Décidément, il devient de plus en plus impossible d’obtenir ne serait-ce qu’un point de vue optimiste sur l’avenir de la Centrafrique. On n’a pas besoin d’un verre correcteur ni de placer la main en visière pour apercevoir de très loin la lueur d’espoir d’une Centrafrique féconde. Quasiment tous les analystes demeurent dubitatifs sur l’évolution positive de la situation contemporaine du pays. Déjà, la communauté internationale rechigne à octroyer une aide financière à la Centrafrique en dépit du marasme économique sans précédent qu’elle traverse. Lorsqu’on apprend que le Mali recevra dans un bref délai la somme fatidique de 1000 milliards d’euro pour sa reconstruction alors que la Centrafrique peine à rassembler 6 milliards de francs Cfa pour panser ses plaies, il y’a lieu d’abreuver d’invectives cette nébuleuse qui se cache derrière la coalition Seleka. Malgré la précarité sociale abracadabrante, le nouvel homme fort de Bangui ne cache pas son ambition démesurée de s’arc-bouter au pouvoir.
Dès les premières heures de la prise du pouvoir par le nouvel homme fort de Bangui, il s’était confié au micro du journaliste de la Télévision Vox Africa sur le retour à l’ordre constitutionnel en ces termes : « Je ne dis pas que je remettrai le pouvoir d’ici trois ans, mais d’ici trois ans nous allons organiser les élections ». L’analyse approfondie de l’intervention du Chef de la transition devant le tribunal de la raison offre plusieurs pistes de réflexions. D’abord, le président autoproclamé sème le doute sur la probabilité d’une éventuelle candidature le concernant à l’issue de la transition. Ensuite, il a juste usé de son habilité légendaire pour ne pas prendre une position qui puisse le contrarier avec le temps. Enfin ses multiples nominations à tout va complètent les inquiétudes élucidées ci haut et laissent présager l’idée sous-jacente d’un président de la transition qui cherche à avoir la main sur l’appareil d’état.
En toute vraisemblance, si le président de la transition n’a aucune envie de s’agripper au pouvoir, il ne devait pas avoir la langue de bois et entretenir ainsi le doute. Il semble que ses nombreuses nominations portent à suspicion alors que la période transitoire nécessite une union nationale. On a même l’impression que le président de la transition dirige plutôt le pays pour un mandat quinquennal. Erreur ! Est-ce un amalgame sciemment voulu ou une technique d’émiettement du terrain de la chose publique ? A contrario, cette stratégie coupe énormément l’herbe sous les pieds de tous les hommes politiques qui soutiennent en ce net moment la junte au pouvoir et qui convoitent par la même occasion la magistrature suprême. Il n’est guère un secret de polichinelle que la communauté internationale isole par tous les moyens le nouvel homme fort de Bangui.
Conscient de cette situation de fait, il exploite avec sagacité les portefeuilles relationnels de ses mentors dans l’unique but de créer une ambiance bonne enfant entre lui et la communauté internationale. Assurément, le président de la transition est un vieux briscard de la vie politique centrafricaine qui a entre temps trainé sa bosse à travers tous les régimes. Couturé de cicatrices politiques, il dispose une longueur d’avance sur tous les hommes politiques du pays. Très habile, il incarne quelques fois la politique molle mais il sait s’envoler comme une poussière ocre et collante. De surcroît, il sait surprendre tous ceux et celles qui le sous- estiment. Le seul fait qu’il s’était autoproclamé président au grand dam des vrais financiers de la coalition a été un exemple palpable. Certes ! Le nouvel homme fort de Bangui capitalisera seul l’effet positif de cette période transitoire.
En revanche, si jamais la transition tournerait à un drame, il partagerait ses méfaits avec tous les leaders politiques qui l’ont soutenu mordicus. Toutefois, on constate que la plupart des orientations du Gouvernement proviennent des partis politiques qui sont de mèches avec la junte au pouvoir. Le cas le plus marquant est l’évocation de l’approche judiciaire de l’ancien locataire du palais de la renaissance par un leader politique proche des nouvelles autorités de Bangui sur le plateau d’une chaîne internationale. Peu de temps après, cette intention deviendra le credo du système en place. Est-ce une coïncidence, un agenda partagé ou une gouvernance trilogique ? Silence radio.
Rodrigue Joseph Prudence MAYTE
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