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ANALYSE

Tchad : orientation de la formation des enseignants sur les TIC, de nouvelles approches éducatives


Alwihda Info | Par Brahim Moussa M. HAGGAR - 9 Juin 2020



Brahim Moussa M. HAGGAR, ingénieur en Science de l’Éducation et Formation, spécialiste en Médiation Pédagogique. © DR
Brahim Moussa M. HAGGAR, ingénieur en Science de l’Éducation et Formation, spécialiste en Médiation Pédagogique. © DR
L’éducation et la formation sont des questions qui sont au cœur de tous les problèmes d’une nation. Non seulement à cause du capital humain considérable à former mais aussi et surtout à l’adaptation du modèle d’enseignement avec les changements qui s’opèrent dans le domaine.

Les enjeux relatifs à l’éducation se font ressentir perpétuellement et surtout remarqués par la nouvelle guerre invisible du coronavirus (COVID-19). Cette pandémie qui n’a ni frontière ni barrière a freiné toute l’économie mondiale, basculé les habitudes des personnes et a retardé le calendrier éducatif de plusieurs pays du monde, surtout celui des pays africains. Les pays subsahariens sont les plus touchés dans leur politique de l’éducation et formation par cette épidémie, et le Tchad n’en est pas du reste.

La question fondamentale que tout le monde se pose est la suivante : Ne va-t-on pas perdre cette année académique 2019-2020 ? Comment devrons nous faire pour respecter cumulativement le calendrier éducatif et les mesures barrières afin de terminer le cycle scolaire ? Quelles sont les mesures étatiques à prendre pour faciliter l’accès à l’éducation pour tous ? Voilà quelques interrogations auxquelles nous tenterons de répondre dans cet article.

La préoccupation première de tout État est de garantir la sécurité et la stabilité des biens et des personnes dans n’importe quelles situations qui adviennent. Le cas de cette pandémie en est l’exemple illustratif. Presque tous les pays du monde ont opté pour un confinement entier ou partiel. Depuis le 27 novembre 2019 à nos jours, six mois ont été écoulés et plus de 368.711 personnes sont mortes. Le 19 mars, date du début de confinement partiel au Tchad, a marqué la fin du second trimestre dans le système d’enseignement du Tchad. 

Le gouvernement du Tchad a suspendu tous les cours à l’échelle nationale pour limiter la chaine de transmission du COVID-19. Au vu des nouvelles décisions du comité scientifique pour des réponses éducatives au COVID-19, l’année scolaire ne sera pas vaine pour certains niveaux de cycles scolaires. L’urgence a été orientée d’abord pour les classes d’examen ensuite les autres en second lieu.

La mise en place d’une plateforme appelée « Tactile », la mise à disposition de ressources numériques et audiovisuelles éducatives et la formation des cadres ; Le ministère de l’Éducation nationale et de la Promotion civique a fait de son mieux pour assurer sa mission de maintenir le lien de l’enfant à l’école, avec la collaboration de la Télé-Tchad pour la transmission de cours sur un programme spécial, comprenant tous les cours de premier degré (arabe et français). Un autre travail à saluer est la coopération du ministère avec l’Agence pour le développement des technologies de l’information et communication (ADETIC), en créant une plateforme en ligne avec tous les cours et pour tous les niveaux scolaires. C'est ainsi un effort pour combler le vide d’enseignement télévisé et radiodiffusé. Cependant, un constat reste sur le rideau pédagogique, en rapport avec l’efficacité et la performance des enseignants dans la transmission de cours via la télévision. Qui dit enseignant ne dit pas forcement le maître du savoir et l'artisan de sa dispensation. Il faut nécessairement rendre plus habile et outillé l’enseignant à cette nouvelle forme d’enseignement à savoir : comment gérer une classe en ligne, répondre aux questions, le suspense pour la vérification, utiliser des applications pour démontrer des exemples surtout technique et scientifique, synthèse de chaque cours (suivi et évaluation à mi-parcours), comment utiliser un tableau tactile ou tableau blanc interactif, préparation de cours, d’exercices, manipulation pédagogique, etc. Bref, toutes les interrogations qui minent la pédagogie numérique. 

