AFRIQUE

Cameroun : le carburant frelaté alimente la région de l’Extrême-Nord


Alwihda Info | Par Ahmed Abdoul-Aziz - 13 Septembre 2024


Consommé par la quasi-totalité de la population depuis des décennies, il provient du Nigéria, pays voisin, malgré ses impacts socio-économiques et environnementales.


Le phénomène se finance par des barons presqu’invisibles, parfois placés au sommet de l’Etat.
Dans l'Extrême-Nord du Cameroun, du constat fait sur le terrain ce 2 septembre 2024 à Maroua, il se dégage qu’un phénomène persistant depuis plusieurs années, alimente à la fois les véhicules et le débat public : le « Zoua-Zoua » En effet, il s’agit d’un terme bien connu qui désigne un carburant frelaté, issu du marché noir, principalement importé du Nigeria.

Il ne s’agit pas d’un produit local, ni d’un phénomène culturel, mais d’un carburant frelaté, largement répandu et utilisé dans cette région frontalière avec le Nigeria. Ce carburant bon marché, mais de qualité douteuse, est l’épine dorsale d’un marché noir prospère, qui pallie les carences d’approvisionnement en carburant régulier.

La proximité géographique entre la région de l’Extrême-Nord du Cameroun et le Nigeria, favorise un commerce informel intense, où des produits de première nécessité, dont le carburant, traversent la frontière de manière clandestine. Selon plusieurs témoignages concordants, le « Zoua-Zoua » est produit à partir d’un mélange de divers hydrocarbures de qualité incertaine, est acheminé en grande quantité depuis le Nigeria vers le Cameroun.

Cela s’explique par les disparités économiques et les prix plus bas du carburant au Nigeria, comparativement aux prix officiels au Cameroun, souvent inaccessibles pour les populations locales.

Un marché illégal malgré tout
Le marché noir du carburant frelaté est avant tout une réponse à des besoins non satisfaits. Dans l’Extrême-Nord du Cameroun, les infrastructures de distribution de carburant sont insuffisantes, et les stations-service légales sont rares.

En conséquence, les habitants se tournent vers le « Zoua-Zoua », facilement accessible et moins coûteux, malgré ses effets délétères sur les moteurs et l’environnement. Le faible niveau de vie et le chômage généralisé dans la région, renforcent ce commerce illicite, qui représente également une source de revenus pour de nombreux jeunes désœuvrés.

L'utilisation du « Zoua-Zoua » a des conséquences multiples, tant sur le plan économique que sanitaire et environnemental. Sur le plan économique, bien que ce carburant permette à de nombreux conducteurs de continuer à circuler, il cause des dommages importants aux moteurs des véhicules, augmentant ainsi les coûts d’entretien à long terme.

Sur le plan de la santé, les vapeurs toxiques émises par ce carburant de mauvaise qualité présentent des risques pour la santé des utilisateurs et des populations environnantes.

En termes d'environnement, la combustion du « Zoua-Zoua » est particulièrement polluante, aggravant la qualité de l’air dans une région déjà affectée par d’autres problèmes environnementaux. De plus, la prolifération de ce commerce informel complique les efforts de l’État pour réguler le marché des hydrocarbures, et pour garantir la sécurité énergétique.

Ce travail a été réalisé grâce à une subvention accordée par le projet « Investigative Reporting Workshop for Journalists in Cameroon », mis en œuvre par la Cameroon Association of English-Speaking Journalists (CAMASEJ) et financé par l'ambassade des États-Unis à Yaoundé.

La vente du carburant frelaté, malgré son interdiction, se fait à ciel ouvert.

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