POINT DE VUE

L'intolérable ingérence de l'ambassadeur de France à Bangui dans le prochain remaniement gouvernemental


Alwihda Info | Par Chantal Nganafei - 24 Mai 2014



Par Chantal Nganafei

Des citoyens centrafricains manifestent devant l'ambassade de France à Bangui, le 1er janvier 2013. © WONGOUE / CHINE NOUVELLE/SIPA
Pauvre Centrafrique, a-t-on envie de soupirer, si loin de Dieu et si proche de la France, paraphrasant ainsi la célèbre complainte des Mexicains au sujet des États-Unis. En tout cas, dans la situation actuelle de la Centrafrique, livrée au quatre vents, comme disait Georges Perros, parfois le soir mais pas seulement, il nous prend l'envie de téléphoner au bon Dieu. 
 
D'autant que les autorités du pays ou du moins les personnages qui sont considérés comme telles, sont réduits à subir les injonctions et les inadmissibles diktats de l'ambassadeur de France à Bangui. Selon des informations dignes de foi, peu avant son départ pour Libreville où elle doit assister à un sommet de la CEMAC, dame Samba Panza aurait reçu la visite de Charles Malinas, venu exiger d'elle de conserver certains ministres pourtant jugés incompétents au Gouvernement. Ces personnes devaient rester au Gouvernement non pas parce qu'elles auraient brillé par leur  compétence mais tout simplement parce qu'elles sont des amis du représentant de la France à Bangui. Parmi ses amis en question qu'il entend coûte que coûte les garder au Gouvernement, figure en bonne place Gisèle Bédan, ministre de l'éducation et porte-parole du Gouvernement dont on entend que très rarement le timbre de la voix. 
 
C’est à croire que le sport favori des ambassadeurs de France en Centrafrique est le trafic d’influence et les pressions tous azimuts sur les autorités locales. Pour preuve, le prédécesseur de Charles Malinas prenait le malin plaisir à faire pression sur Michel Djotodia pour que ce dernier nomme un de ses amis, le défunt Igor Kombonaguemo, avec qui il s'était préalablement entendu, au ministère des Mines. Aujourd'hui, cet ancien ambassadeur de France, Serge Mucetti, pour ne pas le nommer, en dépit d’être relevé de ses fonctions par le pouvoir socialiste est reparti à Bangui en tant consultant d'une société privée qu'il avait introduit en Centrafrique. Idem pour son prédécesseur, sieur Vidon, qui est membre du conseil d'administration d'une autre société qui fait des affaires à Bangui. De cela, aucun média en France n'en parle. Allez savoir pourquoi! 
 
D'après la même source souvent très bien informée, apprenant cette information à son retour vendredi d'Angola, le Premier ministre André NZapayeke serait dans tous ces états, qualifiant les intempestives et souvent contre productives interventions de Charles Malinas, d'inadmissibles. D'autant que ce n'est ni le rôle ni la mission d'un ambassadeur fût-il celui de la France de s'ingérer de manière aussi grotesque dans les affaires d'un pays souverain. Même si, reconnaissons-le, la République Centrafricaine n'a plus les moyens de préserver et de défendre sa souveraineté. 
 
Mais est-ce pour autant une raison de subir tant d’humiliation de la part d’un petit fonctionnaire du Quai d’Orsay qui, en France, ne voit même pas son président ? Faut-il, au prétexte que les actuelles autorités centrafricaines n'en sont pas unes, ajouter allègrement et sans discernement l'incompétence au chaos, l'amateurisme aux crimes, les amitiés douteux au tribalisme déjà outrancier du régime, au risque de conduire le pays définitivement à l'abîme? Il y'a de quoi être révolté, lorsque l'on sait que déjà pour la formation du premier Gouvernement d'André Nzapayeke, ces mêmes pratiques condamnables avaient cours.  En effet, la communauté internationale de Bangui, c'est-à-dire en fait les généraux congolais et ce même ambassadeur de France avaient exigé l'entrer de leurs protégés respectifs au Gouvernement. Il appartient donc à NZapayeke, au lieu d'être seulement choqué, d'opposer une fin de non recevoir à cette ingérence malavisée et inopportune. Car le Gouvernement centrafricain n'est en rien l'administration de la chancellerie de France à Bangui. Encore que... Mais le Premier ministre a-t-il seulement les moyens de sa politique? Rien n'est moins sûr.

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