Le continent africain est plus que jamais concernée, c’est le moins que l’on puisse dire, au danger du terrorisme, son visage hideux et ses conséquences dramatiques. Il ne se passe plus un mois, voire carrément une semaine si ce n’est un jour, sans que l’on signale les souffrances humaines ainsi que la désolation que l’action terroriste sème sur son passage dans certains pays africains. Cette funeste gangrène — c’est comme cela qu’il faille la nommer — qui charrie des cadavres et cause des malheurs est une hydre nommée Shebab, Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique), Ansar Eddine ou alors Boko Haram, désormais affilé au prétendu « État » Islamique (EI). Ces groupes dont les appellations évoquent la terreur ont essaimé un peu partout en Afrique. C’est un fait. Rares sont les régions du continent qui sont épargnées. Ils disposent de milliers d’hommes endoctrinés prêts à tout et se servent de prétextes aussi fantaisistes que loufoques pour commettre leurs crimes abominables contre des innocentes victimes.
Cet état de chose participe, en se parant des atours d’une époque que l’on croyait révolue, de la logique de « guerre totale » à l’Afrique dont l’ultime objectif est de maintenir le continent dans la pauvreté et la misère, donc sous de nombreuses dominations. Comment en serait-il autrement d’ailleurs, lorsque l’on sait que c’est justement au moment où l’Afrique a mis le turbo compresseur pour être, d’ici 2050, l’un des plus grands marchés du monde (avec près de 2 milliards d’individus) que ces groupes de la honte ont commencé à pousser comme des champignons sous le ciel si pluvieux du continent ? Faut-il le rappeler, l’Afrique enregistre depuis plus d’une décennie des taux de croissance de 5 % par an en moyenne, la croissance de son PIB a atteint 5,6% en 2013 et 6,1 % en 2014, le chiffre d'affaires des secteurs liés à la consommation et aux services devrait croître de 410 milliards de dollars selon le dernier rapport du cabinet McKinsey. Toutes choses qui préparent le continent à un lendemain meilleur.
Cependant, cette embellie économique qui place l’Afrique sur un haut pavois ne fait pas que des heureux, loin s’en faut. À ce propos, penser, comme le fait une certaine élite africaine, que les récentes activités terroristes sur le continent ne seraient que des épiphénomènes ou ne seraient alors que la conséquence logique de l’incurie des régimes africains c’est se tromper grassement. Fonder une analyse essentiellement sur les causes endogènes du problème c’est faire preuve d’une affligeante naïveté. Car, s’il est vrai que les pouvoirs en place sur le continent, comme par exemple au Nigéria ou naguère au Mali, portent une part de responsabilité non négligeable dans la montée en puissance et la mutation de la menace terroriste parce qu’ils n’ont pas su adapter leurs réponses sécuritaires aux enjeux stratégiques de l’heure, il n’en demeure pas moins vrai que certaines raisons de cette poussée de fièvre terroriste sont à rechercher ailleurs. Peut-être d’ailleurs du côté des auteurs de la thèse de « l’Afrique, réserve du monde » et des théoriciens convaincus de l’incapacité du continent à se développer. Leur timide engagement dans la lutte contre ce fléau laisse mal percer leur exultation à l’idée de voir le continent sombrer dans le chaos. C’est dire que le problème posé en réalité, n’en déplaise aux bonnes âmes, est beaucoup plus complexe qu’on ne l’imagine et se présente en des termes on ne peut plus brutaux: se protéger par tout moyen ou disparaître!
Créer une taxe « Nelson Mandela » pour financer la bataille
Inutile de rappeler ici que le terrorisme menace les fondements même de l’Afrique mais la réponse apportée par les responsables africains, dont personne ne conteste l’intelligence toute technocratique n’est pas parvenue jusque-là à se hisser à la hauteur du grand danger qui guette le continent. Sans denier la pertinence des initiatives régionales et sous-régionales au sujet de la lutte contre le terrorisme, il faut craindre qu’elles ne soient partielles et parcellaires parce que ne prenant pas en compte l’ensemble des enjeux géo-stratégiques de ce monde globalisé où la loi du plus fort est la meilleure. La menace étant globale, la réponse se doit être tout autant globale. Elle doit surtout être africaine.
