Le Temps : vous avez quitté le Tchad dans des conditions particulières. Aujourd’hui vous entendez rentrer au pays, quelles sont les garanties pour votre sécurité que les autorités françaises vous ont donné ?
Ngarlejy Yorongar : Aucune garantie ni de la France ni du Tchad. Je préfère rentrer dans mon pays même si c’est encore une fois dans la gueule du loup, Idriss Déby.
Le Temps : Qu’entendez vous faire, une fois rentré au pays ? Portez-vous plainte contre ceux qui vous ont enlevé et séquestré ?
Ngarlejy Yorongar : Une fois au Tchad, je reprendrai mes activités parlementaires. S’agissant d’une plainte contre ceux qui m’ont enlevé, séquestré et tenté de me tuer et leurs complices nationaux ou étrangers, je suis entrain de réfléchir avec mes avocats et partenaires la meilleure voie pour éviter l’impasse qu’a connue le procès qu’avaient intenté Me Jacqueline Moudeina et ses camarades contre ceux qui les ont charcutées à l’Ambassade de France, sous les yeux de l’Ambassadeur. J’attends la suite de la saisine de Nassour Glendouksia Ouaïdou et d’Idriss Déby par l’Union Interparlementaire de Genève et on verra. Sachez que dans cette affaire, en dehors de ceux qui m’ont enlevé de chez moi, séquestré dans la prison secrète de l’Ans à Farcha et tenté de me tuer au cimetière de Ngonbah, il y a des gens comme les Ministres Mahamat Bachir, Ahmad Allam-Mi, Moussa Doumngor, Mahamat Ali Abdallah, le chef de la communauté tchadienne à Maroua, le consul du Tchad à Garoua etc. qu’il faut aussi poursuivre devant les tribunaux compétents.
Le Temps : Tout semble indiquer que les combats reprendront très bientôt entre les belligérants. Jouez-vous un rôle particulier pour une solution négociée entre rebelles et gouvernement ?
Ngarlejy Yorongar : Je rentre très bientôt. Une fois surplace, je vais continuer mon offre de sortie de crise qui a failli me coûté la vie le 3 février dernier. J’irai au Soudan pour y rencontrer les autorités et si possible les opposants pour discuter de la proposition que je leur ai faite. Il faut la paix au Tchad, n’en déplaise à Idriss Déby, qui ne survit que grâce à la guerre et aux désordres. Avec ou sans Déby, il faut ramener la paix définitive au Tchad. La rupture promise en 2007 par le Président Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle en France doit passer d’abord par la paix en Afrique francophone et plus particulièrement au Tchad et ensuite par la mise à mort de la Françafrique aux relents racistes, ce machin qui permet aux nostalgiques français des temps coloniaux et de l’esclavage de se sucrer sur le dos de l’Afrique..
Le Temps : Selon vous, quel rôle doit jouer la France dans la crise tchadienne ?
Ngarlejy Yorongar : La France est un pays allié. Elle peut ramener la paix au Tchad en claquant tout simplement les doigts. Mais, elle ne veut le faire pour quelle raison on ne sait. Rappelez-vous que la France est intervenue militairement au Tchad en 1968 pour soutenir le Président François Ngarta Tombalbaye. Mais, cela n’a pas empêché un coup d’Etat militaire au cours duquel son régime renversé et lui-même tué. Elle a soutenu le Général Félix Malloum sans lui épargner l’humiliation qu’il a subie des différentes tendances du Frolinat. Elle a également soutenu Hissein Habré et fermé les yeux sur les massacres perpétrés par les militaires dirigés par un certain Idriss Déby. Aujourd’hui, elle installe et soutient Idriss Déby. Sous prétexte qu’il n’y a personne au Tchad capable de remplacer ce dernier, la France continue la même erreur que sous les précédents régimes qu’elle a soutenus, à tour de bras, jusqu’à présent. Bien plus grave, elle torpille le processus démocratique pour permettre au sieur Idriss Déby de rester au pouvoir. Donc, seule la France peut arrêter ces tueries et massacres inutile des Tchadiens plusieurs générations durant. Regardez ce qui se passe dans tous les coins d’Afrique : la guerre, la guerre, la guerre pour vendre les engins de guerre et de la morts. Pour piller l’Afrique... http://www.yorongar.com/article.php3?id_article=181