Par Fayçal Megherbi, avocat au Barreau de Paris
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Le 23 juin 2014, la 6ème Chambre de la Cour Administrative d'Appel de Marseille a rendu un arrêt sous les références n° 12MA03363 qui accorde le droit au séjour à une sœur d’une personne handicapée sur le fondement du droit à la vie privée et familiale.
Le 3 août 2012, une ressortissante marocaine dépose une requête en appel devant la Cour administrative d’appel de Marseille pour demander l’annulation du jugement n°1202259 du 10 juillet 2012 du tribunal administratif de Montpellier en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 avril 2012 du préfet de l'Hérault portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français et l’attribution d’un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale »
La Cour a apprécié les faits sur le fondement de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les principes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La ressortissante marocaine, 38 ans, est entrée en France, pour la dernière fois, en janvier 2007, pour rejoindre sa sœur malade. Le 24 février 2012, elle a demandé à être admise au séjour au titre de la vie privée et familiale. Toutefois, par arrêté du 4 avril 2012, le préfet de l'Hérault a rejeté cette demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français, au motif qu'elle ne démontrait pas que « le centre de ses intérêts privés et familiaux est établi en France, ni être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident toujours cinq de ses frères et sœurs, et que rien ne permettait d'établir que l'aide matérielle dont sa sœur pourrait avoir besoin ne pouvait être dispensée par son époux M. C...A..., ressortissant marocain titulaire d'un titre de séjour, une personne extérieure, les services sociaux ou sa sœur domiciliée.. »
La Cour a pris en considération les termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre public et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; et les principes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
Sa sœur a souffert, en 2006, d’une lésion cérébrale grave ayant conduit à la reconnaissance le 12 octobre 2007 d’une incapacité de 80%. Son état de santé nécessite une assistance quotidienne. La Cour a retenu que l’époux de la sœur de l’intéressé travaille et n’est donc pas à même d’assister son épouse et de s’occuper quotidiennement de leurs trois enfants. La Cour a estimé « que la circonstance que Najat serait également susceptible de bénéficier d’autres aides extérieures n’est pas de nature à modifier cette analyse dès que Mme B, qui s’est rendue en France dans le but d’aider sa sœur et qui réside au domicile de cette dernière, est la mieux à même d’apporter à celle-ci l’assistance requise ; que dans ces conditions, le préfet de l’Hérault a, en refusant d’admettre au séjour Mme B et en lui refusant obligation de quitter le territoire français, porté au droit de celle-ci au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels ces décisions ont été prises ; que les moyens tirés de la violation de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’inexacte application de l’article L. 313-11, 7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sont donc fondés et doivent être accueillis. »
La Cour conclut que « le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de l'Hérault délivre à Mme B... une carte temporaire de séjour portant la mention "vie privée et familiale". »
Par Fayçal Megherbi, avocat au Barreau de Paris
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