En conséquence, il est difficile de définir le parti politique. Si le marxisme pense que le parti politique n'est qu'une expression politique d'une certaine classe, et donc qu'il n'y a pas de parti politique sans base de classe, François Bourdon voit le parti comme un rassemblement d'individus qui prêchent les mêmes idées politiques et cherchent à les faire vaincre en cherchant le soutien du plus grand nombre possible de citoyens en vue d'atteindre le pouvoir ou du moins pour influencer ses décisions.
En général, on peut dire qu'un parti politique est un rassemblement d'un groupe de personnes qui ont des idées ou des objectifs politiques communs, qui sont organisées sous la forme d'une institution, à travers laquelle elles cherchent à influencer l'opinion publique, arriver au pouvoir en obtenant des résultats positifs lors de différentes élections leur permettant d'avoir des postes au gouvernement ou d'avoir une influence sur lui en le soutenant ou en s'y opposant de l'intérieur ou de l'extérieur du Parlement.
Autrement dit, on peut également dire que le parti politique est un rassemblement de personnes qui embrassent la même croyance politique et partagent les mêmes visions et perceptions sociales et économiques qu'elles visent à diffuser à travers leur activité partisane ou à les appliquer à travers leur œuvre gouvernementale, ou des gens qui n'ont pas de dénominateur commun qui les rassemble excepté le désir d'atteindre le pouvoir et de bénéficier de ses multiples avantages.
En abrégé, le parti politique est une équipe d'un groupe de personnes dont le but est de contrôler la vie politique en obtenant autant que possible de postes parlementaires ou gouvernementaux. Cet objectif est un objectif commun à tous les partis politiques de toutes les couleurs et de tous les horizons, qu'ils soient de ceux qui participent aux batailles électorales ou ceux qui les boycottent.
Pour atteindre cet objectif, le parti politique doit disposer d'un nombre suffisant de membres et d'un travail considérable sur la scène politique. C'est ce que le gouvernement ouest-allemand (1949-1990) avait prédit et stipulé dans sa définition des partis politiques contenue au premier alinéa de l'article deux de la loi du 24 juillet 1967 : "Les partis sont des associations de citoyens qui, sans limitation de temps ou pour une longue durée, influent sur la formation de la volonté politique au niveau de la Fédération (Bund) ou d'un Land et entendent participer à la représentation du peuple au Bundestag ou à un Parlement de Land (Landtag), pourvu que l'ensemble des circonstances de fait qui leur sont propres, notamment l'ampleur et la consistance de leur organisation, leurs effectifs et leur activité sur la scène publique présentent une garantie suffisante du sérieux de ces objectifs".
Pour atteindre ce même objectif, il doit également développer une stratégie qui définit son approche et ses méthodes adoptées pour l'atteindre, qui peut se résumer en :
- Établir des programmes politiques ou de développement qui expriment les orientations et les propositions du parti pour résoudre les problèmes des citoyens et réaliser le progrès de l'État et de la société ;
- Attirer des soutiens et des financeurs des activités du parti ;
- Créer des mécanismes pour atteindre l'indépendance financière du parti et le libérer de sa subordination à des sources externes ;
- Attirer de nouveaux membres pour couvrir toutes les régions du territoire national ;
- Assurer l'encadrement idéologique des membres du parti ;
- Faire la publicité des programmes et des objectifs du parti ;
- Choisir les représentants du parti dans les batailles électorales ;
- Convaincre les électeurs et les persuader de voter en faveur des candidats du parti.
Cela arrive si le parti a une intention sincère d'être un véritable acteur de la vie politique. Mais si son but est de ne constituer qu'un décor qui meuble la scène politique et qui fait faussement croire l'opinion publique interne et externe à la démocratie et le pluralisme du système politique en place en échange de bénéficier de la rente politique (finances soustraits des fonds publics) et d'innombrables autres avantages, nous ne trouvons chez le parti aucun programme politique ou de développement pour résoudre les problèmes des citoyens et réaliser la prospérité de l'État et de la société, comme on ne touche aucun travail d'encadrement ou de formation, mais seulement des activités saisonnières liées exclusivement aux périodes de campagnes électorales.
