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TCHAD

Mariage de mineures au Tchad : Un député rattrapé par sa propre loi


Alwihda Info | Par AZOUD Gédéon - 24 Novembre 2018



Mariage de mineures au Tchad : Un député rattrapé par sa propre loi
Auditionné le 23 novembre par le Procureur de la République, le député du Kanem, AZZAÏ MAHAMAT Hassan, est mis sous mandat de dépôt et déféré à la Maison d’arrêt de N’Djaména, le père de la fille y compris. A l’origine du problème, le mariage contracté avec une mineure nommée en abrégé Z.M.T.K, dont l’âge exact demeure sujet à controverse entre le ministère public et le collectif de ses avocats. Un mariage qui a courroucé toute l’opinion tchadienne.

Et pour cause, en dépit de l’immunité parlementaire dont il jouit, le député AZZAÏ MAHAMAT Hassan a été tout de suite arrêté et auditionné par le Procureur de la République, sans outre mesure qu’un citoyen en conflit avec la loi de son pays. En effet, tout est parti d’un mariage consenti et consommé ce 8 novembre 2018, à Nokou, une localité située au nord de la province du Kanem, à environ 500 km de N’Djaména, la capitale.

Trop tôt, ce désir lugubre du député a tourné en bourrique pour contre lui-même. En effet, la première nuit de noce aurait été sanguinaire. Evacuée à l’hôpital, la jeune mariée saignerait en grosse goutte, à la suite de ce qu’il convient de qualifié d’ignominie. Après consultation, l’hôpital se serait rendu compte de l’âgé prématuré de ladite mariée. Aussitôt, les responsables de l’hôpital auraient saisi le ministère public pour compétence, nous informe une source locale.

Saisi de l’affaire, le ministère public a ordonné son arrestation en capitale du Tchad pendant que N’Djaména célébrait encore (en différé) la journée internationale des droits de l’enfant. La justice tchadienne n’a rien attendu pour inculper AZZAÏ MAHAMAT Hassan qui n’ignore pas la loi, député, donc législateur de son état. Quoique lors d’une conférence de presse animée le 22 novembre 2018, à la Maison des Médias du Tchad, le collectif d’Avocat du député AZZAÏ MAHAMAT Hassan, ayant pour porte-parole, Me. TORDE DJIMADOUM ait tenté de prouver à l’opinion que la jeune fille aurait atteint l’âge de la majorité. Et, la victime elle-même signe et persiste, acte de naissance (témoignant sa naissance le 26/04/1999), à l’appui, qu’elle est âgée de 19 ans. Démonstration qui n’a pas convaincu le Procureur de la République, d’autant plus que l’acte de naissance en question est sujet à caution, car établi sans témoin et ne répondant pas aux critères d’un document valable. D’ailleurs, ce postulat est contesté par une partie de ses parents pour qui la jeune fille est effectivement âgée de 14 ans.

Les défis de la justice tchadienne

En tout cas, cette affaire de mariage de mineure à l’origine de laquelle beaucoup de citoyens croupissent dans différentes cellules à travers le pays, apparaît comme un chantier pour lequel le Président de la République du Tchad Idriss Déby Itno s’est voué à éradiquer. Tout compte fait, le ministère public a donné l’impression d’avoir pris ce dossier au sérieux. Le Tchad étant un pays où le mariage des mineurs est le plus pratiqué, soutenu par les coutumes, la religion, la pauvreté et l’ignorance. Les dignitaires politiques et consorts étant aussi fortement impliqués dans ces pratiques moyenâgeuses en dépit des luttes que mènent les défenseurs des droits de l’Homme. Mais depuis 2015, le mariage des mineurs est qualifié de délit par la législation tchadienne : l’ordonnance nº 006/PR/2015 a interdit le mariage des mineurs dont l’âge est inférieur ou égal à 18 ans.

Bien ! Reste à savoir, jusqu’où aboutira ce procès qui fascine toute l’opinion et qui alimente à la fois les débats dans tous les coins de la capitale et agite la famille biologique et politique de ce député. La justice est toujours critiquée pour son indifférence complice face aux dignitaires de la République réfractaires à la loi.

Le Tchad étant accusé par plusieurs rapports d’ONG et de défenseurs de droits humains, de violations gravissimes des droits de l’Homme, dont ceux des enfants, notamment au courant de l’année 2018, cette affaire doit être un défi pour permettre à la justice tchadienne de tirer son épingle du jeu. Certes, il faut toujours retenir son souffle lorsqu’au Tchad il s’agit de certaines catégories sociopolitiques. Toutefois, le fait qu’un député soit inculpé pour sa libido est un exemple assez parlant pour bon nombre de ces Tchadiens qui courent encore en toute liberté, narguant même leurs victimes...

A dire vrai, rien ne permet aujourd’hui, au député AZZAÏ MAHAMAT Hassan, de se tirer de l’affaire, même s’il avait cru qu’aller célébrer un mariage interdit par la loi, à 500 km de N’Djaména, serait un gage pour lui afin de se mettre à l’abri de la justice. Et la falsification d’un acte de naissance doit logiquement être une seconde infraction autrement gravissime.



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)