Par Fayçal Megherbi, avocat au Barreau de Paris
Site Internet : www.faycalmegherbi.com
Courriel : cabinetavocatfm@gmail.com
Le 10 décembre 2012, le ministère français de l’intérieur a indiqué que la France renonce à amender l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles en France.
Depuis plus de deux ans, l’Algérie et la France se préparaient à mettre en place un quatrième avenant à l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 qui réglemente le séjour, l’emploi et la circulation des ressortissants algériens en France.
Les dernières rencontres entre les représentants politiques des deux pays ont laissé croire qu’un nouvel avenant franco-algérien allait être mis en œuvre. Le Président algérien, Abdelaziz Bouteflika, a, le 20 juin 2010, reçu le secrétaire général de l’Élysée, Claude Guéant, et le conseiller diplomatique, Jean-David Levitte, de Nicolas Sarkozy. Lors de cet entretien la question de l’avenant était abordée.
Le 22 juin 2010, Jacques Toubon, président de la Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration et ancien ministre de la Culture et de la Francophonie et de la justice, a annoncé, lors d’une conférence sur le thème : « Immigration et Intégration en France : histoire et perspectives », au centre culturel français d’Alger, que l’accord franco-algérien sera modifié en octobre 2010.
Ce projet devait être abordé durant la visite officielle, du président algérien, en France en juin 2009 ; Cette rencontre était devenue caduque en raison des divergences entre Alger et Paris sur le passé coloniale de la France en Algérie. Les tensions entre les deux rives caractérisent les relations bilatérales et les modifications ultérieures de l’accord de 1968 ont toujours été longues et compliqués.
Avec l’élection du nouveau président de la République française, François Hollande, qui, selon ses dires, veut « rénover les relations avec l’Algérie qu’il considère stratégiques dans la région du Maghreb » et s’est toujours déclaré « ami de l’Algérie où il a effectué un stage à l’ambassade de France à Alger en 1970 ». Il a d’ailleurs envoyé à maintes reprises des émissaires à Alger, signe qu’il désire stabiliser les relations économiques et culturelles entre la France et l’Algérie. Il aurait pu être un homologue ouvert et avantageux pour le président algérien, Abdelaziz Bouteflika pour rendre la situation administrative des ressortissants algériens établis en France plus avantageuse.
Un point d’histoire :
Lors de l’accession de l’Algérie à l’indépendance, les Accord d’Evian reconnaissaient aux Algériens la liberté de circulation entre l’Algérie et la France ainsi que le principe de l’égalité des droits sociaux et économiques avec les citoyens français. Cet accord établissait l’obligation pour les Algériens de présenter un passeport aux frontières, mais sans la contrainte du visa. Un titre de séjour particulier était créé portant le nom de « certificat de résidence ».
Les deux avenants des 22 décembre 1985 et 28 septembre 1994 conclus par la suite par les deux pays ont de manière générale eu pour objet de tenir compte des modifications du contexte migratoire, de rapprocher la situation des Algériens de celle des autres nationalités, sans toutefois que ce rapprochement soit total.
En application de l’avenant de 1985, à titre d’exemple, un Algérien pouvait sans difficultés venir s’installer en vue de faire des études ou exercer certaines activités professionnelles. Il disposait de la liberté d’établissement en qualité de commerçant ou artisan. Par contre, la situation de l’emploi lui devenait opposable dans le cadre d’un travail salarié.
La situation de parents d’enfants français ne donnait aucun droit au séjour, notamment aucune carte de « plein droit », contrairement à la situation des autres étrangers. Ce point n’a été modifié qu’avec l’avenant du 11 juillet 2001.
Dans l’optique d’un nouvel avenant, le gouvernement algérien aurait dû en priorité défendre trois points dans l’accord et maintenir les acquis des précédents avenants. Tous d’abord, la régularisation à travers la règle des dix ans de présence sur le territoire français doit demeurer. En effet, la Loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, dite « Loi Sarkozy II », a abrogé cette disposition qui prévoyait l’attribution automatique d’un titre de séjour d’une durée d’un an aux ressortissants étrangers sur le fondement des dix ans de présence en France. Il sera donc dans l’intérêt des ressortissants algériens qui demeurent depuis plus d’une décennie en France de pouvoir bénéficier d’une carte de séjour.