Ceci est exactement ce que nous avons ressenti récemment avec les partis administratifs marocains qui ont soumis des propositions concernant le nouveau modèle de développement, la moindre des choses qu'on puisse dire sur elles est qu'elles étaient insuffisantes et de qualité médiocre. "La plus grande proposition ne dépasse pas 40 pages et la plus courte ne dépasse pas 14 pages ou 13 pages", comme il l'avait déclaré le professeur universitaire Abdelali Benlyas, "sachant que le sujet est lié à un modèle de développement qui aborde l'avenir du Maroc pour les trois ou quatre prochaines décennies, traite l'avenir du Maroc dans le domaine social, le domaine politique, le domaine économique, le domaine environnemental, dans sa relation avec son environnement régional, ainsi que dans sa relation avec la scène internationale".
"40 pages restent insuffisantes pour refléter ce que nous voulons réaliser à l'avenir, sachant que l'étude la plus simple liée à la gestion du secteur gouvernemental ou un de ses champs, son nombre de pages dépasse les centaines et parfois les milliers de pages. De la sorte, le volume des propositions s'est répercuté d'une mauvaise manière sur les procédures et les processus présentés par ces mémorandums sur les choix que nous devons suivre dans les différents domaines dont nous avons parlé", comme elle l'a confirmé la même source.
Ce que le professeur Abdelali Benlyas a évoqué et souligné ne s'applique pas seulement aux partis administratifs, mais concerne également le reste des partis marocains. Cependant, les causes de la faiblesse des propositions de ces partis politiques en particulier et leur faible performance politique en général ne sont pas le résultat des intentions malsaines de leurs membres et leur mauvaise volonté mais plutôt le résultat d'accumulations de nombreuses causes qu'on peut diviser en deux : des causes humaines (problème de formation et problème d'affiliation) et autres économiques et juridiques (problème de soutien financier et problème du cadre juridique et de l'atmosphère politique).
1) PROBLÈME DE LA FORMATION :
L'Homme est le produit de son environnement. Même chose pour les partis politiques. Nous disons "Tel père, tel fils". Nous vous disons que ces partis politiques faibles sont issus de cet environnement sociétal usé. En effet, les partis politiques de notre pays sont victimes de notre environnement sociétal marocain. Cet environnement est le générateur et le principal moteur de la capacité productive et créative des partis politiques. En d'autres termes, il est l'âme et le cœur battant de leurs programmes électoraux et leurs plans de développement.
Les partis politiques ne recrutent pas leurs compétences partisanes des États-Unis d'Amérique, du Royaume-Uni et du reste des pays développés, mais plutôt du tissu social marocain dans ses écoles, universités, instituts, etc. Et malheureusement, ce tissu ne produit pas des génies, des cerveaux capables de produire et de créer ce qui est nouveau, mais plutôt des perroquets qui reproduisent ce qui a été produit par les autres, notamment les pays occidentaux.
Ce fait rend nos partis politiques des partis stériles, des partis incapables de produire et de créer de nouveaux programmes et plans de développement, des partis dont le projet intellectuel est entièrement ou presque entièrement basé sur l'imitation et la répétition des idées et des expériences qui ont connu le succès dans un autre monde sans prendre en considération que les particularités de ce monde sont différentes des nôtres et qu'une politique ou une démarche qui a réussi ailleurs peut connaître l'échec ici.
2) PROBLÈME D'AFFILIATION :
Le problème de l'affiliation partisane, une deuxième cause qui se cache derrière la faible capacité de proposition des partis politiques marocains. Normalement l'acte d'appartenance au parti incarne le désir de l'individu d'œuvrer au sein d'une institution politique avec laquelle il partage les mêmes principes, idées et orientations politiques. Cela explique la concentration d'un groupe de théoriciens politiques dans leur définition des partis politiques sur le commun idéologique.
Parmi eux, Giovanni Sartori qui définit le parti politique comme un regroupement de personnes unies par des idées communes sur le rôle de l'individu et de l'État, qui œuvrent pour arriver ou rester au pouvoir par l'organisation des électeurs et de l'État. De même, George Purdue qui a donné au parti politique la définition suivante : "Une organisation qui comprend un groupe d'individus partageant la même vision politique et œuvrant à mettre leurs idées communes en pratique en travaillant simultanément pour inclure le plus grand nombre possible de citoyens dans leurs rangs et pour prendre le pouvoir ou au moins influencer les décisions du gouvernement en place".
