L’article 6, 7° de l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 consacre la délivrance de plein droit du certificat de résidence d’un an portant la mention « vie privée et familiale » au ressortissant algérien malade. Ce texte prévoit deux conditions pour pouvoir bénéficier de ce titre de séjour : une résidence habituelle sur le territoire français et un état de santé nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour le ressortissant algérien des conséquences d’une exceptionnelle gravité, sous réserve qu’il ne puisse pas effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans son pays.
Cette carte, renvoyant à celle du régime général (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile – Ceseda –, art. L. 313-11, 11°), est destinée aux Algériens gravement malades, « résidant habituellement en France » qui suivent un traitement en France, et qui ne pourraient bénéficier d’un traitement identique en Algérie.
Les juges accordent la qualification de résidence habituelle en France de manière assez souple. Ainsi, le juge administratif considère que l’installation d’un ressortissant algérien malade depuis plus d’un an chez un parent peut être qualifiée de « résidence habituelle en France » (cour administrative d'appel de Lyon, 6e ch., 9 décembre 2008, nº 06LY01344).
L’article 6, 7° de l’accord franco-algérien ne prévoit pas que le médecin inspecteur de la santé publique ou le médecin chef puisse convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale (Ceseda, art. R. 313-23 à R. 313-32 anciens). Cependant, la loi du 7 mars 2016, ainsi que le décret du 28 octobre 2016 ont modifié ces dispositions et désormais il est prévu que « le préfet délivre la carte de séjour au vu d’un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l’Office français de l’immigration et de l’intégration. L’avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l’immigration et du ministre chargé de la santé, au vu, d’une part, d’un rapport médical établi par un médecin de l’Office français de l’immigration et de l’intégration et, d’autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d’un traitement approprié dans le pays d’origine de l’intéressé ».
L’arrêté du 27 décembre 2016 est venu préciser la procédure du Code de l’entrée et du séjour des étranger et du droit d’asile relative à la délivrance d’un certificat de résidence d’un an portant la mention « vie privée et familiale » au ressortissant malade. Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 7 mars 2016 ainsi que du décret du 28 octobre 2016, le 1er janvier 2017, la préfecture remet à l’étranger qui en fait la demande un dossier comprenant une notice explicative l’informant de la procédure à suivre, ainsi qu’un certificat médical vierge qui devra être transmis à l’Ofii précisant si l’étranger peut ou non effectuer le voyage de retour dans le pays duquel il est ressortissant. De plus, ce certificat médical devra préciser si l’état de santé de l’étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entrainer des conséquences d’une exceptionnelle gravité sur son état de santé, ainsi que la durée prévisible du traitement.
Selon les dispositions de l’arrêté du 27 décembre 2016, le certificat médical devant être transmis à l’Ofii doit également préciser si, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d’un traitement approprié. Jusqu’à présent, le droit français permettait à la préfecture de vérifier l’existence d’un traitement approprié dans le pays d’origine. Dans la pratique contentieuse, les juges ont parfois prononcé un sursis à statuer pour vérifier si ce traitement existe en Algérie et si l’intéressé n’a accès ni aux médicaments, ni au suivi thérapeutique adapté à sa maladie. Ils peuvent également procéder à un supplément d’instruction en demandant au préfet de préciser « d’une part si, et dans quelles conditions, la population algérienne peut accéder à des molécules ayant les mêmes effets que les médicaments prescrits en France, d’autre part, la capacité de l’offre de soins en Algérie dans la spécialité médicale concernée par la maladie du requérant » (cour administrative d’appel de Lyon, 4e ch., 24 septembre 2009, nº 08LY01407, Chekhmoume).
Lors du traitement de la demande de régularisation, la préfecture et le juge administratif regardent, par ailleurs, l’indisponibilité du traitement ou des équipements médicaux en Algérie. Si l’indisponibilité du traitement dans le pays d’origine est établie en raison de l’absence chronique ou éventuellement passagère (« afflux considérable de patients », « pénurie de médicaments ») de traitement (médicament, molécules d’un traitement), mais aussi, pour certaines pathologies, par le défaut de matériel médical adéquat ou de spécialisation des praticiens, l’autorité préfectorale pourrait délivrer un certificat de résidence provisoire d’un an portant la mention « vie privée et familiale ». Cette indisponibilité du traitement ou des équipements médicaux en Algérie doit être démontrée de manière précise, auquel cas elle ne pourra être reconnue par la préfecture et par le juge administratif (cour administrative d’appel de Paris, 1ère ch., 17 décembre 2015, n°15PA00251).
