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ACTUALITES

Le village tchadien de Fitiné, défiguré par Boko Haram


Alwihda Info | Par AA - 10 Août 2015


Brûlé, saccagé, vidé de sa population, Tinifé garde les stigmates du violent passage du groupe armé nigérian la semaine passée.


AA/Fitiné (Tchad)/Abdoulaye Adoum

Crédits photo: AA
Crédits photo: AA
Les pluies abondantes qui se sont abattues durant quelques jours sur le village Fitiné, sur le Lac Tchad, n'ont pas réussi à effacer les traces vives du passage sanglant de Boko Haram.

Casseroles calcinées, champs de palmiers dattiers brûlés, habitations quasi-inexistantes, antenne relais pour les réseaux téléphoniques détruites, hôpital saccagé… Le chaos règne sur Fitiné.

Attaquée par les éléments du groupe armé nigérian la nuit du 22 juillet dernier, cette localité qui comptait environ 5.000 habitants, est aujourd’hui vidée de sa population qui a préféré se réfugier sur l’île de Kenesserou, où sont déployés de nombreux soldats tchadiens.

A présent, il ne reste qu'un vaste champ de ruines qu’arborent des objets calcinés. Les seules âmes qui vivent sont les éléments de la GNNT (garde nationale et nomade du Tchad) arrivés sur les lieux deux jours après que Boko Haram a commis son forfait, le chef du village et une poignée de villageois "venus constater les dégâts".

"Nous avons enregistré de très lourds dégâts avec cette attaque de Boko Haram, 3 villageois ont été tués et tout a été brûlé", relate en colère Abdoulaye Adam Koremi, chef de Fitiné, qui n'a quitté son village "que quelques heures" durant l'attaque.

Ce qui chagrine le plus ce chef des lieux, c'est le fait que 'le chef hiérarchique du canton de Bol avait été alerté de l'imminence de l'attaque et avait assuré aux villageois que des renforts seraient en route vers la localité. Mais les forces du mal les ont précédés et ils ont commis ce que vous pouvez constater» poursuit-il.

"Si nous avions ne serait-ce que 10 militaires parmi nous, ils (Boko Haram) n’oseraient même pas nous attaquer", lance-t-il encore avec regret.

Pour le commandant en chef à la tête des forces présentes actuellement dans la localité (130 hommes) , le Colonel Mbodou Abakar Abou, les raisons du retard de leur intervention s'explique par le fait qu'ils étaient confrontés aux éléments de Boko Haram dans un village voisin "Midi", qu'il qualifie de bastion de Boko Haram au Tchad.

"Le démantèlement de cette base nous a un peu retardés", avoue-t-il à Anadolu.

Interrogé sur son plan d’action futur, l’officier tchadien jure "d’enrayer Boko Haram de la zone" sans quoi, "il ne retournerait pas à au Tchad", renchérit-il.

L'armée tchadienne agit, depuis le début de l'année, au sein d'une opération conjointe avec ses voisins camerounais, nigérians et nigériens pour lutter contre Boko Haram. 

Une force d’intervention conjointe multinationale (MNJTF) de 8700 hommes regroupant ces mêmes pays et dont le quartier général sera établi à N’Djamena (et qui sera dirigée par le Nigéria) sera déployée dans les jours à venir, conformément à ce qui a été convenu lors d'un sommet tenu le 11 juin dernier à Abuja et consacré à la sécurité dans la région.

En attendant, la question du retour des populations exilées ou déplacées, estimés à plusieurs des dizaines de milliers, est loin d’être une mince affaire. A Fitiné, en dépit de l’appel lancé par le chef du village, aucun habitant n’est pour le moment sûr de le suivre.

"Je suis revenu juste pour constater ce qui me reste", affirme Khadidja Mahamat, native de la localité et mère de 7 enfants tout en rangeant l’épave des tôles de sa maison.

"Malheureusement, tout a été détruit, donc je n’ai aucune raison de rester", a-t-elle ajouté.

"Qu’allons-nous manger, et où allons-nous dormir ?", lance un homme parmi un groupe d’une dizaine de personnes retournés faire "leur constat."

"Fitiné était le plus grand marché hebdomadaire du Lac dans le domaine du poisson, nous sommes aujourd’hui réduit à néant", poursuit le même homme.

"A moins que le gouvernement nous aide à reconstruire nos habitations" envisage-t-il comme seule solution pour un retour de la population.

Le bout du tunnel semble encore loin pour ces riverains car, trois semaines après l'attaque « ni le gouverneur de la région, ni le préfet, moins encore le chef de canton n’ont effectué le déplacement de la localité, hormis la visite furtive du sous-préfet » renseigne le chef de village.



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)