Cette cohésion autour des mêmes visions et des mêmes tendances intellectuelles transforme les partisans en soldats qui bataillent pour le triomphe de l'idéologie du parti auquel ils appartiennent, soit en assurant sa propagande, soit en écrivant sur elle voire en contribuant à son développement et au dépassement de ses limites. Et c'est ce qui fait de cette entité une usine de pensée, une institution de savoir et une école intellectuelle par excellence.
Cette cohésion nous manque cruellement sur la scène partisane marocaine. Le partisan au Maroc n'adhère pas à un parti car il se retrouve dans l'idéologie de ce parti, les principes qu'il défend et le projet social pour lequel il milite. Au contraire, son affiliation partisane est malheureusement basée sur l'opportunisme et l'arrivisme et le désir d'obtenir un poste au gouvernement, un siège parlementaire, une fonction publique ou tout autre avantage.
Quant à l'affiliation partisane fondée sur la connaissance et la maîtrise de l'idéologie du parti, une forte adhésion à ses idées et ses principes et une volonté de lutter pour son triomphe, elle est aujourd'hui une exception sur la scène partisane marocaine. En effet, la plupart des partisans marocains ignorent tout de l'idéologie de leurs partis politiques. Beaucoup d'entre eux s'engagent dans des institutions partisanes, dont l'idéologie est complètement opposée à leurs propres croyances, idées et principes. La conviction idéologique et la compatibilité intellectuelle sont leurs dernières préoccupations. Leur principale motivation, et peut-être l'unique mobile qui les motive et les pousse à s'engager dans l'œuvre partisane, est le gain personnel (pouvoir, travail ou argent), et non la victoire dans les batailles idéologiques. Cela explique la stérilité ou l'insuffisance intellectuelle que connaissent aujourd'hui les partis politiques marocains.
3) PROBLÈME DE SOUTIEN FINANCIER :
Le soutien financier aux partis politiques signifie la somme des montants financiers et des biens matériels que ces partis reçoivent de sources internes ou externes pour financer leurs différentes activités et campagnes électorales. En d'autres termes, on peut dire que c'est la flamme qui rend l'âme à la vie partisane et sans laquelle le parti devient comme un corps sans âme, c'est-à-dire qu'il devient une entité morte.
Ce support est une arme à double tranchant. Si, d'une part, il est l'essence qui anime l'âme de l'institution partisane, d'une autre part, il la rend otage de ses soutiens financiers. Car la plupart de ces soutiens ne soutiennent pas des partis politiques comme ça, par amour de faire le bien ou pour faire triompher l'idéologie partisane, mais les soutiennent plutôt en échange de servir leurs agendas et leurs intérêts lobbyistes. Cela oblige le parti à se conformer à leurs consignes et directives, sinon il sera voué à l'extinction.
Cette soumission aux soutiens financiers et cette volonté de les satisfaire, même au détriment du mécontentement des militants du parti, pousse le peu d'intellos qui peuvent défier la nature et émerger de temps en temps au Maroc à prendre la décision de quitter ces partis politiques. En effet, chaque règle a une exception. Nous ne nions généralement pas qu'il existe des compétences scientifiques et professionnelles dans notre pays. Mais ces compétences restent une monnaie rare sur la scène partisane au Maroc, et malheureusement, en raison du facteur de favoritisme et de corruption, elles n'atteignent pas les postes de décision, qu'ils soient partisans ou gouvernementaux.
Cette situation les frustre, les étouffe même, et pousse la majeure partie à se retirer de la scène politique ou à choisir le travail dans d'autres pays, notamment ceux qui valorisent les cerveaux et la richesse humaine, ce qui aggrave l'ampleur de la sécheresse intellectuelle que connaît le Maroc, ainsi que la rareté des compétences qui innovent en exprimant la voix des citoyens et en produisant des programmes partisans qui répondent aux espoirs et aux aspirations des citoyens et font sortir nos partis politiques de la monotonie et la routine, ce qui rend leurs œuvres, leurs visions et leurs propositions intéressantes et votables, et crée de la sorte une sorte de concurrence entre les partis, qui est le meilleur en termes de qualité et de réalisme.
