Le 17 mars 2021 le juge des référés du Conseil d’Etat a censuré la circulaire 6245/SG du 25 janvier 2021 relative aux mesures frontalières mises en œuvre dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire en tant qu’elle suspend la délivrance de visas aux membres de la famille et conjoints de ressortissants algériens titulaires de certificats de résidence « scientifique ». Le Conseil d’Etat dénonce cette circulaire comme disproportionnée et enjoint donc au Premier ministre de prendre de nouvelles mesures strictement proportionnées aux risques sanitaires.
Cette décision s’inscrit dans un mouvement jurisprudentiel dans lequel le Conseil d’Etat sert de garant de l’Etat de droit et des libertés fondamentales face au régime exorbitant de l’état d’urgence sanitaire. Depuis l’instauration de l’état d’urgence sanitaire, le droit des étrangers s’est retrouvé particulièrement menacé par les mesures de restriction de l’accès aux frontières prises afin de lutter contre l’épidémie. La nécessité d’un contrôle du Conseil d’Etat s’imposait donc afin d’éviter des restrictions injustifiées et de maintenir les droits des étrangers. C’est ainsi que dès le 30 avril 2020 le Conseil d’Etat avait enjoint à l’administration de rétablir l’enregistrement des demandes d’asile en France. Le 21 janvier 2021, il avait suspendu la circulaire du Premier ministre qui empêchait le regroupement familial de conjoints et membres de la famille de ressortissants extérieurs à l’Union européenne présents sur le territoire français.
Cette décision s’inscrit parfaitement dans ce cadre jurisprudentiel : le juge des référés vient une nouvelle fois censurer une interdiction disproportionnée d’accès au territoire français, cette fois ci celle faite aux proches de ressortissants algériens titulaires d’un visa « scientifique ».
I. L’examen de la condition d’urgence
Le Conseil d’Etat examine tout d’abord si la condition d’urgence, nécessaire à l’intervention du juge des référés, est remplie.
Ici il reconnait classiquement que la condition d’urgence est remplie du fait que la circulaire cause des troubles dans les conditions d’existence des requérants en les séparant de leur famille et conjoint depuis plusieurs mois.
Le Conseil d’Etat juge que cette séparation est suffisante à reconnaitre la condition d’urgence : les requérants invoquaient la situation de précarité économique, administrative et affective qui découlait de cette séparation, argumentaire que le Conseil d’Etat n’a pas jugé utile de reprendre dans son dispositif.
II. Légalité de la décision
Le Conseil d’Etat censure la circulaire au motif qu’elle n’est pas proportionnée au risque sanitaire.
Tout d’abord car elle a comme effet d’interdire l’accès au territoire français aux proches de ressortissants étrangers titulaires d’un visa « scientifique » alors que ce n’est pas l’objectif qu’elle affiche. En effet, c’est le fait que la circulaire ne mentionne pas expressément la situation des requérants qui a pour effet de ne pas leur accorder de dérogation au principe d’interdiction d’accès aux frontières, mais ce n’est pas la volonté expresse du gouvernement. Or, selon le juge administratif suprême cette interdiction totale d’accès au territoire français est illégale : le gouvernement devait prévoir des dérogations.
De plus, le Conseil d’Etat souligne que l’interdiction crée par la circulaire ne permet pas de lutter efficacement contre la propagation du covid 19. En effet, elle n’est pas justifiée par la situation sanitaire en Algérie : les requérants ont rappelé que le nombre de contamination est moins élevé en Algérie qu’en France. La mesure ne peut pas non plus être justifiée par le nombre de personnes qu’elle pourrait concerner. Le Conseil d’Etat rappelle que seulement 6000 personnes sont concernées sur l’année 2020.
Le Conseil d’Etat en déduit que la circulaire était illégale.
III. Injonction
Le Conseil d’Etat admet la demande des requérants d’enjoindre à l’administration de prendre des mesures proportionnées aux risques sanitaires liés à l’entrée en France des proches des ressortissants algériens titulaires d’un certificat de résidence « scientifique ».
Par Maître Fayçal Megherbi, avocat au Barreau de Paris
Cette décision s’inscrit dans un mouvement jurisprudentiel dans lequel le Conseil d’Etat sert de garant de l’Etat de droit et des libertés fondamentales face au régime exorbitant de l’état d’urgence sanitaire. Depuis l’instauration de l’état d’urgence sanitaire, le droit des étrangers s’est retrouvé particulièrement menacé par les mesures de restriction de l’accès aux frontières prises afin de lutter contre l’épidémie. La nécessité d’un contrôle du Conseil d’Etat s’imposait donc afin d’éviter des restrictions injustifiées et de maintenir les droits des étrangers. C’est ainsi que dès le 30 avril 2020 le Conseil d’Etat avait enjoint à l’administration de rétablir l’enregistrement des demandes d’asile en France. Le 21 janvier 2021, il avait suspendu la circulaire du Premier ministre qui empêchait le regroupement familial de conjoints et membres de la famille de ressortissants extérieurs à l’Union européenne présents sur le territoire français.
Cette décision s’inscrit parfaitement dans ce cadre jurisprudentiel : le juge des référés vient une nouvelle fois censurer une interdiction disproportionnée d’accès au territoire français, cette fois ci celle faite aux proches de ressortissants algériens titulaires d’un visa « scientifique ».
I. L’examen de la condition d’urgence
Le Conseil d’Etat examine tout d’abord si la condition d’urgence, nécessaire à l’intervention du juge des référés, est remplie.
Ici il reconnait classiquement que la condition d’urgence est remplie du fait que la circulaire cause des troubles dans les conditions d’existence des requérants en les séparant de leur famille et conjoint depuis plusieurs mois.
Le Conseil d’Etat juge que cette séparation est suffisante à reconnaitre la condition d’urgence : les requérants invoquaient la situation de précarité économique, administrative et affective qui découlait de cette séparation, argumentaire que le Conseil d’Etat n’a pas jugé utile de reprendre dans son dispositif.
II. Légalité de la décision
Le Conseil d’Etat censure la circulaire au motif qu’elle n’est pas proportionnée au risque sanitaire.
Tout d’abord car elle a comme effet d’interdire l’accès au territoire français aux proches de ressortissants étrangers titulaires d’un visa « scientifique » alors que ce n’est pas l’objectif qu’elle affiche. En effet, c’est le fait que la circulaire ne mentionne pas expressément la situation des requérants qui a pour effet de ne pas leur accorder de dérogation au principe d’interdiction d’accès aux frontières, mais ce n’est pas la volonté expresse du gouvernement. Or, selon le juge administratif suprême cette interdiction totale d’accès au territoire français est illégale : le gouvernement devait prévoir des dérogations.
De plus, le Conseil d’Etat souligne que l’interdiction crée par la circulaire ne permet pas de lutter efficacement contre la propagation du covid 19. En effet, elle n’est pas justifiée par la situation sanitaire en Algérie : les requérants ont rappelé que le nombre de contamination est moins élevé en Algérie qu’en France. La mesure ne peut pas non plus être justifiée par le nombre de personnes qu’elle pourrait concerner. Le Conseil d’Etat rappelle que seulement 6000 personnes sont concernées sur l’année 2020.
Le Conseil d’Etat en déduit que la circulaire était illégale.
III. Injonction
Le Conseil d’Etat admet la demande des requérants d’enjoindre à l’administration de prendre des mesures proportionnées aux risques sanitaires liés à l’entrée en France des proches des ressortissants algériens titulaires d’un certificat de résidence « scientifique ».
Par Maître Fayçal Megherbi, avocat au Barreau de Paris