile. Et pour cause la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 a été proclamée à Paris après avoir été rédigée essentiellement par des Occidentaux. Cette Déclaration universelle des droits de l'homme elle-même fait suite à celle des droits de l'homme et du citoyen de 1789, à l'aube de la Révolution française, qui a des antécédents dans la philosophie anglaise (Locke, Hume), allemande (AufkJàrung), italienne (Beccaria) et aux Etats-Unis (Déclaration de Philadelphie, etc.).
Par la suite, les Européens ont signé en 1950 leur Convention : « La convention européenne des droits de l'homme. Les Pactes des Nations Unies sur « les droits civiques et politiques » d'une part et d'autre part sur « les droits économiques, sociaux et culturels », eux, ne sont signés qu’en 1966. Et il a fallu attendre 1969 pour avoir « la Convention interaméricaine des droits de l'homme », et seulement en 1981 que « la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples » a vu le jour. Dans la foulé on a eu « le mécanisme asiatique de régulation des droits humains » ainsi que « la Déclaration du Caire sur « les droits humains en Islam ».
Ce premier flash de remarque nous indique pour ainsi dire qu’effectivement l'Occident est beaucoup plus engagé que les autres régions du monde dans le domaine des droits humains. Par ailleurs, si l'on regarde du côté des organisations non gouvernementales (ONG), on est forcé de constater que, là aussi, les plus connues des ONG qui s'occupent de droits humains ou humanitaires ont leur siège en Occident: Amnesty international à Londres, la Croix-Rouge internationale à Genève, et tant d'autres.
Notons enfin qu’en juin 1993, lors des réunions préparatoires de la Conférence mondiale pour les droits de l'homme qui se sont déroulées à Vienne en Autriche, des délégations du tiers-monde - de pays asiatiques essentiellement- ont remis en question l'universalité des droits de l’homme et même proclamé que c'était un moyen pour les Occidentaux d'imposer leur philosophie, voire même de recoloniser les pays du tiers-monde qui avaient échappé à leur tutelle.
On peut ajouter à cela le rôle suspect des Eglises venues pour la plus part de l’occident, ou, du moins, le rôle de certains milieux chrétiens, qui affirment que seule la foi chrétienne est capable de fonder les droits humains ; que c'est la révélation biblique, voire la seule personne du Christ, qui peut nous faire considérer tout être humain comme son prochain. Eh bien je dis que tout ceci c’est de l’aberration. Les africains que nous sommes doivent se débarrasser le plus rapidement possible maintenant de ces insanités. Ces fausses idées qu’on inculquait dans l’esprit des africains constituent de l’élixir, sinon du gaz au plutonium pour notre identité, pour nos cultures, pour notre civilisation séculaire. Car au fait elles nous laissent admettre que les adeptes d'autres religions ou ceux qui - comme les marxistes - ont renoncé au christianisme sont incapables de concevoir les droits humains. C’est archi faux, évidemment. C’est du pur complexe de supériorité supposée de la civilisation occidentale qui nous a déjà fait tant de mal en Afrique.
Je ne partage pas du tout ce point de vue. Et pourtant, je suis un fervent défenseur de « droits humains ». Comment alors comprendre ma position ? En effet, je ne dis pas qu’il faille abandonner « les droits humains ». Je constate tout simplement et amèrement qu’il y a, dans beaucoup des articles de « la Déclaration universelle des droits de l'homme » (DUDH), une empreinte évidente de la civilisation occidentale, et donc difficilement acceptables et compréhensibles pour des hommes et des femmes d'autres cultures que nous sommes. D’où ma recommandation de « désoccidentaliser »absolument les droits humains pour qu’ils deviennent véritablement et universellement humains. L’occident n’a pas le monopole de l’humanisme. Comment ? C’est ce que nous nous efforcerons de démontrer ensemble, après avoir préalablement fait deux remarques.
Revenez donc de temps en temps sur ce site pour la suite du débat. (À suivre donc…).
Michelot Yogogombaye
King.abe@hotmail.com