4) PROBLÈME DU CADRE JURIDIQUE ET DE L'ATMOSPHÈRE POLITIQUE :
Une autre raison de la faible capacité de proposition des partis politiques - la dernière pour notre travail - est qu'ils ont évolué dans un environnement non-démocratique qui a affecté négativement l'expérience partisane au Maroc. Si Maurice Duverger a défini la fonction du parti politique dans les systèmes démocratiques modernes dans la recherche du pouvoir ou du moins la volonté de participer au gouvernement, les partis politiques dans l'expérience marocaine ne rentrent pas dans cette définition ; car la nature du système politique marocain basé sur la monarchie exécutive ne permet pas aux partis d'accéder à l'exercice du pouvoir, ni exécutif ni législatif, qui ne se présentent donc que comme objets de décoration de la scène politique, en ne leur donnant que des rôles limités à la simple représentation et organisation des citoyens.
La marge de liberté accordée aux partis politiques marocains est en effet étroite. Le législateur marocain a réservé à ces partis un champ d'action et de réflexion très étroit. Il ne veut pas que le Maroc ait des partis forts qui pourraient devenir un rival de l'establishment royal et une source de menace pour son existence. Au contraire, il ne veut pour ce pays que des partis faibles qui décorent la scène politique et donnent faussement l'impression au monde qu'on est un pays démocratique et multipartite.
Les lois régissant la vie des partis dans ce pays ont depuis leur création établi deux restrictions au rôle des partis politiques. "La première consiste dans la limitation du rôle des partis politiques dans la contribution, avec d'autres organismes, à l'organisation et à la représentation des citoyens, et il s'agit là d'une diminution du rôle positif que les partis politiques peuvent jouer en tant que principal moteur de la vie politique après le roi. La seconde consiste à stopper leur fonction dans les limites de ces deux rôles sans étaler sur leurs capacités à gouverner et à exercer le pouvoir, censé être l'objectif principal des partis leur permettant de mettre en œuvre leurs programmes".
Ces deux contraintes, le spécialiste marocain en sciences politiques Mohamed Choucair a identifié leur raison en trois points :
- La nature du pouvoir au Maroc est incompatible avec l'existence de toute pratique politique qui aspire à obtenir le pouvoir ;
- Le fait que la monarchie œuvre toujours pour occuper la première place au sein du système politique marocain, et de la sorte faire barrière au reste des différentes forces politiques, inclus les partis politiques ;
- Les tentatives permanentes du pouvoir monarchique afin de limiter l'activité des phénomènes partisans : l'activité du parti a été déterminée par le régime dans un cadre étroit qui ne peut être dépassé.
Cette situation ne permet pas aux partis politiques marocains de voir au-delà de leur nez et les force à réfléchir et à s'exprimer dans un champ étroit. La volonté monarchique au Maroc n'est satisfaite qu'en accordant aux institutions partisanes du système politique marocain des fonctions politiques, la meilleure des choses qu'on puisse dire sur elles est qu'elles restent secondaires par rapport aux fonctions qu'elles exercent et aux tâches que jouent leurs homologues dans les pays occidentaux.
Des leaders politiques et des militants des partis nationaux ont défié ces restrictions qui leur étaient imposées et ont fait passer des messages et porté des slogans en particulier dans les années 60, 70 et 80, le moins qu'on puisse dire est qu'ils étaient révolutionnaires, leur sort était de souffrir et goûter à l'enfer des années de plomb. Certains d'entre eux ont été tués, d'autres ont été emprisonnés pendant de nombreuses années dans des prisons secrètes, une partie s'est échappée de ce pays de peur de tomber aux mains du régime et une autre a choisi le silence et s'est retirée de la scène politique ou a changé de peau et de veste et s'est retournée contre ses principes et ses camarades ou ses frères à 180 degrés, chose qui a fait rentrer la vie partisane marocaine dans une stagnation politique et une paralysie intellectuelle… et Seul Dieu sait quand cela prendra fin.
