Dans son ouvrage "Histoire des animaux", Aristote explique que la guerre dépend essentiellement de deux facteurs : la nourriture et le mode de vie. Les animaux se font la guerre quand ils occupent les mêmes espaces. Cependant, quand il y a abondance de nourriture, ils vivent les uns avec les autres. A l’évidence, il n’existe pas de fond cohérent à cette guerre lancée par Boko Haram contre les Etats et les populations des pays concernés. Si seulement la guerre a été une fois déclarée par la nébuleuse ! L’on voit se déployer les forces du mal qu’une religion, quelle qu’elle soit, ne saurait durablement supporter. La hargne d’une telle destruction, qui fait couler le sang, la présence avérée de combattants non-musulmans dans les rangs du groupe terroriste, etc. invalident ce confinement religieux du conflit. Certes tout fondamentalisme peut se décliner en barbarie. Mais tout porte à croire que Boko Haram cache une machination terriblement scandaleuse : la guerre est-elle vraiment celle des Africains eux-mêmes ? Et si des prédateurs tapis dans l’ombre oeuvraient avec agilité pour se moquer une fois de plus de ces Africains que l’histoire contemporaine s’obstine à mettre à sa remorque ?
Personne ne comprend comment un groupe, quoique dopé par la possession d’armes diverses et confiné, il y a à peine une décennie dans les réseaux locaux, puisse faire trembler quatre pays aux stabilités politico-administratives différentes certes, mais appréciables ? Comment sort-on de modestes écoles coraniques de Maïduguri et d’autres villes nigérianes que l’on comptait seulement des doigts d’une seule main pour secouer des états structurés ?
L’opinion dans les pays rudement touchés par le terrorisme de Boko Haram a manifestement évolué. Les élucubrations grotesques inhérentes à ce contexte tentent de se tasser pour laisser émerger des discours qui s’efforcent d’être proches de la vérité. Des scènes se sont répétées au point d’alerter les plus sceptiques sur une vigilance plus accrue marquée du sceau de la responsabilité. Des arrestations ostentatoires d’individus dont la ressemblance avec les jeunes de l’ethnie Kanuri, massivement instrumentalisés, ne relèvent que de l’impossible. Deux individus européens munis d’arsenal de guerre ont été appréhendés en plein coeur de Yaoundé le 25 juillet 2015, sous le regard troublé de nombreux badauds. La scène est passée quasi inaperçue parce que d’une évidence massacrante. La curiosité a cédé à la peur. La suite est restée lettre morte. L’usage du conditionnel a permis de refouler cette peur d’une menace imminente. Les média occidentaux ne s’en sont pas régalés.
Bien sûr que l’opinion des populations est plurielle ; ceci au gré des informations reçues, suivies et interprétés selon l’intelligence de chacun. Cependant, seuls quelques individus isolés, distants et moins exposés aux bruits et cris inhérents aux explosions de bombes peuvent encore se berner à considérer que les armées du Nigéria, du Cameroun, du Niger et du Tchad combattent des élèves d’écoles coraniques djihadistes. Certes, c’est le visage qui perce l’écran des fours médiatiques, mais il faut beaucoup de foi pour écarter la thèse d’une internationalisation dépassant les seuls horizons bleutés du Lac Tchad. Les média occidentaux dominants sont démunis en ce qui concerne les conflits lointains si ce n’est qu’ils sont réduits aux lignes éditoriales prescrites. Les média d’Etat dans les pays touchés par l’irruption de la gangrène terroriste sont hautement politisés et soumis à de sérieux devoirs de réserve. La presse ainsi que les télévisions privées recherchent la vérité de ce sombre conflit et osent des hypothèses tenaces. Hélas, peut-être que la massivité des déclarations, le verbe militant et le ton souvent exalté affaiblissent la force de persuasion du discours.
Au Cameroun, la question ne consiste plus à savoir s’il existe un Boko Haram national ou étranger. Le niveau le plus basique de l’intelligence voudrait que l’on conclue à l’existence de toutes sortes de relais possibles. Le conflit est déterritorialisé et ses segments peuvent se retrouver à tout bout de champ. Les services secrets d’Etat le savent mieux que quiconque.
