Le reporter de BBC Africa Eye, Mame Cheikh Mbaye, suit Mouhamed, agriculteur sénégalais et père de deux enfants, dans son périlleux voyage du Sénégal aux îles Canaries - un périple de plus de 1 000 kilomètres, soit dix fois plus que les autres itinéraires traversant la Méditerranée.
Mame Cheikh s'entretient avec les familles de ceux qui ont perdu la vie en tentant cette dangereuse traversée maritime - certaines des victimes n'avaient que 17 ans. Il réussit à entrer en contact également avec les passeurs qui organisent les départs des embarcations de migrants et rencontre les autorités espagnoles qui sont en première ligne pour démanteler les réseaux criminels impliqués dans ce commerce mortel.
Environ 70 000 migrants sont attendus cette année, selon les estimations du gouvernement espagnol. Dans ce contexte, le documentaire « Eaux troubles : La route migratoire la plus meurtrière d'Afrique » offre une perspective déchirante sur le monde des migrants ; ces personnes qui espèrent échapper à la pauvreté et aux conflits au Sénégal et dans les pays voisins.
Mouhamed, qui s'efforce de subvenir aux besoins de sa famille, raconte : « J'ai fait tous les boulots possibles et imaginables, mais les choses ne se sont pas améliorées. Si vous n'avez pas d'argent, vous ne comptez pas. Je suis le seul espoir de ma famille et je n'ai pas d'argent ».
En travaillant comme chauffeur de mototaxi et en empruntant de l'argent à des amis, Mouhamed a rassemblé 1 000 dollars (environ 600.000Francs CFA) pour payer un passeur afin d'obtenir une place sur un bateau à destination des îles Canaries.
Cinq jours après le début du voyage, le bateau a été contraint de retourner au Sénégal en raison d'une surchauffe du moteur et de vents violents. Décrivant ce voyage traumatisant, il raconte : « Les gens ont commencé à crier, à délirer. Certains pêcheurs ont dit que nous devions les retenir, sinon c'était la catastrophe. Ils tombaient par-dessus bord ou précipitaient quelqu'un d'autre à dans l’eau ».
Mouhamed a connu de graves problèmes de santé pendant le voyage. Il a dû boire de l'eau salée, est resté debout pendant la majeure partie du voyage en raison du manque de place et a dormi dans de l'eau mélangée à du carburant.
Malgré cette expérience traumatisante, Mouhamed est déterminé à refaire le voyage.
Selon les données de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), la route de l'Atlantique empruntée par les ouest-africains est sur le point de devenir le voyage le plus meurtrier au monde pour les migrants.
L'année dernière, quatre jeunes femmes sont mortes en mer en tentant le voyage depuis une petite communauté de pêcheurs du nord du Sénégal appelée Goop. L'une des victimes, Mame Astou, n'avait que 17 ans.
Son amie Sata, qui se trouvait également sur le bateau, a déclaré que la perte de son amie ne l'avait pas dissuadée d'essayer à nouveau : « Si tu perds la vie, au moins tu ne connaîtras pas certaines choses, comme la souffrance de ta mère, de ton père et de ta famille ».
L'enquête permet également de mieux comprendre le monde mortel du trafic d'êtres humains et les efforts déployés par les autorités espagnoles pour démanteler les réseaux criminels de passeurs.
À Toubab Dialaw, au sud de Dakar, la BBC a exploré comment l'épuisement des stocks de poissons, dû à la surpêche des navires étrangers, pousse de plus en plus de pêcheurs locaux à tenter la dangereuse traversée vers l'Europe, car ils affirment qu'ils ne peuvent plus vivre des produits de la mer.
Cheikhou Mbengue, membre de la même communauté, affirme que les réseaux de passeurs exploitent la situation et paient des pêcheurs sans expérience pour conduire les bateaux à destination de l'Espagne.
Un passeur a déclaré à la BBC, sous couvert d'anonymat : « Si vous prenez un gros bateau, qui peut transporter deux à trois cents personnes, et que chacune d'entre elles paie environ 500 dollars, nous parlons de beaucoup d'argent ».
Interrogé sur sa responsabilité pénale dans ce commerce mortel, le passeur a admis : « C'est un crime. Celui qui se fait prendre devrait être emprisonné, mais il n'y a pas de solution. Vous verrez des gens qui sont morts dans l'eau, mais les bateaux continuent d'avancer ».
Depuis 2006, l'Espagne a déployé une force permanente au Sénégal pour perturber ces opérations de contrebande aux côtés des forces locales. Le lieutenant Antonio Fuentes de la Guardia Civil, qui dirige une équipe d'officiers de renseignement, a déclaré : « Les mafias qui organisent ces voyages ont compris qu'il s'agissait d'un trafic semblable à celui de la drogue, avec peu de chances d'être détecté. Pour elles, un migrant n'est qu'une marchandise. Elles transportent les gens comme s'il s'agissait de drogues ou d'armes. Ce sont simplement des victimes ».
Après avoir travaillé pendant des années avec des migrants et des réfugiés aux îles Canaries, Mame Cheikh Mbaye est rentré au Sénégal, où il dirige aujourd'hui un centre de formation destiné à aider les jeunes à trouver des débouchés sur place et à éviter de risquer leur vie en mer.
« Pendant 10 ans, j'ai travaillé aux îles Canaries avec des migrants et des réfugiés arrivant d'Afrique de l'Ouest. Dans le cadre de mon travail, j'ai également sensibilisé les jeunes aux dangers du voyage. J'ai été témoin du traumatisme de ceux qui survivent. En réalisant ce film, je veux mettre un visage sur cette souffrance, afin que les histoires de ceux qui se noient en mer puissent être ramenées à la surface ».