- Article original (en arabe) : https://ifada.ma/d-opinion/article-10689.html
(*) Fadoua Chaouqui : Chercheuse en performance politique et institutionnelle
(*) Kamal Znidar : Ecrivain néo-islamiste, chercheur en performance politique et institutionnelle
En général, on peut dire qu'un parti politique est un rassemblement d'un groupe de personnes qui ont des idées ou des objectifs politiques communs, qui sont organisées sous la forme d'une institution, à travers laquelle elles cherchent à influencer l'opinion publique, arriver au pouvoir en obtenant des résultats positifs lors de différentes élections leur permettant d'avoir des postes au gouvernement ou d'avoir une influence sur lui en le soutenant ou en s'y opposant de l'intérieur ou de l'extérieur du Parlement.
Autrement dit, on peut également dire que le parti politique est un rassemblement de personnes qui embrassent la même croyance politique et partagent les mêmes visions et perceptions sociales et économiques qu'elles visent à diffuser à travers leur activité partisane ou à les appliquer à travers leur œuvre gouvernementale, ou des gens qui n'ont pas de dénominateur commun qui les rassemble excepté le désir d'atteindre le pouvoir et de bénéficier de ses multiples avantages.
En abrégé, le parti politique est une équipe d'un groupe de personnes dont le but est de contrôler la vie politique en obtenant autant que possible de postes parlementaires ou gouvernementaux. Cet objectif est un objectif commun à tous les partis politiques de toutes les couleurs et de tous les horizons, qu'ils soient de ceux qui participent aux batailles électorales ou ceux qui les boycottent.
Pour atteindre cet objectif, le parti politique doit disposer d'un nombre suffisant de membres et d'un travail considérable sur la scène politique. C'est ce que le gouvernement ouest-allemand (1949-1990) avait prédit et stipulé dans sa définition des partis politiques contenue au premier alinéa de l'article deux de la loi du 24 juillet 1967 : "Les partis sont des associations de citoyens qui, sans limitation de temps ou pour une longue durée, influent sur la formation de la volonté politique au niveau de la Fédération (Bund) ou d'un Land et entendent participer à la représentation du peuple au Bundestag ou à un Parlement de Land (Landtag), pourvu que l'ensemble des circonstances de fait qui leur sont propres, notamment l'ampleur et la consistance de leur organisation, leurs effectifs et leur activité sur la scène publique présentent une garantie suffisante du sérieux de ces objectifs".
Pour atteindre ce même objectif, il doit également développer une stratégie qui définit son approche et ses méthodes adoptées pour l'atteindre, qui peut se résumer en :
- Établir des programmes politiques ou de développement qui expriment les orientations et les propositions du parti pour résoudre les problèmes des citoyens et réaliser le progrès de l'État et de la société ;
- Attirer des soutiens et des financeurs des activités du parti ;
- Créer des mécanismes pour atteindre l'indépendance financière du parti et le libérer de sa subordination à des sources externes ;
- Attirer de nouveaux membres pour couvrir toutes les régions du territoire national ;
- Assurer l'encadrement idéologique des membres du parti ;
- Faire la publicité des programmes et des objectifs du parti ;
- Choisir les représentants du parti dans les batailles électorales ;
- Convaincre les électeurs et les persuader de voter en faveur des candidats du parti.
Cela arrive si le parti a une intention sincère d'être un véritable acteur de la vie politique. Mais si son but est de ne constituer qu'un décor qui meuble la scène politique et qui fait faussement croire l'opinion publique interne et externe à la démocratie et le pluralisme du système politique en place en échange de bénéficier de la rente politique (finances soustraits des fonds publics) et d'innombrables autres avantages, nous ne trouvons chez le parti aucun programme politique ou de développement pour résoudre les problèmes des citoyens et réaliser la prospérité de l'État et de la société, comme on ne touche aucun travail d'encadrement ou de formation, mais seulement des activités saisonnières liées exclusivement aux périodes de campagnes électorales.
