Photo: ©Said Khatib/AFP/Getty Images
Le Sénégal — et c’est tout à son honneur — s’est toujours illustré dans la défense de la cause palestinienne. Il s’est fermement tenu aux côtés du peuple martyr de Palestine. Cela a toujours été une constante de notre diplomatie et tous les présidents qui se sont succédé à la tête de ce pays, de Senghor à Macky Sall en passant par Abdou Diouf et Abdoulaye Wade, ont fait de la lutte pour la libération de la Palestine de l’injuste occupation israélienne un axe majeur de leur politique extérieure. Ce n’est pas pour rien, du reste, que notre pays préside depuis les années le Comité pour la défense des droits inaliénables du peuple palestinien à l’ONU. L’engagement du Sénégal pour cette cause est tellement connu que le mandat est renouvelé automatiquement chaque année. Le président Senghor en avait fait une affaire personnelle, ses successeurs ont conforté cet engagement. En même temps, notre pays a été l’un des premiers au monde à reconnaître la Palestine comme Etat et à conférer à sa représentation un statut diplomatique. Plus exactement à l’élever au rang d’ambassade. Une ambassade dont le fonctionnement est entièrement pris en charge par l’Etat sénégalais. Et alors que les dirigeants palestiniens étaient traités comme des pestiférés, beaucoup d’entre eux ont toujours bénéficié et jusqu’à aujourd’hui encore de passeports diplomatiques sénégalais pour voyager à travers le monde. Quant à Yasser Arafat, le mythique fondateur de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), il a toujours été accueilli à bras ouverts au Sénégal où l’on dit même qu’il aurait beaucoup investi…
Une position de défense des Palestiniens qui a souvent valu au Sénégal les foudres d’Israël, un Etat avec lequel notre pays n’a pas hésité à rompre diplomatiquement au lendemain de la guerre israélo-arabe de 1973. Ce en solidarité avec le monde arabe. Dakar a été l’une des dernières capitales africaines à rétablir ses relations avec Israël. C’est donc dire que nul ne saurait mettre en doute le soutien du Sénégal à la Palestine dans sa lutte pour recouvrer son territoire injustement occupé par l’Etat Hébreu. Tout cela est incontestable et nul ne saurait en douter.
Cela dit, et quelle que soit la justesse — incontestable — de la cause palestinienne, il reste qu’elle constitue avant tout une composante essentielle du conflit israélo-palestinien dont les véritables causes se perdent dans la nuit des temps. Contentons-nous de remonter à la Déclaration Balfour du nom d’un ministre des Affaires étrangères britannique qui préconisait, en 1917, la création d’un foyer national en Palestine. Au terme d’un processus dont j’épargnerai aux lecteurs les détails, l’Etat d’Israël est fondé en 1948.
Rejeté par les pays arabes voisins qui juraient de jeter les Juifs à la mer, le nouvel Etat, fortement soutenu par la « communauté internationale », s’est surarmé et s’est même doté de l’arme nucléaire. Par deux fois, les pays arabes lui ont déclaré la guerre. En 1967 d’abord, où ils ont été défaits par l’Etat hébreu qui en a profité pour occuper le Sinaï en Egypte et la Cisjordanie et la bande de Gaza, de même que les hauteurs du Golan en Syrie. Puis en 1973, lors de la guerre « des Six jours » au cours de laquelle les armées arabes, menées par l’Egypte du raïs Gamal Abdel Nasser ont pris l’avantage sur Israël qui n’a dû son salut qu’à la mise en place d’un pont aérien par les Etats-Unis qui ont acheminé des armes sophistiquées ayant permis à l’Etat Hébreu de desserrer l’étau et de retourner la situation à son avantage. Dans la guerre contre ce dernier, l’Egypte — en tant que pays arabe le plus peuplé et voisin direct d’Israël — a toujours supporté l’essentiel de l’effort de guerre et payé le plus lourd tribut. Aussi, la décision du président Anouar El Sadate de signer une paix séparée avec Israël en 1979 a-t-elle été vécue comme une trahison par le monde arabe. Sadate finira d’ailleurs assassiné par un commando islamiste. Toujours est-il qu’aucune guerre ne peut être menée contre Israël sans l’engagement de l’Egypte. Et aussi, de la Jordanie, qui a la frontière la plus longue avec l’Etat Hébreu. Pourquoi tout ce développement sur l’Egypte ? Pour dire tout simplement que cette puissance arabe est concernée au premier chef par le conflit israélo-arabe qui dure depuis 80 ans et dont le problème palestinien constitue le nœud gordien. Autrement dit, aussi bien intentionnés que soient des pays comme le