par Rodrigue Joseph Prudence MAYTE
Incroyable mais vrai ! Les carottes sont cuites et les dés sont jetés. Les élections centrafricaines, initialement prévues pour se tenir début 2015, vont être reportées… sine die. Si toutes les sommités politiques mondiales, semblaient avoir retenu à peu près la date du 15 février 2015, pour la tenue des prochaines échéances électorales en Centrafrique, il reste cependant que techniquement cette option paraît improbable, voire impossible à réaliser. A l'évidence, plusieurs paramètres confirment le report annoncé. Nous vous proposons de suivre ici, notre regard à travers ces quelques points :
1- Sécurité,
Bien que l'ONU ait décidé lors de sa session extraordinaire du 10 Avril dernier d'envoyer des casques bleus en Centrafrique pour le maintien de la paix, il en ressort que cette force internationale ne se déploiera dans le pays qu'au mois de septembre prochain. Sur le plan national, la situation sécuritaire est encore précaire et on relève encore des bruits de bottes aux antipodes du pays. Il ne se passe pas un seul jour sans que l'on ne puisse entendre des tirs sporadiques ou assister à un regain de tensions. En réalité, l'insécurité galopante a fait plus de 600 000 déplacés à Bangui selon l'ONU. Au-delà des frontières centrafricaines, on dénombre plus d'un million de personnes exilées. Cette situation sécuritaire qui peine à se normalise, fait accroître par ailleurs la méfiance des déplacés. Comment alors peut-on organiser un scrutin à la date indiquée? Quelle garantie pourrait-on offrir aux déplacés pour faciliter leur retour?
2- L'inaccessibilité des villes excentriques,
Il n'y a pas de doute, le pays est complétement exsangue. On a l'impression que les enturbanné ex-séléka, ont passé la Centrafrique toute entière en coupe réglée. Un expert international qui a sillonné récemment neuf (9) préfectures de la Centrafrique pour une étude propective des prochaines élections confiait : " Il suffit d'aller dans l'arrière-pays pour connaître le visage caché de la crise. A vrai dire, on penserait qu'un ouragan a traversé le pays ...". En dehors du constat amer de cet expert, les routes sont très impraticables et les ponts sont soit défectueux, soit, ont été dynamités par les rebelles.Les barques qui facilitaient l’accessibilité à certaines villes telles que Mongoumba, Djoukou, Bakala, Kouango ne sont plus fonctionnelles. Or les voies terrestres, aériennes et navales ont été toujours utilisées pour acheminer de façon concomitante les matériels électoraux. En outre, le déploiement des matériels électoraux s'effectue généralement en saison sèche pour éviter des malheureuses surprises. Dans le cas présent, on imagine mal comment les élections pourront se tenir à l’échéance préalablement fixée?
3- Les différentes échéances électorales,
Parmi ces scrutins, il y' a le référendum, la présidentielle et les législatives. La tenue de ces différentes élections nécessite un travail bien encadré en amont. Malheureusement la structure de l'ONU sensée appuyer techniquement les différentes échéances électorales, ne sera opérationnelle à Bangui qu'au mois de septembre car son calendrier est analogue à celui des casques bleus. Au-delà de ces dispositions organisationnelles, il est certain que le point le plus culminant de toutes les difficultés est l'élaboration du fichier électoral. A la base, ce fichier n'est rien d'autre qu'une base de données qui englobe la liste électorale et celle des bureaux de vote. On se souviendra qu'il y' avait quasiment 1870 000 électeurs en 2011. Ce chiffre ne sera plus le même naturellement. En dehors des cas de décès, il faut reconnaître que certains Centrafricains, qui ont atteint l'âge de voter , devraient s'inscrire dans dorénavant dans la liste électorale. Par contre, qu’en sera-t-il de l'identification des potentiels électeurs du pays ? On sait que de nombreux service d'états civils ont été entièrement détruits lors de la marche des Séléka. Aussi, faut-il s'attendre à une autre crise à ce niveau durant l'enrôlement ? Celui-ci se fera-t-il à travers des audiences foraines ou recensement général porte à porte ? Comment pourrait-on écarter les mercenaires tchadiens et soudanais qui disposent presque tous de passeports centrafricains?
Aux termes de notre analyse, il y' a lieu de reconnaître que la Centrafrique n'a pas encore fini de cautériser toutes ses plaies. Les experts internationaux qui ont dans un passé récent effectué une mission d'exploration dans la Centrafrique profonde ont affirmé que les élections seront techniquement intenables à la date prévue. Puisque que l'occasion fait le larron, Mme Samba Panza ne devrait ' elle pas penser à un habillage juridique pour prolonger son mandat ? Quoi qu'il advienne, on utilisera juste les mots contre des maux qui gangrènent la Centrafrique.
Rodrigue Joseph Prudence MAYTE
Chroniqueur, Polémiste
www.lesplumesderca.com