Ceci est exactement ce que nous avons ressenti récemment avec les partis administratifs marocains qui ont soumis des propositions concernant le nouveau modèle de développement, la moindre des choses qu'on puisse dire sur elles est qu'elles étaient insuffisantes et de qualité médiocre. "La plus grande proposition ne dépasse pas 40 pages et la plus courte ne dépasse pas 14 pages ou 13 pages", comme il l'avait déclaré le professeur universitaire Abdelali Benlyas, "sachant que le sujet est lié à un modèle de développement qui aborde l'avenir du Maroc pour les trois ou quatre prochaines décennies, traite l'avenir du Maroc dans le domaine social, le domaine politique, le domaine économique, le domaine environnemental, dans sa relation avec son environnement régional, ainsi que dans sa relation avec la scène internationale".
"40 pages restent insuffisantes pour refléter ce que nous voulons réaliser à l'avenir, sachant que l'étude la plus simple liée à la gestion du secteur gouvernemental ou un de ses champs, son nombre de pages dépasse les centaines et parfois les milliers de pages. De la sorte, le volume des propositions s'est répercuté d'une mauvaise manière sur les procédures et les processus présentés par ces mémorandums sur les choix que nous devons suivre dans les différents domaines dont nous avons parlé", comme elle l'a confirmé la même source.
Ce que le professeur Abdelali Benlyas a évoqué et souligné ne s'applique pas seulement aux partis administratifs, mais concerne également le reste des partis marocains. Cependant, les causes de la faiblesse des propositions de ces partis politiques en particulier et leur faible performance politique en général ne sont pas le résultat des intentions malsaines de leurs membres et leur mauvaise volonté mais plutôt le résultat d'accumulations de nombreuses causes qu'on peut diviser en deux : des causes humaines (problème de formation et problème d'affiliation) et autres économiques et juridiques (problème de soutien financier et problème du cadre juridique et de l'atmosphère politique).
1) PROBLÈME DE LA FORMATION :
L'Homme est le produit de son environnement. Même chose pour les partis politiques. Nous disons "Tel père, tel fils". Nous vous disons que ces partis politiques faibles sont issus de cet environnement sociétal usé. En effet, les partis politiques de notre pays sont victimes de notre environnement sociétal marocain. Cet environnement est le générateur et le principal moteur de la capacité productive et créative des partis politiques. En d'autres termes, il est l'âme et le cœur battant de leurs programmes électoraux et leurs plans de développement.
Les partis politiques ne recrutent pas leurs compétences partisanes des États-Unis d'Amérique, du Royaume-Uni et du reste des pays développés, mais plutôt du tissu social marocain dans ses écoles, universités, instituts, etc. Et malheureusement, ce tissu ne produit pas des génies, des cerveaux capables de produire et de créer ce qui est nouveau, mais plutôt des perroquets qui reproduisent ce qui a été produit par les autres, notamment les pays occidentaux.
Ce fait rend nos partis politiques des partis stériles, des partis incapables de produire et de créer de nouveaux programmes et plans de développement, des partis dont le projet intellectuel est entièrement ou presque entièrement basé sur l'imitation et la répétition des idées et des expériences qui ont connu le succès dans un autre monde sans prendre en considération que les particularités de ce monde sont différentes des nôtres et qu'une politique ou une démarche qui a réussi ailleurs peut connaître l'échec ici.
2) PROBLÈME D'AFFILIATION :
Le problème de l'affiliation partisane, une deuxième cause qui se cache derrière la faible capacité de proposition des partis politiques marocains. Normalement l'acte d'appartenance au parti incarne le désir de l'individu d'œuvrer au sein d'une institution politique avec laquelle il partage les mêmes principes, idées et orientations politiques. Cela explique la concentration d'un groupe de théoriciens politiques dans leur définition des partis politiques sur le commun idéologique.
Parmi eux, Giovanni Sartori qui définit le parti politique comme un regroupement de personnes unies par des idées communes sur le rôle de l'individu et de l'État, qui œuvrent pour arriver ou rester au pouvoir par l'organisation des électeurs et de l'État. De même, George Purdue qui a donné au parti politique la définition suivante : "Une organisation qui comprend un groupe d'individus partageant la même vision politique et œuvrant à mettre leurs idées communes en pratique en travaillant simultanément pour inclure le plus grand nombre possible de citoyens dans leurs rangs et pour prendre le pouvoir ou au moins influencer les décisions du gouvernement en place".