Le flou s’est réellement installé. Qui est Boko Haram ? Nous n’avons pas la prétention d’y répondre de manière définitive tant il manque encore des pièces au puzzle. La guerre par contre est une réalité : des affrontements continuent, des attentats-suicide prolifèrent. Les armées nationales sont à l’œuvre et accomplissent courageusement leurs délicates missions. La déclaration de Paul Biya sur le perron de l’Elysée, à défaut d’avoir été une divine maladresse, n’était pas moins une exaltation du mythe de Gribouille qui, pour se protéger contre la pluie, se jette dans l’eau. C’est sous l’emprise du réalisme que le Cameroun s’était définitivement extériorisé dans un conflit asymétrique qu’on lui a imposé. Le but est de repousser, sinon d’anéantir, la fougue tristement déstabilisatrice à multiples facettes.
L’arrivée fort médiatisée de l’armée américaine au Nord du Cameroun montre aisément que cette guerre n’est pas la nôtre. Autrement dit, la moindre des vérités c’est qu’elle n’est pas exclusivement nôtre. Peur et méfiance se sont emparées une fois de plus des Camerounais dont les représentants – assemblée nationale et sénat - n’ont pas été consultés pour l’accueil ou non sur leur sol de trois cents militaires étrangers. On objectera que l’armée tchadienne aussi s’est installée au Cameroun. Cependant, toutes proportions gardées, la symbolique de cette présence états-unienne au Cameroun est incommensurable. Des justifications fusent mais l’autorité de l’Etat paraît impuissante.
L’obscurité grandit et peut-être qu’un jour cette centralisation du pouvoir montrera enfin ses limites et que chaque parcelle du territoire pourra faire entendre sa voix à Yaoundé. Le peuple aura grandi et exigera de tout savoir. Car, à force d’entretenir le flou, l’on accélère le délabrement institutionnel conduisant la base à douter des pouvoirs établis. Et si c’était le but caché de ceux qui sont venus via un islamo-fascisme de façade, recoloniser notre patrie ? N’y a-t-il pas abondance de nourriture pour que ces bêtes sauvages d’une ère nouvelle – postcoloniale - puissent se la partager en évitant de massacrer les peuples ? Les peuples d’Afrique doivent s’imposer en se donnant toutes sortes de moyens pour tracer les sillons de leur propre histoire en revendiquant le pourquoi de leur présence au monde. Boko Haram n’est pas la natte que nous tissons, elle est celle que les autres viennent tisser dans notre cour en notre nom.
Personne ne comprend comment un groupe, quoique dopé par la possession d’armes diverses et confiné, il y a à peine une décennie dans les réseaux locaux, puisse faire trembler quatre pays aux stabilités politico-administratives différentes certes, mais appréciables ? Comment sort-on de modestes écoles coraniques de Maïduguri et d’autres villes nigérianes que l’on comptait seulement des doigts d’une seule main pour secouer des états structurés ?
L’opinion dans les pays rudement touchés par le terrorisme de Boko Haram a manifestement évolué. Les élucubrations grotesques inhérentes à ce contexte tentent de se tasser pour laisser émerger des discours qui s’efforcent d’être proches de la vérité. Des scènes se sont répétées au point d’alerter les plus sceptiques sur une vigilance plus accrue marquée du sceau de la responsabilité. Des arrestations ostentatoires d’individus dont la ressemblance avec les jeunes de l’ethnie Kanuri, massivement instrumentalisés, ne relèvent que de l’impossible. Deux individus européens munis d’arsenal de guerre ont été appréhendés en plein coeur de Yaoundé le 25 juillet 2015, sous le regard troublé de nombreux badauds. La scène est passée quasi inaperçue parce que d’une évidence massacrante. La curiosité a cédé à la peur. La suite est restée lettre morte. L’usage du conditionnel a permis de refouler cette peur d’une menace imminente. Les média occidentaux ne s’en sont pas régalés.
