Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Secrétaire Général adjoint des Nations Unies, Jeffrey Feltman,
Monsieur le Secrétaire Général Exécutif du Service Européen d’Action Extérieure, Ambassadeur Pierre Vimont,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les chefs de délégation,
Mesdames et Messieurs les délégués,
Chers invités,
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais tout d’abord m’acquitter d’un devoir : celui de vous transmettre les regrets de Madame la Présidente de la Commission de l’Union africaine, Dr. NKosazana Dlamini-Zuma, qui aurait voulu être des nôtres aujourd’hui. Des engagements antérieurs et les multiples urgences sur le continent en ont décidé autrement.
Permettez-moi ensuite, au nom de la Commission de l’Union africaine, de la délégation qui m’accompagne et en mon nom propre, d’exprimer notre profonde gratitude au peuple et au Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire pour l’accueil chaleureux et les marques d’hospitalité dont nous sommes entourés depuis notre arrivée en cette généreuse terre africaine qu’est l’Algérie.
Vous me permettrez, également, de remercier l’Algérie d’avoir pris l’initiative, en sa qualité de Président du Conseil de paix et de sécurité pour le mois de juin 2013, d’inscrire dans le programme de travail mensuel cette réunion ministérielle sur le thème « La réconciliation nationale, facteur crucial pour la sécurité, la stabilité et le développement durable en Afrique ».En cette année cinquantenaire de l’Organisation de l’unité africaine, ancêtre de l’Union africaine, ce thème nous offre assurément l’occasion d’évaluer les instruments de réconciliation nationale mis en place par l’Afrique et expérimentés dans lecadre de nos efforts de prévention, de gestion et de règlement des conflits sur le continent. La discussion de ce thème, qui fait partie du patrimoine civilisationnel des peuples de notre continent, se veut tout à la fois une contribution à la célébration des valeurs référentielles de l’Afrique et un pari volontariste sur sa capacité à trouver en elle- même les ressorts de solutions justes et équitables lui permettant de transcender des conjonctures difficiles.
D’évidence, la réconciliation nationale a le potentiel d’être, en fonction des circonstances, un instrument de prévention des conflits, un moyen de solution de crises et de conflits, ainsi qu’un véhicule d’actions pour la reconstruction post-conflit et la consolidation de la paix.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Le Protocole relatif à la création du CPS, en son article 14, demande au Conseil de paix et de sécurité d’assister les pays émergeant de conflit en vue de la reconstruction politique, sociale et économique de la société,dans le cadre d’une démarche de consolidation de la paix. En somme, il s’agit pour le CPS d’apporter son appui aux efforts visant à reconstruire un tissu social abimé par le conflit et à consolider les bases du développement économique du pays considéré en tant que nécessité pour éviter une rechute préjudiciable dans les crises et conflits.
C’est dans cette perspective que s’inscrivent toutes les entreprises de réconciliation nationale. Il s’agit d’amener les fils et les filles d’une même nation qu’un conflit violent a opposé en un moment donné à accepter de se remettre ensemble et de travailler collectivement au raffermissement et à la consolidation du lien national. En cela donc, la réconciliation nationale est toujours un exercice collectif douloureux et politiquement difficile. Car comment faire accepter à la victime qu’elle doit pardonner ? Comment amener les auteurs d’exactions et de violences à reconnaitre leurs actes ? Comment pardonner et se faire pardonner sans remettre en cause le principe de la lutte contre l’impunité, tel qu’affirmé dans l’Acte constitutif de l’UA ?
De fait, l’UA conçoit la réconciliation nationale comme étant inséparable de la justice et de la lutte contre l’impunité. A travers l’Acte constitutif et d’autres instruments pertinents, l’UA a clairement marqué son engagement à lutter contre l’impunité.
Dans les processus de paix difficiles en cours en différentes parties du continent, il s’agit de trouver le bon équilibre entre la recherche de la paix et l’impératif de la justice et de la réconciliation. C’est la quête de cet équilibre qui a motivé la création, en 2008, du Groupe de haut niveau de l’UA sur le Darfour, dont le rapport, rendu public en octobre 2009, s’est employé à promouvoir une approche holistique visant à faire en sorte que l’entreprise de promotion de la paix et de la réconciliation, d’une part, et l’obligation de rendre justice aux victimes, d’autre part, se renforcent mutuellement.