Sénégal, la Nouvelle Zélande, la Malaisie, le Venezuela et tous les autres, nombreux, qui soutiennent le peuple palestinien dans sa lutte, ils ne peuvent que venir en appoint aux Etats de la ligne de front parmi lesquels le principal est l’Egypte. Qui est, du fait de son traité de paix avec Israël, le pays africain et arabe qui reçoit l’aide militaire américaine la plus importante. Par conséquent, il est difficile de comprendre que le petit Sénégal, qui survit grâce à la charité que lui font la France, les Usa et quelques pays arabes, veuille se substituer à l’Egypte pour combattre Israël. En effet, dans l’actuelle crise diplomatique qui oppose l’Etat Hébreu au Sénégal, on se demande que diable est bien allé faire notre pays dans cette galère moyen-orientale. Ou, plutôt, dans cet « Orient lointain et compliqué » où le général De Gaulle disait aller avec des idées simples. Car enfin, l’Egypte, pays jadis en guerre et toujours en première ligne face à Israël, s’étant rétractée — pour ne pas dire dégonflée — sous pression du président Donald Trump dans son initiative de présenter une résolution au Conseil de sécurité de l’ONU, au nom de quoi le Sénégal, jouant aux guerriers, s’est-il substitué à elle pour mener le combat — et donc prendre les coups — à sa place ? A part tout, nous, Nègres africains, ne devrions être que spectateurs dans ce conflit vu que les puissances arabes qui croulent sous les milliers de milliards de dollars, préfèrent les investir aux Etats-Unis, en Grande Bretagne, en France et autres Etats qui soutiennent sans condition Israël. Ce plutôt que d’utiliser leur puissance financière et les arsenaux que leur fourguent les Occidentaux pour libérer la Palestine. Un peuple palestinien au contraire plus d’une fois poignardé dans le dos par des pays arabes à l’exemple du Septembre Noir où des milliers d’entre eux avaient été massacrés en Jordanie. Ce dernier pays a d’ailleurs suivi l’Egypte pour signer une paix séparée avec Israël en 1994.
Bref, c’est très bien de soutenir la lutte du peuple palestinien — et en cela, il y a un large consensus des Sénégalais que nous sommes, pour une fois d’accord sur quelque chose — mais pas au point d’en rajouter pour porter tout seuls le combat à la place des Arabes concernés au premier chef. Des Arabes qui n’avaient pas fait de la lutte contre l’Apartheid en Afrique du Sud — un système odieux qui constituait l’équivalent africain du sionisme — une priorité pour eux. Pour ne pas dire qu’elle ne les intéressait pas du tout, le fait que des Nègres se fassent massacrer équivalant à leurs yeux à voir tuer du bétail.
Certes, face aux mesures de représailles prises par Israël contre le Sénégal — rappel immédiat « pour consultations » de son ambassadeur au Sénégal, annulation de la visite de Mankeur Ndiaye à Tel Aviv en janvier prochain, ainsi que de toutes les visites d’ambassadeurs non résidents sénégalais (mais aussi néo-zélandais en l’absence de relations diplomatiques avec le Venezuela et la Malaisie), annulation de tous les programmes d’aide israéliens au Sénégal —, les Sénégalais, comme un seul homme, doivent soutenir leur Gouvernement. C’est la moindre des choses. Il est en effet hors de question de plier face à l’Etat Hébreu qui est le symbole de l’impunité internationale et qui bénéficie du soutien sans réserve des USA. Lesquels recourent les yeux fermés au droit de veto pour bloquer toutes les résolutions contre ce pays dont il est hors de question de traduire les dirigeants criminels devant la CPI, une « juridiction » internationale qui n’est compétente que pour juger les Africains noirs. Pour en revenir à Israël, une fois n’est pas coutume, vendredi dernier, le président Barack Obama, sur le départ, a donné des instructions pour que son représentant au Conseil de sécurité de l’ONU s’abstienne. Permettant à la résolution parrainée par le Sénégal (devant la fuite honteuse de l’Egypte), le Venezuela, la Malaisie et la Nouvelle Zélande de passer comme lettre à la poste. La résolution exhortait Israël à « cesser immédiatement et complètement toute activité de colonisation en territoire palestinien occupé, dont Jérusalem Est. » Son vote a provoqué la fureur d’Israël qui a immédiatement fait savoir qu’il ne la respecterait pas. Naturellement, rien, aucune sanction, ne sera entrepris contre l’Etat Hébreu. Ah, si ç’avait été un petit Etat africain comme la Gambie de Yaya Jammeh qui avait osé faire un tel affront à la communauté internationale !