Bien sûr que l’opinion des populations est plurielle ; ceci au gré des informations reçues, suivies et interprétés selon l’intelligence de chacun. Cependant, seuls quelques individus isolés, distants et moins exposés aux bruits et cris inhérents aux explosions de bombes peuvent encore se berner à considérer que les armées du Nigéria, du Cameroun, du Niger et du Tchad combattent des élèves d’écoles coraniques djihadistes. Certes, c’est le visage qui perce l’écran des fours médiatiques, mais il faut beaucoup de foi pour écarter la thèse d’une internationalisation dépassant les seuls horizons bleutés du Lac Tchad. Les média occidentaux dominants sont démunis en ce qui concerne les conflits lointains si ce n’est qu’ils sont réduits aux lignes éditoriales prescrites. Les média d’Etat dans les pays touchés par l’irruption de la gangrène terroriste sont hautement politisés et soumis à de sérieux devoirs de réserve. La presse ainsi que les télévisions privées recherchent la vérité de ce sombre conflit et osent des hypothèses tenaces. Hélas, peut-être que la massivité des déclarations, le verbe militant et le ton souvent exalté affaiblissent la force de persuasion du discours.
Au Cameroun, la question ne consiste plus à savoir s’il existe un Boko Haram national ou étranger. Le niveau le plus basique de l’intelligence voudrait que l’on conclue à l’existence de toutes sortes de relais possibles. Le conflit est déterritorialisé et ses segments peuvent se retrouver à tout bout de champ. Les services secrets d’Etat le savent mieux que quiconque.
Le flou s’est réellement installé. Qui est Boko Haram ? Nous n’avons pas la prétention d’y répondre de manière définitive tant il manque encore des pièces au puzzle. La guerre par contre est une réalité : des affrontements continuent, des attentats-suicide prolifèrent. Les armées nationales sont à l’œuvre et accomplissent courageusement leurs délicates missions. La déclaration de Paul Biya sur le perron de l’Elysée, à défaut d’avoir été une divine maladresse, n’était pas moins une exaltation du mythe de Gribouille qui, pour se protéger contre la pluie, se jette dans l’eau. C’est sous l’emprise du réalisme que le Cameroun s’était définitivement extériorisé dans un conflit asymétrique qu’on lui a imposé. Le but est de repousser, sinon d’anéantir, la fougue tristement déstabilisatrice à multiples facettes.
L’arrivée fort médiatisée de l’armée américaine au Nord du Cameroun montre aisément que cette guerre n’est pas la nôtre. Autrement dit, la moindre des vérités c’est qu’elle n’est pas exclusivement nôtre. Peur et méfiance se sont emparées une fois de plus des Camerounais dont les représentants – assemblée nationale et sénat - n’ont pas été consultés pour l’accueil ou non sur leur sol de trois cents militaires étrangers. On objectera que l’armée tchadienne aussi s’est installée au Cameroun. Cependant, toutes proportions gardées, la symbolique de cette présence états-unienne au Cameroun est incommensurable. Des justifications fusent mais l’autorité de l’Etat paraît impuissante.
L’obscurité grandit et peut-être qu’un jour cette centralisation du pouvoir montrera enfin ses limites et que chaque parcelle du territoire pourra faire entendre sa voix à Yaoundé. Le peuple aura grandi et exigera de tout savoir. Car, à force d’entretenir le flou, l’on accélère le délabrement institutionnel conduisant la base à douter des pouvoirs établis. Et si c’était le but caché de ceux qui sont venus via un islamo-fascisme de façade, recoloniser notre patrie ? N’y a-t-il pas abondance de nourriture pour que ces bêtes sauvages d’une ère nouvelle – postcoloniale - puissent se la partager en évitant de massacrer les peuples ? Les peuples d’Afrique doivent s’imposer en se donnant toutes sortes de moyens pour tracer les sillons de leur propre histoire en revendiquant le pourquoi de leur présence au monde. Boko Haram n’est pas la natte que nous tissons, elle est celle que les autres viennent tisser dans notre cour en notre nom.