Excellences,
Mesdames et Messieurs
En Afrique, la réconciliation nationale, en dépit des difficultés qu’elle peut susciter, fait partie intégrante de notre approche de la consolidation de la paix dans les pays émergeant de conflits.
A dire vrai, la réconciliation participe aussi de la prévention des conflits. Une société véritablement réconciliée s’immunise, pour ainsi dire, contre tout risque de rechute dans la violence. De même, la promesse de réconciliation et l’idée de pardon qui l’accompagne constituent un puissant levier pour faciliter le règlement de conflits marqués par un niveau élevé de violence, de souffrance et de ressentiment. Elles permettent de créer le minimum de confiance nécessaire pour permettre aux acteurs concernés de prendre le risque de la paix et de rechercher les garanties et la protection dont ils ont besoin dans le cadre d’un système politique apaisé et inclusif.
C’est par la réconciliation nationale que les différentes composantes de la nation sud-africaine ont accepté, sous la conduite de Nelson Mandela et de Frederick De Klerk, de s’unir dans une nation arc en ciel, après d’indicibles souffrances infligées à la population noire sous le régime d’Apartheid. Le règlement des conflits au Rwanda, au Liberia, en Sierra-Leone et en Côte d’Ivoire récemment ont également été l’occasion d’autres expériences de réconciliation nationale.
Ici même en Algérie, la politique de la Concorde civile conduite par le Président Abdelaziz Bouteflika a permis de ressouder la nation algérienne face au fléau du terrorisme et de l’extrémisme religieux.Au Mali, un processus de réconciliation nationale contribuera grandement à reconstituer le tissu national mis à mal par des déchirures profondes liées à la crise multidimensionnelle que connait le pays.
La réconciliation, faut-il le souligner, implique aussi une action concrète pour répondre aux besoins les plus pressants des populations affectées par la violence. Des populations mises à l’abri du besoin sont plus enclines à pardonner et à se tourner vers l’avenir. Cette dimension de la réconciliation met en relief l’importance que revêtent la reconstruction et le développement post-conflit.
Notre Union est outillée en termes d’instruments pour relever ce défi. Il s’agit maintenant de mobiliser la volonté politique requise pour donner effet à ces instruments, notamment le Cadre d’action sur la reconstruction et le développement post-conflit adopté à Banjul en juin 2006 et l’Initiative de solidarité africaine, lancée à Addis-Abeba, en juillet 2012.
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
L’Afrique a connu plusieurs expériences de réconciliation nationale, chacune avec ses spécificités propres, mais qui ont toutes permis aux peuples concernés de jouir des bienfaits de la concorde et de s’engager sur la voie de la consolidation de l’unité nationale, afin de pouvoir relever, dans la paix et l’unité, les défis les plus importants pour nos peuples : vivre à l’abri de la peur et du besoin, dans un Etat de droit respectueux des droits de l’homme.
Au-delà de certaines spécificités liées au contexte de chaque pays, toutes les expériences de réconciliation nationale cherchentà répondre à trois défis majeurs : retrouver une paix durable, pardonner tout en rendant justice et mettre en place des mécanismes pour éviter de retomber dans les mêmes divisions fratricides.Les expériences de réconciliation nationale ont apporté une contribution appréciable à la consolidation de la paix et, selon le cas, à la lutte contre l’impunité sur le continent, à travers notamment des mécanismes de justice transitionnelle.
La Commission de l’UA, en étroite coopération avec le Conseil de paix et de sécurité et les autres organes, telle que la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, continuera à valoriser les leçons et enseignements tirés de ces différentes expériences, en vue de consolider la culture de la paix sur le continent, pour que les filles et les fils de l’Afrique consacrent toutes leurs énergies au combat de la démocratie et du développement en tant que contribution à la renaissance de l’Afrique que nous appelons de tous nos vœux.
Je vous remercie de votre aimable attention.