Mamadou Oumar NDIAYE
Article paru dans « Le Témoin » quotidien sénégalais (Décembre 2016 )
Une position de défense des Palestiniens qui a souvent valu au Sénégal les foudres d’Israël, un Etat avec lequel notre pays n’a pas hésité à rompre diplomatiquement au lendemain de la guerre israélo-arabe de 1973. Ce en solidarité avec le monde arabe. Dakar a été l’une des dernières capitales africaines à rétablir ses relations avec Israël. C’est donc dire que nul ne saurait mettre en doute le soutien du Sénégal à la Palestine dans sa lutte pour recouvrer son territoire injustement occupé par l’Etat Hébreu. Tout cela est incontestable et nul ne saurait en douter.
Cela dit, et quelle que soit la justesse — incontestable — de la cause palestinienne, il reste qu’elle constitue avant tout une composante essentielle du conflit israélo-palestinien dont les véritables causes se perdent dans la nuit des temps. Contentons-nous de remonter à la Déclaration Balfour du nom d’un ministre des Affaires étrangères britannique qui préconisait, en 1917, la création d’un foyer national en Palestine. Au terme d’un processus dont j’épargnerai aux lecteurs les détails, l’Etat d’Israël est fondé en 1948.
Rejeté par les pays arabes voisins qui juraient de jeter les Juifs à la mer, le nouvel Etat, fortement soutenu par la « communauté internationale », s’est surarmé et s’est même doté de l’arme nucléaire. Par deux fois, les pays arabes lui ont déclaré la guerre. En 1967 d’abord, où ils ont été défaits par l’Etat hébreu qui en a profité pour occuper le Sinaï en Egypte et la Cisjordanie et la bande de Gaza, de même que les hauteurs du Golan en Syrie. Puis en 1973, lors de la guerre « des Six jours » au cours de laquelle les armées arabes, menées par l’Egypte du raïs Gamal Abdel Nasser ont pris l’avantage sur Israël qui n’a dû son salut qu’à la mise en place d’un pont aérien par les Etats-Unis qui ont acheminé des armes sophistiquées ayant permis à l’Etat Hébreu de desserrer l’étau et de retourner la situation à son avantage. Dans la guerre contre ce dernier, l’Egypte — en tant que pays arabe le plus peuplé et voisin direct d’Israël — a toujours supporté l’essentiel de l’effort de guerre et payé le plus lourd tribut. Aussi, la décision du président Anouar El Sadate de signer une paix séparée avec Israël en 1979 a-t-elle été vécue comme une trahison par le monde arabe. Sadate finira d’ailleurs assassiné par un commando islamiste. Toujours est-il qu’aucune guerre ne peut être menée contre Israël sans l’engagement de l’Egypte. Et aussi, de la Jordanie, qui a la frontière la plus longue avec l’Etat Hébreu. Pourquoi tout ce développement sur l’Egypte ? Pour dire tout simplement que cette puissance arabe est concernée au premier chef par le conflit israélo-arabe qui dure depuis 80 ans et dont le problème palestinien constitue le nœud gordien. Autrement dit, aussi bien intentionnés que soient des pays comme le Sénégal, la Nouvelle Zélande, la Malaisie, le Venezuela et tous les autres, nombreux, qui soutiennent le peuple palestinien dans sa lutte, ils ne peuvent que venir en appoint aux Etats de la ligne de front parmi lesquels le principal est l’Egypte. Qui est, du fait de son traité de paix avec Israël, le pays africain et arabe qui reçoit l’aide militaire américaine la plus importante. Par conséquent, il est difficile de comprendre que le petit Sénégal, qui survit grâce à la charité que lui font la France, les Usa et quelques pays arabes, veuille se substituer à l’Egypte pour combattre Israël. En effet, dans l’actuelle crise diplomatique qui oppose l’Etat Hébreu au Sénégal, on se demande que diable est bien allé faire notre pays dans cette galère moyen-orientale. Ou, plutôt, dans cet « Orient lointain et compliqué » où le général De Gaulle disait aller avec des idées simples. Car enfin, l’Egypte, pays jadis en guerre et toujours en première ligne face à Israël, s’étant rétractée — pour ne pas dire dégonflée — sous pression du président Donald Trump dans son initiative de présenter une résolution au Conseil de sécurité de l’ONU, au nom de quoi le Sénégal, jouant aux guerriers, s’est-il substitué à elle pour mener le combat — et donc prendre les coups — à sa place ? A part tout, nous, Nègres africains, ne devrions être que spectateurs dans ce conflit vu que les puissances arabes qui croulent sous les milliers de milliards de dollars, préfèrent les investir aux Etats-Unis, en Grande Bretagne, en France et autres Etats qui soutiennent sans condition Israël. Ce plutôt que d’utiliser leur puissance financière et les arsenaux que leur fourguent les Occidentaux pour libérer la Palestine. Un peuple palestinien au contraire plus d’une fois poignardé dans le dos par des pays arabes à l’exemple du Septembre Noir où des milliers d’entre eux avaient été massacrés en Jordanie. Ce dernier pays a d’ailleurs suivi l’Egypte pour signer une paix séparée avec Israël en 1994.
Bref, c’est très bien de soutenir la lutte du peuple palestinien — et en cela, il y a un large consensus des Sénégalais que nous sommes, pour une fois d’accord sur quelque chose — mais pas au point d’en rajouter pour porter tout seuls le combat à la place des Arabes concernés au premier chef. Des Arabes qui n’avaient pas fait de la lutte contre l’Apartheid en Afrique du Sud — un système odieux qui constituait l’équivalent africain du sionisme — une priorité pour eux. Pour ne pas dire qu’elle ne les intéressait pas du tout, le fait que des Nègres se fassent massacrer équivalant à leurs yeux à voir tuer du bétail.
Certes, face aux mesures de représailles prises par Israël contre le Sénégal — rappel immédiat « pour consultations » de son ambassadeur au Sénégal, annulation de la visite de Mankeur Ndiaye à Tel Aviv en janvier prochain, ainsi que de toutes les visites d’ambassadeurs non résidents sénégalais (mais aussi néo-zélandais en l’absence de relations diplomatiques avec le Venezuela et la Malaisie), annulation de tous les programmes d’aide israéliens au Sénégal —, les Sénégalais, comme un seul homme, doivent soutenir leur Gouvernement. C’est la moindre des choses. Il est en effet hors de question de plier face à l’Etat Hébreu qui est le symbole de l’impunité internationale et qui bénéficie du soutien sans réserve des USA. Lesquels recourent les yeux fermés au droit de veto pour bloquer toutes les résolutions contre ce pays dont il est hors de question de traduire les dirigeants criminels devant la CPI, une « juridiction » internationale qui n’est compétente que pour juger les Africains noirs. Pour en revenir à Israël, une fois n’est pas coutume, vendredi dernier, le président Barack Obama, sur le départ, a donné des instructions pour que son représentant au Conseil de sécurité de l’ONU s’abstienne. Permettant à la résolution parrainée par le Sénégal (devant la fuite honteuse de l’Egypte), le Venezuela, la Malaisie et la Nouvelle Zélande de passer comme lettre à la poste. La résolution exhortait Israël à « cesser immédiatement et complètement toute activité de colonisation en territoire palestinien occupé, dont Jérusalem Est. » Son vote a provoqué la fureur d’Israël qui a immédiatement fait savoir qu’il ne la respecterait pas. Naturellement, rien, aucune sanction, ne sera entrepris contre l’Etat Hébreu. Ah, si ç’avait été un petit Etat africain comme la Gambie de Yaya Jammeh qui avait osé faire un tel affront à la communauté internationale !
Mamadou Oumar NDIAYE
Article paru dans « Le Témoin » quotidien sénégalais (Décembre 2016 )