Par Jean-Gualbert Togba
A l’image d’un bateau dont les gouvernails sont mal maitrisés, les commandes mal assurées, les prises des décisions incertaines ; une dérivation dans ses fonctionnements. C’est dans ces conditions que la Centrafrique est assujettie à la médiocrité et multiplie les errements. Un syndrome assez singulier enrichi par les politiciens à bout de souffle.
La République centrafricaine se mêle les pattes dans un synchronisme des indicateurs sociaux et de développement clignotant du feu rouge et contrastant avec le voyant vert des indices de pauvreté. Il n’en demeure pas moins que dans son état de délabrement économique et social, ce pays suscite un réel intérêt pour la France depuis la nuit des temps, s’octroie un statut privilégié, un apanage presque naturel qui transforme la Centrafrique en une commune française sans statut particulier où tous les moyens sont mis en œuvre pour perdurer son état de pauvreté.
Perdue en plein cœur de l’Afrique, forte de près de 5.000.000 d’habitants pour une superficie plus grande que la France avec un sous sol riche, la Centrafrique reste la référence d’un pays sans Etat qui n’existe que de nom où l’exercice du pouvoir se fait dans une succession d’incompétence notoire aussi désopilant que folklorique, un dévergondage d’esprit d’une pauvreté extrême qui donne une coloration de pauvreté au pays à l’image de ceux qui sont censés le gouverner. Cette pauvreté est la relation, le virus transmis par les gouvernants successifs du pays.
L’addition s’alourdie quand on prend on compte les frasques d’une politique française en Centrafrique dans une visée uniquement impérialiste de protection de ses intérêts, sans se soucier de l’état du pays propriétaire de la richesse. Ce qui soulève la problématique de la propriété ou de la détention, de la jouissance, du droit à disposer et surtout de la souveraineté et du droit à décider.
La Centrafricaine est-elle propriétaire de ses sous sols ? L’existence des traités qui stipulent que le sous sol centrafricain appartiendrait à la France ne fait aucun doute. La française en Centrafrique uniquement dans le but de protéger ses intérêts en laissant un pays dans l’agonie. Refusant de stopper la prise du pouvoir par une organisation criminelle sous prétexte de ne pas vouloir protéger un régime défaillant en dit long.
A qui revient le droit de l’usufruitier ou quasi-usufruitier et celui du nu-propriétaire sur les sous sols centrafricains ?
Juste un aperçu, l’usufruit est le droit réel reconnu à une personne en l’occurrence l’usufruitier, qui jouit de la chose démembrée sans en être le propriétaire. La propriété étant détenue par une tierce personne qui conserve la chose. C’est le cas d’un logement habité ou recevoir les loyers par l’usufruitier mais ne peut le vendre car le droit de propriété et la charge sont reconnus à une autre personne appelée le nu-propriétaire. L’usufruit est un droit partiel de la priorité dont l’autre moitie est au nu-propriétaire. L’ensemble des deux forment un droit en pleine propriété. (Les notions sont un peu plus élargies en droit).
Le nu-prioritaire en revanche est celui qui, bien que détenteur du droit de priorité ne jouie pas de l’usufruit du bien.
Dans ces contextes, la Centrafrique possède des minerais dont elle est la nu-propriétaire et la France est l’usufruitière. Un cercle vicieux de pauvreté qui engloutie le pays et donne une explication partielle au chaos économique qui mine son développement. Economiquement parlant et d’une manière pragmatique, c’est l’usufruitier qui tire son épingle du jeu et le nu-propriétaire vit dans la pauvreté bien que détenteur des biens patrimoniaux.
Y’aurait-il un homme politique centrafricain capable de mettre sur la table cette question du patrimoine national centrafricain ?
La mauvaise pioche de la France dans le choix, l’orientation et l’installation d’une transition actuelle taillée dans une ligne de continuité et d’immobilisme sans se soucier de la préoccupation de la population, sans prêter un regard intéressé à la nouvelle génération des hommes et des femmes qui ont une autre vision de la conduite des Affaires de l’Etat, laisse perplexe.
Une transition réussie prépare inéluctablement la Centrafrique au grand défit de son histoire, un rendez-vous à ne pas manquer. A contrario, une transition chaotique plongera le pays à jamais dans les abîmes. La Centrafrique est le centre d’un chaos sans précédent. Le Centre A Fric, enjeu d’une géopolitique désastreuse de la France s’avère atteindre la cime des horreurs où la dimension humaine est sacrifiée au profit d’une stratégie politique de la reconquête, notant au passage la perte de l’usage de la parole subite des « apparatchiks centrafricains » et quand bien même le peu de fois que ça parle, c’est pour amuser la galerie.
Dans l’état actuel des choses, le choix s’impose entre :
* Une transition décriée et rejetée par la population et qui entrave la paix.
* Une nouvelle transition le troisième du genre, constituée des hommes et femmes de terrain quasiment des militaires
* Aller très vite aux élections en prenant en compte les carences dans les dispositifs et inventer un suffrage avec des grands électeurs représentant toutes les couches de la population.
Arriver au rond point de son histoire, la République centrafricaine doit faire un choix du chemin à emprunter pour sortir du labyrinthe. Une croisée des chemins qui lui donne du vent dans les voiles.
Jean-Gualbert Togba