Monsieur le Président,
Je voudrais féliciter les Etats-Unis d’Amérique pour leur accession à la Présidence du Conseil de Sécurité des Nations Unies, et vous remercier pour ce Sommet organisé sur un thème aussi important que celui de la menace posée par les combattants terroristes étrangers.
Je remercie aussi M. Banki-Moon, Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies pour son brillant exposé mettant en évidence les questions pointues de sécurité dans le monde.
Le terrorisme et l’extrémisme violent constituent assurément l’un des pires fléaux de notre époque .Le phénomène des combattants étrangers que j’appelle «l’international djihadiste du 21esiècle», prend de l’ampleur et des proportions inquiétantes.
Il est grand temps que le Conseil de sécurité s’y penche pour trouver une solution adéquate. Nous saluons à cet égard, l’adoption à l’unanimité de la résolution S/2014/2178, proposée par les Etats Unis d’Amérique que mon pays a coparrainée.
Par rapport aux quatre points sur lesquels la note de cadrage du 3 septembre 2014 nous invite à nous prononcer, je ferais trois observations : la menace que constitue le phénomène des combattants étrangers, la situation et l’approche du Tchad face au phénomène en question et enfin , l’extrémisme violent et les solutions visant à l’éradiquer.
Monsieur le Président,
En ce qui concerne la menace, elle est globale et en constante évolution, car les combattants étrangers, en particulier dans les groupes terroristes tels que l’Etat islamique en Iraq et au Levant et le Front Al-Nous raviennent des 5 continents du globe et leur nombre croit de façon exponentielle. A l’heure actuelle, les estimations font état de la présence de plusieurs milliers des combattants étrangers, originaires de plus de 80 pays, venant en majorité du Moyen-Orient et des pays non-musulmans dont ceux de l’Occident. Ils sont en majorité jeunes et recrutés, entre autres, à travers l’Internet et surtout les réseaux sociaux.
Le continent africain est également confronté au phénomène des combattants étrangers. Les groupes terroristes comme BokoHaram, Al Qaida au Maghreb Islamique et Al-Shabab, qui se sont avérés les plus dangereux au cours des récentes années, en possèdent dans leurs rangs. 22 pays du continent ont été jusque-là la cible de violences terroristes.
C’est pour cette raison, que le 2 septembre dernier, j’ai présidé à Nairobi, un Sommet du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine à l’issue duquel d’importantes décisions ont été prises à l’échelle du continent pour faire face au double phénomène du terrorisme et de l’extrémisme violent . A cet égard, le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine a demandé à la Commission de l’Union Africaine d’envisager, entre autres, des mesures comme :
- Le renforcement du cadre juridique de lutte contre le terrorisme par la coopération inter-police en Afrique, la mise en place d’un mandat d’arrêt africain contre les auteurs et complices d’actes terroristes ainsi que le mécanisme d’assèchement des sources de financement du terrorisme ;
- La création d’un Fonds spécial de lutte contre le terrorisme ;
- La mise en place des unités spéciales aux niveaux sous régional et régional. Dans cette perspective, il est indispensable que les Partenaires de l’Afrique lui apportent un soutien technique et matériel conséquent en vue de permettre à ses unités d’accomplir efficacement leur mission.
Malgré l’immensité de son territoire, le Tchad fait des efforts pour assurer la sécurité à l’intérieur de ses frontières. De concert avec nos voisins, nous avons créé des forces mixtes opérant des patrouilles conjointes pour dissuader les criminels et bandits de tous genres.
Malgré l’absence de l’extrémisme violent au Tchad, le gouvernement, de concert avec les autorités religieuses, est profondément impliqué dans la prévention à travers la sensibilisation contre le terrorisme.
Hors de nos frontières, le Tchad porte une attention particulière à la sécurité régionale. C’est ainsi que l’Armée tchadienne s’est engagée sur plusieurs théâtres, notamment au Mali où elle paye un lourd tribut.
Monsieur le Président,
Pour éradiquer le phénomène des combattants étrangers, il faut s’attaquer à ses causes profondes. En Afrique l’émergence du terrorisme et de l’extrémisme violent est alimentée par la pauvreté et la misère des populations en général et le chômage des jeunes en particulier .En effet les jeunes sont des proies faciles pour les groupes terroristes qui disposent des ressources importantes provenant du trafic de la drogue et d’autres commerces illicites.
Pour freiner ces pratiques qui menacent dangereusement la sécurité du continent, il importe que la Communauté internationale soutienne les projets et programmes de développement initiés en faveur de la jeunesse africaine.
Mesdames, Messieurs ;
S’agissant des conflits armés qui secouent le monde, le Conseil de sécurité des Nations Unies dont la raison d’être est le maintien de la paix et de la sécurité internationales est interpellé pour trouver les voies et moyens pouvant permettre de résoudre tous ces conflits, en particulier ceux en Syrie et en Iraq.
Dans ces pays, en sus des causes endogènes, nous constatons avec regret que les interférences extérieures ont non seulement provoqué des conflits aux conséquences incalculables, mais aussi et surtout, créé un terrain fertile à l’émergence et au développement de l’extrémisme et du terrorisme violent .Le phénomène des combattants étrangers, que ce soit hier, en Afghanistan ou aujourd’hui en Syrie et en Iraq, est parfois exacerbé par des ingérences extérieures.
On se demande pourquoi des pays comme la Syrie, l’Iraq, le Yémen, la Libye, pour ne citer que ceux-là, se sont subitement transformés en terrain de prédilection de groupes terroristes et de combattants étrangers ?
Comment en est-on arrivé d’une situation de stabilité politique relative à la situation actuelle de guerre et de violences ? Une réflexion profonde sur ces questions, dans un cadre concerté à l’échelle de la planète, en tenant compte de la diversité et de la complexité de nos sociétés modernes, pourrait aider à mieux cerner les causes profondes de la menace et à prévenir l’extrémisme violent.
C’est pourquoi, tout en réaffirmant la nécessité de mener une guerre sans merci à l’extrémisme et au terrorisme sous toutes ses formes, nous rappelons la nécessité de préserver la souveraineté et l’intégrité territoriale des États et de fonder solidement le recours à l’emploi de la force sur les principes et les buts de la Charte des Nations Unies.
Nous espérons que la résolution que nous venons de voter et les mesures qui y sont contenues, permettront de répondre à ce souci et aux défis que pose le terrorisme en général, et le phénomène des combattants étrangers en particulier.
Je vous remercie !