Mame Cheikh s'entretient avec les familles de ceux qui ont perdu la vie en tentant cette dangereuse traversée maritime - certaines des victimes n'avaient que 17 ans. Il réussit à entrer en contact également avec les passeurs qui organisent les départs des embarcations de migrants et rencontre les autorités espagnoles qui sont en première ligne pour démanteler les réseaux criminels impliqués dans ce commerce mortel.
Environ 70 000 migrants sont attendus cette année, selon les estimations du gouvernement espagnol. Dans ce contexte, le documentaire « Eaux troubles : La route migratoire la plus meurtrière d'Afrique » offre une perspective déchirante sur le monde des migrants ; ces personnes qui espèrent échapper à la pauvreté et aux conflits au Sénégal et dans les pays voisins.
Mouhamed, qui s'efforce de subvenir aux besoins de sa famille, raconte : « J'ai fait tous les boulots possibles et imaginables, mais les choses ne se sont pas améliorées. Si vous n'avez pas d'argent, vous ne comptez pas. Je suis le seul espoir de ma famille et je n'ai pas d'argent ».
En travaillant comme chauffeur de mototaxi et en empruntant de l'argent à des amis, Mouhamed a rassemblé 1 000 dollars (environ 600.000Francs CFA) pour payer un passeur afin d'obtenir une place sur un bateau à destination des îles Canaries.
Cinq jours après le début du voyage, le bateau a été contraint de retourner au Sénégal en raison d'une surchauffe du moteur et de vents violents. Décrivant ce voyage traumatisant, il raconte : « Les gens ont commencé à crier, à délirer. Certains pêcheurs ont dit que nous devions les retenir, sinon c'était la catastrophe. Ils tombaient par-dessus bord ou précipitaient quelqu'un d'autre à dans l’eau ».
Mouhamed a connu de graves problèmes de santé pendant le voyage. Il a dû boire de l'eau salée, est resté debout pendant la majeure partie du voyage en raison du manque de place et a dormi dans de l'eau mélangée à du carburant.
Malgré cette expérience traumatisante, Mouhamed est déterminé à refaire le voyage.
Selon les données de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), la route de l'Atlantique empruntée par les ouest-africains est sur le point de devenir le voyage le plus meurtrier au monde pour les migrants.
L'année dernière, quatre jeunes femmes sont mortes en mer en tentant le voyage depuis une petite communauté de pêcheurs du nord du Sénégal appelée Goop. L'une des victimes, Mame Astou, n'avait que 17 ans.
Son amie Sata, qui se trouvait également sur le bateau, a déclaré que la perte de son amie ne l'avait pas dissuadée d'essayer à nouveau : « Si tu perds la vie, au moins tu ne connaîtras pas certaines choses, comme la souffrance de ta mère, de ton père et de ta famille ».
L'enquête permet également de mieux comprendre le monde mortel du trafic d'êtres humains et les efforts déployés par les autorités espagnoles pour démanteler les réseaux criminels de passeurs.
À Toubab Dialaw, au sud de Dakar, la BBC a exploré comment l'épuisement des stocks de poissons, dû à la surpêche des navires étrangers, pousse de plus en plus de pêcheurs locaux à tenter la dangereuse traversée vers l'Europe, car ils affirment qu'ils ne peuvent plus vivre des produits de la mer.
Cheikhou Mbengue, membre de la même communauté, affirme que les réseaux de passeurs exploitent la situation et paient des pêcheurs sans expérience pour conduire les bateaux à destination de l'Espagne.
Un passeur a déclaré à la BBC, sous couvert d'anonymat : « Si vous prenez un gros bateau, qui peut transporter deux à trois cents personnes, et que chacune d'entre elles paie environ 500 dollars, nous parlons de beaucoup d'argent ».
Interrogé sur sa responsabilité pénale dans ce commerce mortel, le passeur a admis : « C'est un crime. Celui qui se fait prendre devrait être emprisonné, mais il n'y a pas de solution. Vous verrez des gens qui sont morts dans l'eau, mais les bateaux continuent d'avancer ».
Depuis 2006, l'Espagne a déployé une force permanente au Sénégal pour perturber ces opérations de contrebande aux côtés des forces locales. Le lieutenant Antonio Fuentes de la Guardia Civil, qui dirige une équipe d'officiers de renseignement, a déclaré : « Les mafias qui organisent ces voyages ont compris qu'il s'agissait d'un trafic semblable à celui de la drogue, avec peu de chances d'être détecté. Pour elles, un migrant n'est qu'une marchandise. Elles transportent les gens comme s'il s'agissait de drogues ou d'armes. Ce sont simplement des victimes ».
Après avoir travaillé pendant des années avec des migrants et des réfugiés aux îles Canaries, Mame Cheikh Mbaye est rentré au Sénégal, où il dirige aujourd'hui un centre de formation destiné à aider les jeunes à trouver des débouchés sur place et à éviter de risquer leur vie en mer.
« Pendant 10 ans, j'ai travaillé aux îles Canaries avec des migrants et des réfugiés arrivant d'Afrique de l'Ouest. Dans le cadre de mon travail, j'ai également sensibilisé les jeunes aux dangers du voyage. J'ai été témoin du traumatisme de ceux qui survivent. En réalisant ce film, je veux mettre un visage sur cette souffrance, afin que les histoires de ceux qui se noient en mer puissent être ramenées à la surface ».