Cette cohésion autour des mêmes visions et des mêmes tendances intellectuelles transforme les partisans en soldats qui bataillent pour le triomphe de l'idéologie du parti auquel ils appartiennent, soit en assurant sa propagande, soit en écrivant sur elle voire en contribuant à son développement et au dépassement de ses limites. Et c'est ce qui fait de cette entité une usine de pensée, une institution de savoir et une école intellectuelle par excellence.
Cette cohésion nous manque cruellement sur la scène partisane marocaine. Le partisan au Maroc n'adhère pas à un parti car il se retrouve dans l'idéologie de ce parti, les principes qu'il défend et le projet social pour lequel il milite. Au contraire, son affiliation partisane est malheureusement basée sur l'opportunisme et l'arrivisme et le désir d'obtenir un poste au gouvernement, un siège parlementaire, une fonction publique ou tout autre avantage.
Quant à l'affiliation partisane fondée sur la connaissance et la maîtrise de l'idéologie du parti, une forte adhésion à ses idées et ses principes et une volonté de lutter pour son triomphe, elle est aujourd'hui une exception sur la scène partisane marocaine. En effet, la plupart des partisans marocains ignorent tout de l'idéologie de leurs partis politiques. Beaucoup d'entre eux s'engagent dans des institutions partisanes, dont l'idéologie est complètement opposée à leurs propres croyances, idées et principes. La conviction idéologique et la compatibilité intellectuelle sont leurs dernières préoccupations. Leur principale motivation, et peut-être l'unique mobile qui les motive et les pousse à s'engager dans l'œuvre partisane, est le gain personnel (pouvoir, travail ou argent), et non la victoire dans les batailles idéologiques. Cela explique la stérilité ou l'insuffisance intellectuelle que connaissent aujourd'hui les partis politiques marocains.
3) PROBLÈME DE SOUTIEN FINANCIER :
Le soutien financier aux partis politiques signifie la somme des montants financiers et des biens matériels que ces partis reçoivent de sources internes ou externes pour financer leurs différentes activités et campagnes électorales. En d'autres termes, on peut dire que c'est la flamme qui rend l'âme à la vie partisane et sans laquelle le parti devient comme un corps sans âme, c'est-à-dire qu'il devient une entité morte.
Ce support est une arme à double tranchant. Si, d'une part, il est l'essence qui anime l'âme de l'institution partisane, d'une autre part, il la rend otage de ses soutiens financiers. Car la plupart de ces soutiens ne soutiennent pas des partis politiques comme ça, par amour de faire le bien ou pour faire triompher l'idéologie partisane, mais les soutiennent plutôt en échange de servir leurs agendas et leurs intérêts lobbyistes. Cela oblige le parti à se conformer à leurs consignes et directives, sinon il sera voué à l'extinction.
Cette soumission aux soutiens financiers et cette volonté de les satisfaire, même au détriment du mécontentement des militants du parti, pousse le peu d'intellos qui peuvent défier la nature et émerger de temps en temps au Maroc à prendre la décision de quitter ces partis politiques. En effet, chaque règle a une exception. Nous ne nions généralement pas qu'il existe des compétences scientifiques et professionnelles dans notre pays. Mais ces compétences restent une monnaie rare sur la scène partisane au Maroc, et malheureusement, en raison du facteur de favoritisme et de corruption, elles n'atteignent pas les postes de décision, qu'ils soient partisans ou gouvernementaux.
Cette situation les frustre, les étouffe même, et pousse la majeure partie à se retirer de la scène politique ou à choisir le travail dans d'autres pays, notamment ceux qui valorisent les cerveaux et la richesse humaine, ce qui aggrave l'ampleur de la sécheresse intellectuelle que connaît le Maroc, ainsi que la rareté des compétences qui innovent en exprimant la voix des citoyens et en produisant des programmes partisans qui répondent aux espoirs et aux aspirations des citoyens et font sortir nos partis politiques de la monotonie et la routine, ce qui rend leurs œuvres, leurs visions et leurs propositions intéressantes et votables, et crée de la sorte une sorte de concurrence entre les partis, qui est le meilleur en termes de qualité et de réalisme.