Pour qu’un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » puisse être délivré aux ressortissants étrangers il est nécessaire que le défaut de prise en charge de la pathologie dans le pays d’origine entraine des conséquences d’une exceptionnelle gravité. C’est en ce sens que le juge administratif a parfois jugé, sur l’avis de professionnels du corps médical, que le défaut de prise en charge de la pathologie n’entrainerait pas de conséquences d’une exceptionnelle gravité (cour administrative d’appel de Marseille, 7e ch., 24 mars 2016, n° 14MA03492 ; cour administrative d’appel de Paris, 1ère ch., 17 décembre 2015, n°15PA0025).
Dans le cadre du pouvoir discrétionnaire du juge administratif, ce dernier vérifie la spécificité de la pathologie liée au pays d’origine. L’indisponibilité du traitement peut également résulter d’une pathologie liée à un événement grave traumatisant vécu en Algérie. Le refus de délivrance d’un certificat de résidence de l’article 6, 7° est ainsi annulé dans l’espèce suivante : la pathologie dont le ressortissant algérien souffre est liée aux événements traumatisants qu’elle a vécus en Algérie (Conseil d’Etat - CE, 30 avril 2009, n°311428).
Il est important de souligner que le ressortissant algérien malade est protégé contre les mesures d’éloignement. La jurisprudence prévoit que « lorsqu’une convention internationale stipule que l’intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu’il puisse légalement être l’objet d’une mesure de reconduite à la frontière » (Conseil d’État – CE –, 22 octobre 2004, n° 264395 ; CE, 6 septembre 2004, n° 262540). Cette jurisprudence est évocable pour les ressortissants algériens car l’article 6.7° de l’accord franco-algérien prévoit l’octroi de plein droit d’un titre de séjour.
Par ailleurs, un ressortissant algérien ne peut se voir refuser l’octroi d’un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » au motif de l’insuffisance de ses ressources pour accéder au traitement, cette condition n’étant pas prévue par l’article 6, 7° de l’accord franco-algérien (CE, 9 févier 2011, n°324147).
Enfin, sur l’admission au séjour des Algériens en tant que membres de famille et accompagnants de personnes malades (notamment parent d’enfant malade mineur), l’accord franco-algérien prévoit l’octroi d’un certificat de résidence algérien portant la mention « vie privée et familiale » aux parents d’enfant malade (sur le fondement de l’article 6.5° accord franco-algérien, art. 8 Cour européenne des droits de l’homme et l’article 3.1 Convention internationale des droits de l’enfant).
Finalement, et contrairement aux fausses idées, l’accord franco-algérien et la jurisprudence française donnent des outils assez larges aux ressortissants algériens pour garantir et protéger le droit à l’accès aux soins et à la santé en France.
Par Fayçal Megherbi, avocat au Barreau de Paris
E-mail : [email protected]
Site internet : www.faycalmegherbi.com
Cette carte, renvoyant à celle du régime général (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile – Ceseda –, art. L. 313-11, 11°), est destinée aux Algériens gravement malades, « résidant habituellement en France » qui suivent un traitement en France, et qui ne pourraient bénéficier d’un traitement identique en Algérie.
Les juges accordent la qualification de résidence habituelle en France de manière assez souple. Ainsi, le juge administratif considère que l’installation d’un ressortissant algérien malade depuis plus d’un an chez un parent peut être qualifiée de « résidence habituelle en France » (cour administrative d'appel de Lyon, 6e ch., 9 décembre 2008, nº 06LY01344).
L’article 6, 7° de l’accord franco-algérien ne prévoit pas que le médecin inspecteur de la santé publique ou le médecin chef puisse convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale (Ceseda, art. R. 313-23 à R. 313-32 anciens). Cependant, la loi du 7 mars 2016, ainsi que le décret du 28 octobre 2016 ont modifié ces dispositions et désormais il est prévu que « le préfet délivre la carte de séjour au vu d’un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l’Office français de l’immigration et de l’intégration. L’avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l’immigration et du ministre chargé de la santé, au vu, d’une part, d’un rapport médical établi par un médecin de l’Office français de l’immigration et de l’intégration et, d’autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d’un traitement approprié dans le pays d’origine de l’intéressé ».
L’arrêté du 27 décembre 2016 est venu préciser la procédure du Code de l’entrée et du séjour des étranger et du droit d’asile relative à la délivrance d’un certificat de résidence d’un an portant la mention « vie privée et familiale » au ressortissant malade. Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 7 mars 2016 ainsi que du décret du 28 octobre 2016, le 1er janvier 2017, la préfecture remet à l’étranger qui en fait la demande un dossier comprenant une notice explicative l’informant de la procédure à suivre, ainsi qu’un certificat médical vierge qui devra être transmis à l’Ofii précisant si l’étranger peut ou non effectuer le voyage de retour dans le pays duquel il est ressortissant. De plus, ce certificat médical devra préciser si l’état de santé de l’étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entrainer des conséquences d’une exceptionnelle gravité sur son état de santé, ainsi que la durée prévisible du traitement.