Il est temps que les citoyens africains (dignitaires y compris), pétris de dignité et mus par le seul désir de bâtir un continent économiquement fort, oeuvrent résolument pour prévenir ces menaces qui nous guettent. Puisque « nul ne vient relever une nation qui s’abandonne si ce n’est pour la mettre à son service » (Michel Jobert), l’Afrique ne doit compter que sur ses propres moyens. D’autant que la lenteur de notre réponse face à ce fléau et les événements de ces derniers temps se sont chargés, avec l’élégance d’un bloc de béton, de nous rappeler qu’il est urgent de doter l’Afrique d’une expression militaire suffisamment dissuasive, capable de châtier ceux qui rêvent de la détruire. Cette capacité militaire tant souhaitée, c’est une question de bon sens, ne saurait être financer par les autres. Il nous faut d’abord regarder dans nos propres poches.
Comme nous sommes engagés dans une véritable guerre et que, dès lors, tout le monde doit se sentir concerné, il nous faut instamment envisager, à l’échelle africaine, l’instauration d’une taxe « Nelson Mandela » pour la lutte contre le terrorisme et les menaces extérieures. Cette « taxe Mandela », instituée sur les appels téléphoniques et sur tous les billets d’avion en partance ou à destination de l’Afrique devra être collectée par l’ensemble des pays de l’Union Africaine et placée sous son autorité. Elle servira à la création d’un centre de recherche sur les réponses à apporter aux menaces visant le continent et à financer les opérations de lutte anti-terrorisme. Le raisonnement théorique rigoureux précédant toute démarche sérieuse, la création du centre de recherche de l’Union Africaine sur les menaces touchant le continent nous parait structurant. Ce centre nous permettra d’envisager le règlement de nos problèmes sécuritaires sous un angle typiquement africain et nous évitera de nous gargariser de concepts « fétichisés » par un Occident réfractaire à l’idée même du développement de l’Afrique.
Gageons que le péril qui pèse sur notre existence même nous aidera à vaincre nos réticences et à nous engager totalement et courageusement dans cette bataille qui est nôtre.
Georges Adrien Poussou
Ancien Ministre
adrien_poussou@yahoo.fr
Cet état de chose participe, en se parant des atours d’une époque que l’on croyait révolue, de la logique de « guerre totale » à l’Afrique dont l’ultime objectif est de maintenir le continent dans la pauvreté et la misère, donc sous de nombreuses dominations. Comment en serait-il autrement d’ailleurs, lorsque l’on sait que c’est justement au moment où l’Afrique a mis le turbo compresseur pour être, d’ici 2050, l’un des plus grands marchés du monde (avec près de 2 milliards d’individus) que ces groupes de la honte ont commencé à pousser comme des champignons sous le ciel si pluvieux du continent ? Faut-il le rappeler, l’Afrique enregistre depuis plus d’une décennie des taux de croissance de 5 % par an en moyenne, la croissance de son PIB a atteint 5,6% en 2013 et 6,1 % en 2014, le chiffre d'affaires des secteurs liés à la consommation et aux services devrait croître de 410 milliards de dollars selon le dernier rapport du cabinet McKinsey. Toutes choses qui préparent le continent à un lendemain meilleur.