Cette pandémie est un exemple idéal et ponctuel pour nous rappeler l’importance des Nouvelles Technologies de l’Information et Communication (NTIC) dans l’éducation et la formation. Il y a une entrave très fréquente sur l’adaptation de l’enseignant à l’utilisation des outils didactiques numériques ou génériques, et du sujet à l’acquisition de la connaissance transmisse.

La COVID-19 est un mal nécessaire pour nous rappeler ipso facto à l’augmentation du coût de l’éducation virtuelle et aussi surtout sur la formation des enseignants à l’usage des outils didactiques numériques. Beaucoup pensent que l’enseignant n’a pas besoin de renforcement des capacités car il est au summum de la connaissance. Quand la technologie et l’éducation se retrouvent, il y a lieu de former le personnel éducatif et au premier niveau les enseignants sur l’usage, la maniabilité des outils didactiques numériques (l’ordinateur, vidéo projecteur, tableau tactile, tableau blanc interactive, les logiciels éducatifs, les applications, etc.). En somme, élaborer un plan de formation a visé plus technique.

La grande partie du corps enseignant est plus sur le système d’enseignement ancien avec un modèle pédagogique actif (présentiel) où le maître est devant et l’enfant doit suivre l’enseignement. Point de discussion et encore moins de nouveauté. Hors l’évolution de la pédagogie suit l’évolution de l’homme et de son environnement. Il faut une adaptation de l’enseignement aux dispositifs nouveaux qui l’entourent. Le constat de la société africaine fait que s’il y a un enseignement, c’est forcément en présentiel, c’est-à-dire sur table banc. Le but de tout enseignement c’est la transmission du savoir et non pas le cadre dans lequel il s’effectue qui importe le plus. Alors il faut un équilibre entre enseignement-apprentissage et outil technologique.

Une salle de classe dans le 7ème arrondissement de N'Djamena. Illustration. © D.H./Alwihda Info
Une salle de classe dans le 7ème arrondissement de N'Djamena. Illustration. © D.H./Alwihda Info
C’est pourquoi, il faut que nous, nous tournions vers une éducation numérique pour tous, non seulement pour assurer la mouvance dans le domaine, mais aussi et surtout pour amener l’enfant ou l’apprenant à une prise de conscience sur l’utilité de toute éducation dans le face-à-face pédagogique. Un aperçu différent sur une nouvelle forme d’acquisition du savoir, une nouvelle façon de s’auto-former. Mais pour que le sujet puisse véritablement apprendre, il faut aussi des enseignants de qualité. Et les recherches en éducation établissent une corrélation entre « l’effet enseignant » et la performance des élèves. Les progrès des élèves dépendent de manière significative du talent et de la compétence des enseignants. Ces compétences professionnelles sont visées et acquises par la formation. Autrement dit, de la qualité de la formation des enseignants dépend le niveau d’acquisition des apprentissages des élèves. Par conséquent, le contexte actuel de COVID-19 nous rappelle que la formation des enseignants en cohérence avec les mesures barrières nécessite des matériels d’accompagnement et une vague de cordes à former à l’initial et en continu. Il faut aussi souligner que la grande majorité des enfants ne disposent pas des outils d’enseignements TIC (ordinateur, tablettes) et encore moins ceux des provinces. Pour que la carte scolaire soit représentative dans la distribution des matériels technologiques (au ratio d'un élève, une tablette) à l’échelle nationale et éviter toutes discriminations ou inégalités de chance ; il faut d’abord commencer par la formation des enseignants formels et sur la transmission des cours à distance. En même temps, il faut recenser et offrir un programme de formation pour les enseignants qui dispensent dans les écoles privées.