Selon les dispositions de l’arrêté du 27 décembre 2016, le certificat médical devant être transmis à l’Ofii doit également préciser si, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d’un traitement approprié. Jusqu’à présent, le droit français permettait à la préfecture de vérifier l’existence d’un traitement approprié dans le pays d’origine. Dans la pratique contentieuse, les juges ont parfois prononcé un sursis à statuer pour vérifier si ce traitement existe en Algérie et si l’intéressé n’a accès ni aux médicaments, ni au suivi thérapeutique adapté à sa maladie. Ils peuvent également procéder à un supplément d’instruction en demandant au préfet de préciser « d’une part si, et dans quelles conditions, la population algérienne peut accéder à des molécules ayant les mêmes effets que les médicaments prescrits en France, d’autre part, la capacité de l’offre de soins en Algérie dans la spécialité médicale concernée par la maladie du requérant » (cour administrative d’appel de Lyon, 4e ch., 24 septembre 2009, nº 08LY01407, Chekhmoume).
Lors du traitement de la demande de régularisation, la préfecture et le juge administratif regardent, par ailleurs, l’indisponibilité du traitement ou des équipements médicaux en Algérie. Si l’indisponibilité du traitement dans le pays d’origine est établie en raison de l’absence chronique ou éventuellement passagère (« afflux considérable de patients », « pénurie de médicaments ») de traitement (médicament, molécules d’un traitement), mais aussi, pour certaines pathologies, par le défaut de matériel médical adéquat ou de spécialisation des praticiens, l’autorité préfectorale pourrait délivrer un certificat de résidence provisoire d’un an portant la mention « vie privée et familiale ». Cette indisponibilité du traitement ou des équipements médicaux en Algérie doit être démontrée de manière précise, auquel cas elle ne pourra être reconnue par la préfecture et par le juge administratif (cour administrative d’appel de Paris, 1ère ch., 17 décembre 2015, n°15PA00251).
Pour qu’un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » puisse être délivré aux ressortissants étrangers il est nécessaire que le défaut de prise en charge de la pathologie dans le pays d’origine entraine des conséquences d’une exceptionnelle gravité. C’est en ce sens que le juge administratif a parfois jugé, sur l’avis de professionnels du corps médical, que le défaut de prise en charge de la pathologie n’entrainerait pas de conséquences d’une exceptionnelle gravité (cour administrative d’appel de Marseille, 7e ch., 24 mars 2016, n° 14MA03492 ; cour administrative d’appel de Paris, 1ère ch., 17 décembre 2015, n°15PA0025).
Dans le cadre du pouvoir discrétionnaire du juge administratif, ce dernier vérifie la spécificité de la pathologie liée au pays d’origine. L’indisponibilité du traitement peut également résulter d’une pathologie liée à un événement grave traumatisant vécu en Algérie. Le refus de délivrance d’un certificat de résidence de l’article 6, 7° est ainsi annulé dans l’espèce suivante : la pathologie dont le ressortissant algérien souffre est liée aux événements traumatisants qu’elle a vécus en Algérie (Conseil d’Etat - CE, 30 avril 2009, n°311428).
Il est important de souligner que le ressortissant algérien malade est protégé contre les mesures d’éloignement. La jurisprudence prévoit que « lorsqu’une convention internationale stipule que l’intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu’il puisse légalement être l’objet d’une mesure de reconduite à la frontière » (Conseil d’État – CE –, 22 octobre 2004, n° 264395 ; CE, 6 septembre 2004, n° 262540). Cette jurisprudence est évocable pour les ressortissants algériens car l’article 6.7° de l’accord franco-algérien prévoit l’octroi de plein droit d’un titre de séjour.
Par ailleurs, un ressortissant algérien ne peut se voir refuser l’octroi d’un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » au motif de l’insuffisance de ses ressources pour accéder au traitement, cette condition n’étant pas prévue par l’article 6, 7° de l’accord franco-algérien (CE, 9 févier 2011, n°324147).
Enfin, sur l’admission au séjour des Algériens en tant que membres de famille et accompagnants de personnes malades (notamment parent d’enfant malade mineur), l’accord franco-algérien prévoit l’octroi d’un certificat de résidence algérien portant la mention « vie privée et familiale » aux parents d’enfant malade (sur le fondement de l’article 6.5° accord franco-algérien, art. 8 Cour européenne des droits de l’homme et l’article 3.1 Convention internationale des droits de l’enfant).
Finalement, et contrairement aux fausses idées, l’accord franco-algérien et la jurisprudence française donnent des outils assez larges aux ressortissants algériens pour garantir et protéger le droit à l’accès aux soins et à la santé en France.
Par Fayçal Megherbi, avocat au Barreau de Paris
E-mail : [email protected]
Site internet : www.faycalmegherbi.com