Cependant, cette embellie économique qui place l’Afrique sur un haut pavois ne fait pas que des heureux, loin s’en faut. À ce propos, penser, comme le fait une certaine élite africaine, que les récentes activités terroristes sur le continent ne seraient que des épiphénomènes ou ne seraient alors que la conséquence logique de l’incurie des régimes africains c’est se tromper grassement. Fonder une analyse essentiellement sur les causes endogènes du problème c’est faire preuve d’une affligeante naïveté. Car, s’il est vrai que les pouvoirs en place sur le continent, comme par exemple au Nigéria ou naguère au Mali, portent une part de responsabilité non négligeable dans la montée en puissance et la mutation de la menace terroriste parce qu’ils n’ont pas su adapter leurs réponses sécuritaires aux enjeux stratégiques de l’heure, il n’en demeure pas moins vrai que certaines raisons de cette poussée de fièvre terroriste sont à rechercher ailleurs. Peut-être d’ailleurs du côté des auteurs de la thèse de « l’Afrique, réserve du monde » et des théoriciens convaincus de l’incapacité du continent à se développer. Leur timide engagement dans la lutte contre ce fléau laisse mal percer leur exultation à l’idée de voir le continent sombrer dans le chaos. C’est dire que le problème posé en réalité, n’en déplaise aux bonnes âmes, est beaucoup plus complexe qu’on ne l’imagine et se présente en des termes on ne peut plus brutaux: se protéger par tout moyen ou disparaître!
Créer une taxe « Nelson Mandela » pour financer la bataille
Inutile de rappeler ici que le terrorisme menace les fondements même de l’Afrique mais la réponse apportée par les responsables africains, dont personne ne conteste l’intelligence toute technocratique n’est pas parvenue jusque-là à se hisser à la hauteur du grand danger qui guette le continent. Sans denier la pertinence des initiatives régionales et sous-régionales au sujet de la lutte contre le terrorisme, il faut craindre qu’elles ne soient partielles et parcellaires parce que ne prenant pas en compte l’ensemble des enjeux géo-stratégiques de ce monde globalisé où la loi du plus fort est la meilleure. La menace étant globale, la réponse se doit être tout autant globale. Elle doit surtout être africaine.
Il est temps que les citoyens africains (dignitaires y compris), pétris de dignité et mus par le seul désir de bâtir un continent économiquement fort, oeuvrent résolument pour prévenir ces menaces qui nous guettent. Puisque « nul ne vient relever une nation qui s’abandonne si ce n’est pour la mettre à son service » (Michel Jobert), l’Afrique ne doit compter que sur ses propres moyens. D’autant que la lenteur de notre réponse face à ce fléau et les événements de ces derniers temps se sont chargés, avec l’élégance d’un bloc de béton, de nous rappeler qu’il est urgent de doter l’Afrique d’une expression militaire suffisamment dissuasive, capable de châtier ceux qui rêvent de la détruire. Cette capacité militaire tant souhaitée, c’est une question de bon sens, ne saurait être financer par les autres. Il nous faut d’abord regarder dans nos propres poches.
Comme nous sommes engagés dans une véritable guerre et que, dès lors, tout le monde doit se sentir concerné, il nous faut instamment envisager, à l’échelle africaine, l’instauration d’une taxe « Nelson Mandela » pour la lutte contre le terrorisme et les menaces extérieures. Cette « taxe Mandela », instituée sur les appels téléphoniques et sur tous les billets d’avion en partance ou à destination de l’Afrique devra être collectée par l’ensemble des pays de l’Union Africaine et placée sous son autorité. Elle servira à la création d’un centre de recherche sur les réponses à apporter aux menaces visant le continent et à financer les opérations de lutte anti-terrorisme. Le raisonnement théorique rigoureux précédant toute démarche sérieuse, la création du centre de recherche de l’Union Africaine sur les menaces touchant le continent nous parait structurant. Ce centre nous permettra d’envisager le règlement de nos problèmes sécuritaires sous un angle typiquement africain et nous évitera de nous gargariser de concepts « fétichisés » par un Occident réfractaire à l’idée même du développement de l’Afrique.
Gageons que le péril qui pèse sur notre existence même nous aidera à vaincre nos réticences et à nous engager totalement et courageusement dans cette bataille qui est nôtre.
Georges Adrien Poussou
Ancien Ministre
adrien_poussou@yahoo.fr