Accueil
Envoyer à un ami
Imprimer
Grand
Petit
Partager
AFRIQUE

La politique d’importation de denrées alimentaires du Nigéria pourrait détruire l’agriculture du pays, prévient Akinwumi Adesina


Alwihda Info | Par Afdb - 15 Juillet 2024


Le Nigéria devrait produire davantage de denrées alimentaires pour stabiliser les prix, tout en créant des emplois et en réduisant les dépenses en devises.


Le président du Groupe de la Banque africaine de développement, M. Akinwumi Adesina, a déclaré vendredi à Abuja, que la décision du gouvernement nigérian d’autoriser l’importation massive de denrées alimentaires risque de détruire l’agriculture du pays.
 
Cette déclaration intervient après l’annonce du ministre nigérian de l’Agriculture, Abubakar Kyari. le 10 juillet, selon laquelle le gouvernement fédéral suspendrait les droits, tarifs et taxes sur l’importation de maïs, de riz brun décortiqué, de blé et de niébé aux frontières terrestres et maritimes du pays, pour une durée de 150 jours.
 
« La politique récemment annoncée par le Nigéria d’ouvrir ses frontières à des importations massives de denrées alimentaires, juste pour lutter à court terme contre les hausses des prix des denrées alimentaires, est déprimante », a souligné M. Adesina qui s’exprimait lors d’une réunion des primats africains de l’Église anglicane à Abuja, au Nigéria.
 
Il a averti que cette politique pourrait compromettre tous les efforts et les investissements privés réalisés dans le secteur agricole du Nigéria.
 
« Le Nigéria ne peut pas compter sur l’importation de denrées alimentaires pour stabiliser les prix. Le Nigéria devrait produire davantage de denrées alimentaires pour stabiliser les prix, tout en créant des emplois et en réduisant les dépenses en devises, ce qui contribuera à stabiliser davantage le Naira » [la monnaie locale], a poursuivi le président de la Banque africaine de développement.
 
« Le Nigéria ne peut pas importer pour sortir de l’insécurité alimentaire. Le Nigéria ne doit pas devenir une nation dépendante des importations alimentaires », a-t-il insisté.
 
M. Adesina qui s’exprimait à cette réunion sur le thème « Sécurité alimentaire et viabilité financière en Afrique : le rôle de l’Église », a déclaré que le Nigéria « doit se nourrir lui-même avec fierté » avant d’avertir : « Une nation qui dépend des autres pour se nourrir n’est indépendante que de nom. »
 
Foi et sécurité alimentaire
 
Les ecclésiastiques se sont réunis à Abuja sous l’égide du Conseil des provinces anglicanes d’Afrique (CAPA), qui représente plus de 40 millions d’anglicans à travers le continent.
 
Dans son discours d’ouverture, l’hôte de la réunion, sa grâce, le Très Révérend Henry C. Ndukuba, Primat de l’Église du Nigéria (Communion anglicane), a déclaré que ce rassemblement était une occasion unique pour les dirigeants anglicans africains d’approfondir les liens d’amitié et de collaborations et de partager la sagesse et les expériences collectives.
 
Le président de la réunion, Olugbemiro Jegede, professeur émérite d’enseignement scientifique nigérian, a déclaré à l’endroit de M. Adesina : « Toute l’Afrique est représentée ici. Chaque primat représente une région. Derrière ces primats se trouvent des millions et des millions d’anglicans qui écoutent ce que nous disons ici ».
 
Notant que l’Afrique représente près d’un tiers des plus de 780 millions de personnes qui souffrent de la faim dans le monde, le président de la Banque africaine de développement a déclaré que l’agriculture est essentielle à la diversification des économies et à la transformation des zones rurales, où vit plus de 70 % de la population africaine. « Il est donc clair qu’à moins de transformer l’agriculture, l’Afrique ne pourra pas éradiquer la pauvreté », a-t-il insisté.
 
