Le Tchad et la Banque mondiale divorcent sur le pétrole
N'DJAMENA - Lassée par le non-respect du Tchad des accords sur l'utilisation de ses revenus pétroliers, la Banque mondiale a supprimé son aide aux infrastructures pétrolières alors que N'Djamena assure qu'il s'agit d'une décision "consensuelle".
"Pendant des années, le Tchad n'a pas mis en oeuvre les conditions clés (...), n'a pas alloué des ressources adéquates vers les secteurs critiques à la réduction de la pauvreté. Malheureusement (...), la Banque est donc arrivée à la conclusion qu'elle ne pourrait plus continuer à soutenir le projet oléoduc", selon le communiqué de la Banque Mondiale diffusé dans la nuit de mardi à mercredi.
Si l'annonce est médiatique, N'Djamena n'a pas paru affecté outre mesure, réglant 47 millions d'euros pour solder "tous les prêts avec la Banque mondiale sur le pétrole".
Le ministre tchadien de l'Economie et du Plan Ousmane Matar Breme parle de décision "consensuelle" loin d'être "une apocalypse" pour un pays qui produit désormais 170.000 barils/jour et reçoit environ 750 millions d'euros de recettes de l'or noir par an.
Selon le ministre, "comme on n'arrive pas à régler certaines incompréhensions, il vaut mieux arrêter (la coopération avec la Banque mondiale dans) le secteur pétrole pour mieux se consacrer sereinement au développement dans d'autres domaines".
Selon la Banque mondiale, N'Djamena n'a jamais respecté les accords qui ont permis au Tchad d'acheminer le pétrole produit dans la région de Doba (450 km au sud-est de N'Djamena) par un oléoduc de plus de 1.000 km reliant le site au terminal camerounais de Kribi, sur la côte du Golfe de Guinée.
Ce pipeline avait été financé par la Banque mondiale, la Banque européenne d'investissements et un consortium de compagnies pétrolières contre l'engagement du Tchad à affecter 70% des revenus pétroliers à la réduction de la pauvreté.
"Depuis 2006 nous avons vécu un contexte particulier qui a impacté sur le budget en général. On ne peut pas oublier ce contexte" de guerre civile et d'attaques de la rébellion" (2006, 2008), insiste M. Matar Breme.
"Le gouvernement a pris les dispositions pour assurer les fonctions régaliennes: sécurité et souveraineté nationale", a-t-il ajouté, assurant que: "60% des recettes de l'Etat toutes sources confondues ont été acheminées vers les secteurs prioritaires" du Tchad, un des pays les plus démunis au monde.
L'avocate Delphine Djiraïbé, figure de la société civile, renvoie dos à dos le président Idriss Deby qui "utilise l'argent du pétrole pour faire la guerre", et la Banque mondiale qui "a fui ses responsabilités".
"Le retrait n'est pas une solution. C'est injuste à l'égard de la population. La Banque mondiale s'est impliquée dans le projet, elle doit proposer des solutions. Elle devait faire pression sur le gouvernement", ajoute-t-elle.
Du côté de la rébellion, le général Mahamat Nouri, principal chef rebelle du Tchad, a estimé que "la population paie (...) le détournement, le pillage et utilisation à des fins militaires" de l'argent du pétrole.
Interrogé sur une responsabilité de la rébellion et de ses fréquentes attaques dans la hausse des dépenses militaires de N'Djamena, le général Nouri a répondu: "Il y a une rébellion parce qu'il y a une mauvais gouvernance, et la révolte des Tchadiens, c'est celle-là".
"La Banque mondiale ne fait que consacrer une situation de fait. On ne peut que déplorer que le principal partenaire du projet pétrolier soit aujourd'hui jeté par la fenêtre comme un malpropre", a commenté Saleh Kebzabo, porte-parole adjoint de la Coordination des partis politiques pour la défense de la Constitution (CPDC, opposition).
"Cela indique de Deby peut désormais disposer des revenus pétroliers à sa guise", a-t-il précisé.