4) PROBLÈME DU CADRE JURIDIQUE ET DE L'ATMOSPHÈRE POLITIQUE :
Une autre raison de la faible capacité de proposition des partis politiques - la dernière pour notre travail - est qu'ils ont évolué dans un environnement non-démocratique qui a affecté négativement l'expérience partisane au Maroc. Si Maurice Duverger a défini la fonction du parti politique dans les systèmes démocratiques modernes dans la recherche du pouvoir ou du moins la volonté de participer au gouvernement, les partis politiques dans l'expérience marocaine ne rentrent pas dans cette définition ; car la nature du système politique marocain basé sur la monarchie exécutive ne permet pas aux partis d'accéder à l'exercice du pouvoir, ni exécutif ni législatif, qui ne se présentent donc que comme objets de décoration de la scène politique, en ne leur donnant que des rôles limités à la simple représentation et organisation des citoyens.
La marge de liberté accordée aux partis politiques marocains est en effet étroite. Le législateur marocain a réservé à ces partis un champ d'action et de réflexion très étroit. Il ne veut pas que le Maroc ait des partis forts qui pourraient devenir un rival de l'establishment royal et une source de menace pour son existence. Au contraire, il ne veut pour ce pays que des partis faibles qui décorent la scène politique et donnent faussement l'impression au monde qu'on est un pays démocratique et multipartite.
Les lois régissant la vie des partis dans ce pays ont depuis leur création établi deux restrictions au rôle des partis politiques. "La première consiste dans la limitation du rôle des partis politiques dans la contribution, avec d'autres organismes, à l'organisation et à la représentation des citoyens, et il s'agit là d'une diminution du rôle positif que les partis politiques peuvent jouer en tant que principal moteur de la vie politique après le roi. La seconde consiste à stopper leur fonction dans les limites de ces deux rôles sans étaler sur leurs capacités à gouverner et à exercer le pouvoir, censé être l'objectif principal des partis leur permettant de mettre en œuvre leurs programmes".
Ces deux contraintes, le spécialiste marocain en sciences politiques Mohamed Choucair a identifié leur raison en trois points :
- La nature du pouvoir au Maroc est incompatible avec l'existence de toute pratique politique qui aspire à obtenir le pouvoir ;
- Le fait que la monarchie œuvre toujours pour occuper la première place au sein du système politique marocain, et de la sorte faire barrière au reste des différentes forces politiques, inclus les partis politiques ;
- Les tentatives permanentes du pouvoir monarchique afin de limiter l'activité des phénomènes partisans : l'activité du parti a été déterminée par le régime dans un cadre étroit qui ne peut être dépassé.
Cette situation ne permet pas aux partis politiques marocains de voir au-delà de leur nez et les force à réfléchir et à s'exprimer dans un champ étroit. La volonté monarchique au Maroc n'est satisfaite qu'en accordant aux institutions partisanes du système politique marocain des fonctions politiques, la meilleure des choses qu'on puisse dire sur elles est qu'elles restent secondaires par rapport aux fonctions qu'elles exercent et aux tâches que jouent leurs homologues dans les pays occidentaux.
Des leaders politiques et des militants des partis nationaux ont défié ces restrictions qui leur étaient imposées et ont fait passer des messages et porté des slogans en particulier dans les années 60, 70 et 80, le moins qu'on puisse dire est qu'ils étaient révolutionnaires, leur sort était de souffrir et goûter à l'enfer des années de plomb. Certains d'entre eux ont été tués, d'autres ont été emprisonnés pendant de nombreuses années dans des prisons secrètes, une partie s'est échappée de ce pays de peur de tomber aux mains du régime et une autre a choisi le silence et s'est retirée de la scène politique ou a changé de peau et de veste et s'est retournée contre ses principes et ses camarades ou ses frères à 180 degrés, chose qui a fait rentrer la vie partisane marocaine dans une stagnation politique et une paralysie intellectuelle… et Seul Dieu sait quand cela prendra fin.
- Article original (en arabe) : https://ifada.ma/d-opinion/article-10689.html
(*) Fadoua Chaouqui : Chercheuse en performance politique et institutionnelle
(*) Kamal Znidar : Ecrivain néo-islamiste, chercheur en performance politique et institutionnelle