Cette situation exige donc des instruments de gestion du système de formation plus systématique et plus sophistiqués. Donc le gouvernement doit allouer un fond spécial suffisant et à échéance escomptée pour la satisfaction effective des matériels TIC et de l’internet dans toute l’étendue du territoire pour la bonne gestion du système d’enseignement, comme l’exemple de la Tunisie avec leurs fameux programme appelés « Solution numérique pour Tous » et dont l’objectif est de promouvoir l’intégration des outils numériques dans le processus d’apprentissage, d’étendre l’accès aux ressources numériques à tous les élèves et d’exploiter les technologies numériques au service de la réussite scolaire, de l’innovation pédagogique et de l’exercice de la citoyenneté. Mieux encore le cas du Rwanda avec le programme d’équiper toutes ses écoles publiques de « salle de classe intelligente » dont l’objectif est de révolutionner les systèmes d’enseignement et d’apprentissage en intégrant la technologie dans le processus éducatif, de la préparation des cours à leur délivrance, les évaluations ou la recherche.

Chaque pays à son rythme d’évolution en fonction des maux qui le gangrènent. Nous aussi nous devons plus nous approprier cette opportunité technologique qui est accessible à tous les pays du monde. Nous disposons des structures adéquates et qualifiées pour assurer ce défi du 21ème siècle, notamment l'ADETIC, l’Agence pour la Promotion des Initiatives Communautaires en Éducation (APICED), le Centre National de Curricula (CNC), le Centre de Formation Continu (CFC), l'École Normale d’Instituteurs (ENI), le Centre d’Apprentissage (CA), le Centre National de Formation Professionnelle et du Perfectionnement (CNFPP), le Centre National de l’Éducation Pour Tous (CNEPT), etc. Le Tchad dispose d'un plus grand nombre de structures éducatives et autres appropriées dans chaque secteur prioritaire de l’éducation. Maintenant, l’effort qui reste à conjuguer réside sur la gouvernance de la politique éducative et un fond d’appui à la vulgarisation des TIC à l’éducation et à la formation sur une projection donnée mesurable et atteignable. Toutes ces structures doivent nous permettre de :

• Mettre en place un programme de formation des enseignants en TIC sur toute l’étendue du territoire national ;
• Actualiser le curriculum de formation des enseignants ayant accès sur la pédagogie numérique ;
• Doter les structures de formation des outils didactiques numériques nécessaires et améliorer les conditions de vie des enseignants ;
• Assurer l’accès à l’internet (réglementé, orienté et cadré) dans toutes les structures éducatives publiques et privées ;
• Coordonner la formation initiale et continue des enseignants ;
• Mettre en place une plateforme pour la création « portfolio » de chaque élève et étudiant ;
• Doter ou subventionner les matériels technologiques à savoir : l’ordinateur, tablette, à chaque élève et étudiant ;
• Augmenter le budget de fonctionnement de l’université virtuelle du Tchad et mettre en place une plateforme pour synchroniser les autres universités publics, privés, écoles et instituts pour la transmission de cours en ligne, accessible à tous les niveaux.

Publié par :
Brahim Moussa M. HAGGAR, ingénieur en Science de l’Éducation et Formation, spécialiste en Médiation Pédagogique de l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD) au département de l’École Supérieure d’Économie Appliquée (ESEA-Ex-ENEA) de Dakar/Sénégal. Enseignant-Chercheur et actuel chargé de l’Éducation à l’association Future Team Tchad (FFT).
E-mail : [email protected]


Note :
1- https://books.google.Td
2- http://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf000144972
3- http://www.ledevoir.com/documents/special/20-03_covid19-carte-dynamique/index.html
4- http://www.guide-metiers.ma/metier/enseignant
5- https://scholar.google.com/scholar?q=pédagogie+du+numérique&hl=fr&as_sdt=0&as_vis=1&oi=scholart#d=gs_qabs&u=%23p%3D3p150SiECxwj
6- http://www.erudit.org/fr/revues/rse
7- http://blogs.worldbank.org/fr/arabvoices/tunisia-technology-support-school-improvement
8- http://afrique.latribune.fr/africa-tech/2018-04-21/le-rwanda-ambitionne-d-equiper-toutes-ses-ecoles-de-salles-de-classe-intelligentes-776214.html



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