M. Adesina a déclaré que l’Afrique disposait de 65 % des terres arables non cultivées dans le monde pouvant permettre de nourrir 9,5 milliards de personnes d’ici 2050. Par conséquent, ce que l’Afrique fera en matière d’agriculture déterminera l’avenir de l’alimentation dans le monde. « Fondamentalement, la nourriture est de l’argent. La taille du marché de l’alimentation et de l’agriculture en Afrique atteindra 1000 milliards de dollars d’ici 2030. »
 
Des avancées transformationnelles
 
M. Adesina a informé les primats du programme de 25 milliards de dollars de la Banque visant à transformer l’agriculture en fournissant des technologies agricoles hautement performantes à 40 millions d’agriculteurs et en rendant l’Afrique autosuffisante sur le plan alimentaire d’ici 2030.
 
Il a fait part des succès remportés par la Banque en matière d’aide aux pays africains pour lutter contre les effets négatifs des changements climatiques, grâce à des investissements financiers et à son programme phare, des Technologies pour la transformation de l’agriculture africaine (TAAT).
 
Le programme TAAT a aidé l’Éthiopie à devenir un exportateur net de blé en l’espace de cinq ans, a déclaré M. Adesina. Il a également permis d’augmenter de manière significative la production de blé au Soudan et a aidé les pays d’Afrique orientale et australe à continuer à produire des denrées alimentaires malgré une sécheresse prolongée.
 
Concernant le Nigéria, M. Adesina a déclaré : « Avec la Banque islamique de développement et le Fonds international de développement agricole, nous avons fourni 520 millions de dollars pour soutenir la création de zones spéciales de transformation agro-industrielles qui permettront aux entreprises agro-industrielles privées d’établir des industries qui transforment et ajoutent de la valeur aux produits agricoles. »
 
La Banque a fourni, en outre, 134 millions de dollars au Nigéria pour la production alimentaire d’urgence afin d’aider à réduire l’inflation des prix des denrées alimentaires, en augmentant considérablement la production locale de blé et de manioc, dans le cadre du Programme national de croissance agricole.
 
M. Adesina a exhorté le gouvernement nigérian à tirer parti des investissements et du soutien de la Banque aux agriculteurs africains ; à faire preuve d’une plus grande détermination et d’un plus grand engagement pour réaliser l’autosuffisance alimentaire, et mettre en place des mesures incitatives à l’intention des entreprises agro-industrielles du secteur privé.
 
Pour soutenir les ambitions de l’Afrique de progresser dans les chaînes de valeur agricoles mondiales, le Groupe de la Banque africaine de développement et ses partenaires, soutiennent le développement de 28 Zones spéciales de transformation agro-industrielle (SAPZ) dans 11 pays, avec 4,5 milliards de dollars mobilisés jusqu’à présent.
 
S’exprimant au nom du président du Conseil des provinces anglicanes d’Afrique et évêques du nord de la Zambie, Mgr Albert Chama, l’archevêque de l’Église anglicane du Kenya, Mgr Jackson Ole Sapit, ont appelé à une plus grande coopération entre le Groupe de la Banque et l’Église anglicane.
 
« L’esprit africain doit être au centre de la résolution des problèmes africains. Si la Banque africaine de développement mobilise des ressources pour le continent africain, et que l’Église mobilise également des ressources pour une transformation holistique, nous pouvons réaliser beaucoup de choses en travaillant ensemble — et faire la différence », a déclaré Mgr Ole Sapit.
 
L’église en tant qu’agent de changement
 
Proposant des solutions pour l’agriculture en Afrique, M. Adesina a déclaré que le monde avait désespérément besoin de « dirigeants visionnaires et passionnés qui sont des fournisseurs de solutions stratégiques et des acteurs de changements transformationnels ».
 
Cela inclut, a-t-il dit, un plaidoyer public pour des politiques gouvernementales robustes visant à mettre fin à la faim et à la malnutrition, accompagnées de banques alimentaires dirigées par les églises et d’autres programmes de protection sociale pour les pauvres et les nécessiteux, l’investissement dans des fermes commerciales, en particulier dans les zones rurales, le plaidoyer sur les questions relatives aux changements climatiques, le soutien et l’encouragement des jeunes Africains à s’engager dans l’entrepreneuriat agricole, et l’exigence d’une plus grande responsabilité financière, une plus grande probité publique et une meilleure gestion financière de la part des gouvernements.
 
 



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)