(©AFP / 10 septembre 2008 18h03)
N'DJAMENA - Lassée par le non-respect du Tchad des accords sur l'utilisation de ses revenus pétroliers, la Banque mondiale a supprimé son aide aux infrastructures pétrolières alors que N'Djamena assure qu'il s'agit d'une décision "consensuelle".
"Pendant des années, le Tchad n'a pas mis en oeuvre les conditions clés (...), n'a pas alloué des ressources adéquates vers les secteurs critiques à la réduction de la pauvreté. Malheureusement (...), la Banque est donc arrivée à la conclusion qu'elle ne pourrait plus continuer à soutenir le projet oléoduc", selon le communiqué de la Banque Mondiale diffusé dans la nuit de mardi à mercredi.
Si l'annonce est médiatique, N'Djamena n'a pas paru affecté outre mesure, réglant 47 millions d'euros pour solder "tous les prêts avec la Banque mondiale sur le pétrole".
Le ministre tchadien de l'Economie et du Plan Ousmane Matar Breme parle de décision "consensuelle" loin d'être "une apocalypse" pour un pays qui produit désormais 170.000 barils/jour et reçoit environ 750 millions d'euros de recettes de l'or noir par an.
Selon le ministre, "comme on n'arrive pas à régler certaines incompréhensions, il vaut mieux arrêter (la coopération avec la Banque mondiale dans) le secteur pétrole pour mieux se consacrer sereinement au développement dans d'autres domaines".
Selon la Banque mondiale, N'Djamena n'a jamais respecté les accords qui ont permis au Tchad d'acheminer le pétrole produit dans la région de Doba (450 km au sud-est de N'Djamena) par un oléoduc de plus de 1.000 km reliant le site au terminal camerounais de Kribi, sur la côte du Golfe de Guinée.
Ce pipeline avait été financé par la Banque mondiale, la Banque européenne d'investissements et un consortium de compagnies pétrolières contre l'engagement du Tchad à affecter 70% des revenus pétroliers à la réduction de la pauvreté.
"Depuis 2006 nous avons vécu un contexte particulier qui a impacté sur le budget en général. On ne peut pas oublier ce contexte" de guerre civile et d'attaques de la rébellion" (2006, 2008), insiste M. Matar Breme.
"Le gouvernement a pris les dispositions pour assurer les fonctions régaliennes: sécurité et souveraineté nationale", a-t-il ajouté, assurant que: "60% des recettes de l'Etat toutes sources confondues ont été acheminées vers les secteurs prioritaires" du Tchad, un des pays les plus démunis au monde.
L'avocate Delphine Djiraïbé, figure de la société civile, renvoie dos à dos le président Idriss Deby qui "utilise l'argent du pétrole pour faire la guerre", et la Banque mondiale qui "a fui ses responsabilités".
"Le retrait n'est pas une solution. C'est injuste à l'égard de la population. La Banque mondiale s'est impliquée dans le projet, elle doit proposer des solutions. Elle devait faire pression sur le gouvernement", ajoute-t-elle.
Du côté de la rébellion, le général Mahamat Nouri, principal chef rebelle du Tchad, a estimé que "la population paie (...) le détournement, le pillage et utilisation à des fins militaires" de l'argent du pétrole.
Interrogé sur une responsabilité de la rébellion et de ses fréquentes attaques dans la hausse des dépenses militaires de N'Djamena, le général Nouri a répondu: "Il y a une rébellion parce qu'il y a une mauvais gouvernance, et la révolte des Tchadiens, c'est celle-là".
"La Banque mondiale ne fait que consacrer une situation de fait. On ne peut que déplorer que le principal partenaire du projet pétrolier soit aujourd'hui jeté par la fenêtre comme un malpropre", a commenté Saleh Kebzabo, porte-parole adjoint de la Coordination des partis politiques pour la défense de la Constitution (CPDC, opposition).
"Cela indique de Deby peut désormais disposer des revenus pétroliers à sa guise", a-t-il précisé.
(©AFP / 10 septembre 2008 18h03)