La sauvegarde de ce principe de la régularisation des ressortissants algériens ayants la qualité de conjoint de français, sans toutefois leurs exiger un visa long séjour, doit être maintenue. En effet, la règle générale est l’obligation de produire un visa long séjour pour la délivrance de plein droit d’une carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale ». Les ressortissants algériens ne sont pas concernés par cette impérative du visa long séjour.
Enfin, un troisième point important concerne la régularisation par le travail. Les dispositions de la circulaire relative à la délivrance de cartes de séjour temporaire portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire » au titre de l’admission exceptionnelle au séjour ne s’appliquent pas sur les ressortissants algériens. Ces derniers ne peuvent invoquer les dispositions de l’article L. 313-14 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et le droit d’asile. Cette disposition aurait été la bienvenue pour celles et ceux qui exercent un métier sous-tension en France.
L’inapplicabilité de cette situation aux ressortissants algériens, alors qu’ils représentent près du quart des entrées permanentes en France, pose un véritable problème. La circulaire du 28 novembre 2012 a clarifié l’accès des ressortissants étrangers au marché du travail français. Ce texte n’est pas applicable aux algériens. Dans le souci de créer cet équilibre, le gouvernement algérien aurait pu intégrer ces principes dans un nouvel avenant.
En juin 2010, le ministre algérien des affaires étrangères, Mourad Medelci, avaient déclaré à la presse que : « l’immigration algérienne en France, un capital d’avenir ». Cela aurait dû conduire et ce, dans l’intérêt réciproque des deux gouvernements algérien et français, que les deux Etats préparent, en gardant les dispositions avantageuses acquises dans le 3ème avenant, un nouvel accord qui intègre le nouveau volet sur l’« immigration économique » afin de faire bénéficier aux ressortissants algériens résidant en France d’un véritable statut avantageux et favorable. Cet acte politique raté aurait pu confirmer les intentions officielles de normalisation dans les relations franco-algériennes.
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Le 10 décembre 2012, le ministère français de l’intérieur a indiqué que la France renonce à amender l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles en France.
Depuis plus de deux ans, l’Algérie et la France se préparaient à mettre en place un quatrième avenant à l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 qui réglemente le séjour, l’emploi et la circulation des ressortissants algériens en France.
Les dernières rencontres entre les représentants politiques des deux pays ont laissé croire qu’un nouvel avenant franco-algérien allait être mis en œuvre. Le Président algérien, Abdelaziz Bouteflika, a, le 20 juin 2010, reçu le secrétaire général de l’Élysée, Claude Guéant, et le conseiller diplomatique, Jean-David Levitte, de Nicolas Sarkozy. Lors de cet entretien la question de l’avenant était abordée.
Le 22 juin 2010, Jacques Toubon, président de la Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration et ancien ministre de la Culture et de la Francophonie et de la justice, a annoncé, lors d’une conférence sur le thème : « Immigration et Intégration en France : histoire et perspectives », au centre culturel français d’Alger, que l’accord franco-algérien sera modifié en octobre 2010.
Ce projet devait être abordé durant la visite officielle, du président algérien, en France en juin 2009 ; Cette rencontre était devenue caduque en raison des divergences entre Alger et Paris sur le passé coloniale de la France en Algérie. Les tensions entre les deux rives caractérisent les relations bilatérales et les modifications ultérieures de l’accord de 1968 ont toujours été longues et compliqués.
Avec l’élection du nouveau président de la République française, François Hollande, qui, selon ses dires, veut « rénover les relations avec l’Algérie qu’il considère stratégiques dans la région du Maghreb » et s’est toujours déclaré « ami de l’Algérie où il a effectué un stage à l’ambassade de France à Alger en 1970 ». Il a d’ailleurs envoyé à maintes reprises des émissaires à Alger, signe qu’il désire stabiliser les relations économiques et culturelles entre la France et l’Algérie. Il aurait pu être un homologue ouvert et avantageux pour le président algérien, Abdelaziz Bouteflika pour rendre la situation administrative des ressortissants algériens établis en France plus avantageuse.
