Le symbole de cette intégration pourrait être naturellement la consécration du marché commun, à travers la libre circulation des personnes et des biens. Or, ce minimum n’a jamais eu lieu. En dehors du Gabon et la Guinée Equatoriale, les personnes peuvent circuler sans trop de difficultés au sein de quatre autres Etats (Cameroun, Congo, RCA et Tchad). Plusieurs observateurs se posent même la question sur la volonté réelle des politiques à mettre en place ce marché commun? Seule la BEAC (Banque des Etats de l’Afrique Centrale) a été à la hauteur des espérances politiques de la Communauté. N’eut été les dernières affaires de détournement, elle fut l’exemple parfait de la plus grande réussite enregistrée à ce jour.
Pourtant la Communauté est une réelle chance pour les pays de la sous région. Elle offrira la possibilité de :
Créer des opportunités pour nos opérateurs économiques, pour une préalable compétitivité sur le marché mondial ;
Mener des actions communes (des normes et des grands projets) afin de créer un environnement plus favorable pour la promotion des investissements dans la sous région ;
Mieux négocier ensemble tout partenariat avec d’autres ensembles et/ou Etat ;
Promouvoir à terme, un espace de liberté et de paix ;
Etc.
En tenant compte des faiblesses de la Communauté, constatées lors d’un Audit externe, mené en 2006, les Chefs d’Etat ont adopté le Programme des Reformes Institutionnelles (PRI) sous la conduite du Président de la République de la Guinée Equatoriale, Son Excellence OBIANGUEMA BAZOGO (Président Dédié du PRI). Ces reformes visent quelques objectifs :
Efficacité institutionnelle ;
Réalisation et approfondissement de l’intégration ;
Sécurisation de financement de la Communauté et ;
Forte implication des Etats dans la construction.
Le PRI a pu mener plusieurs actions d’envergure, notamment par la production des nouvelles législations : le Traité Révisé de la CEMAC, les Conventions régissant l’UEAC, l’UMAC, la Cour de Justice, la Cour des Comptes, le Parlement, les Statuts de la BEAC, les Actes Additionnels portant disponibilité intégrale de la TCI, portant adoption du principe de la mise en place généralisée des Ministères chargés de l’intégration régionale au sein des gouvernements des Etats membre, etc.
Le PRI se poursuit dans une nouvelle phase, par la mise en place entre autre, du Programme Economique Régional (PER) qui consacre l’émergence de la sous région à l’horizon 2025. Le PER reste la conclusion de taille de ce vaste chantier des réformes, pourvu qu’il réponde aux attentes de nos citoyens : l’amélioration des conditions de vie.
Toutefois, plusieurs remarques peuvent être formulées sur la Communauté :
Le système institutionnel n’est toujours pas efficace. La stricte séparation de deux unions (UEAC et UMAC) ne favorise pas une lisibilité de la Communauté pour les assujettis. L’application du principe de la subsidiarité doit être désormais au centre des préoccupations des Décideurs, afin de garantir l’opérabilité de tout modèle d’intégration ;
L’évolution fulgurante du budget de fonctionnement de la Communauté inquiète sur son avenir. La culture du résultat doit prédominer et orienter les ressources vers des secteurs porteurs : infrastructures et qualification humaine.
Le non respect des critères de convergence économique qui sont pourtant obligatoires pour mieux conduire la politique monétaire de la sous région ;
L’insuffisance de la solidarité communautaire pour créer un développement spatial équilibré et viable au service de l’ensemble de la population ;
L’application systématique du principe de la répartition équilibrée des postes de responsabilité au sein des institutions, organes et institutions spécialisées, a biaisé l’organisation et le fonctionnement optimal de ceux-ci ;
L’implication marginale des peuples de la sous région aussi bien dans la conception que la conduite du devenir de la Communauté. Le 5ème axe de la réforme vise l’appropriation de ladite par les Etats, sans se soucier de la réelle volonté et choix de la population. D’où l’exigence de la démocratisation de la construction de la CEMAC en passant par l’implication de la société civile dans la vulgarisation du bien fondé de la Communauté.
Pour conclure, il faut relever que le Tchad a intérêt à partager un tel projet avec les autres pays de la Communauté. Cet intérêt n’a de sens que lorsque chaque acteur (étatique ou non) soit capable de jouer pleinement son rôle en visant des objectifs ambitieux qui permettront de réaliser des projets d’intérêt communs.
La CEMAC a connu beaucoup de retard, par rapport aux autres ensembles régionaux en Afrique. Les Chefs d’Etat ont bien compris la situation et les enjeux historiques de la réussite de la construction et de l’approfondissement de notre communauté. Mieux vaut tard que jamais.