Un point d’histoire :
Lors de l’accession de l’Algérie à l’indépendance, les Accord d’Evian reconnaissaient aux Algériens la liberté de circulation entre l’Algérie et la France ainsi que le principe de l’égalité des droits sociaux et économiques avec les citoyens français. Cet accord établissait l’obligation pour les Algériens de présenter un passeport aux frontières, mais sans la contrainte du visa. Un titre de séjour particulier était créé portant le nom de « certificat de résidence ».
Les deux avenants des 22 décembre 1985 et 28 septembre 1994 conclus par la suite par les deux pays ont de manière générale eu pour objet de tenir compte des modifications du contexte migratoire, de rapprocher la situation des Algériens de celle des autres nationalités, sans toutefois que ce rapprochement soit total.
En application de l’avenant de 1985, à titre d’exemple, un Algérien pouvait sans difficultés venir s’installer en vue de faire des études ou exercer certaines activités professionnelles. Il disposait de la liberté d’établissement en qualité de commerçant ou artisan. Par contre, la situation de l’emploi lui devenait opposable dans le cadre d’un travail salarié.
La situation de parents d’enfants français ne donnait aucun droit au séjour, notamment aucune carte de « plein droit », contrairement à la situation des autres étrangers. Ce point n’a été modifié qu’avec l’avenant du 11 juillet 2001.
Dans l’optique d’un nouvel avenant, le gouvernement algérien aurait dû en priorité défendre trois points dans l’accord et maintenir les acquis des précédents avenants. Tous d’abord, la régularisation à travers la règle des dix ans de présence sur le territoire français doit demeurer. En effet, la Loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, dite « Loi Sarkozy II », a abrogé cette disposition qui prévoyait l’attribution automatique d’un titre de séjour d’une durée d’un an aux ressortissants étrangers sur le fondement des dix ans de présence en France. Il sera donc dans l’intérêt des ressortissants algériens qui demeurent depuis plus d’une décennie en France de pouvoir bénéficier d’une carte de séjour.
La sauvegarde de ce principe de la régularisation des ressortissants algériens ayants la qualité de conjoint de français, sans toutefois leurs exiger un visa long séjour, doit être maintenue. En effet, la règle générale est l’obligation de produire un visa long séjour pour la délivrance de plein droit d’une carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale ». Les ressortissants algériens ne sont pas concernés par cette impérative du visa long séjour.
Enfin, un troisième point important concerne la régularisation par le travail. Les dispositions de la circulaire relative à la délivrance de cartes de séjour temporaire portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire » au titre de l’admission exceptionnelle au séjour ne s’appliquent pas sur les ressortissants algériens. Ces derniers ne peuvent invoquer les dispositions de l’article L. 313-14 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et le droit d’asile. Cette disposition aurait été la bienvenue pour celles et ceux qui exercent un métier sous-tension en France.
L’inapplicabilité de cette situation aux ressortissants algériens, alors qu’ils représentent près du quart des entrées permanentes en France, pose un véritable problème. La circulaire du 28 novembre 2012 a clarifié l’accès des ressortissants étrangers au marché du travail français. Ce texte n’est pas applicable aux algériens. Dans le souci de créer cet équilibre, le gouvernement algérien aurait pu intégrer ces principes dans un nouvel avenant.
En juin 2010, le ministre algérien des affaires étrangères, Mourad Medelci, avaient déclaré à la presse que : « l’immigration algérienne en France, un capital d’avenir ». Cela aurait dû conduire et ce, dans l’intérêt réciproque des deux gouvernements algérien et français, que les deux Etats préparent, en gardant les dispositions avantageuses acquises dans le 3ème avenant, un nouvel accord qui intègre le nouveau volet sur l’« immigration économique » afin de faire bénéficier aux ressortissants algériens résidant en France d’un véritable statut avantageux et favorable. Cet acte politique raté aurait pu confirmer les intentions officielles de normalisation dans les relations franco-algériennes.
Par Fayçal Megherbi, avocat au Barreau de Paris
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