En fouillant nos archives, nous avons retrouvé cette excellente interview riche en enseignements que le colonel (er) Joseph Potin nous avait accordée en 2007, c’est-à-dire dix ans après son départ à la retraite. Une interview que nous avons le plaisir de republier in extenso et qui conforte notre article relatif aux nombreux colonels partis à la retraite dans la dignité sans être obnubilés par les étoiles de général.
« Ancien sous-chef d’Etat major des Armées et actuel président de la Fédération sénégalaise de Tir, le colonel Joseph Potin fait partie des nombreux officiers ayant toujours rêvé de devenir « Général ». À l’arrivée, il voit son rêve brisé puisqu’il est allé à la retraite en 1998 avec les galons de « Colonel » après 38 ans de bons et loyaux services. Destin ou rêvé brisé ? Il se confie au « Témoin »…
Le Témoin : Mon colonel comment vivez-vous votre retraite ?
Joseph Potin : Je remercie le Bon Dieu de m’avoir encore donné la vie et la santé de mener une retraite bien dorée. Après de bons et loyaux services rendus à l’Armée sénégalaise, je continue mes activités dans la vie civile puisque je suis le président de la fédération sénégalaise de Tir, vice-président de la fédération africaine de Tir et, entre autres, membre du Cnoss. Vous voyez, aussi bien dans l’Armée que dans la vie civile, j’ai eu tous les honneurs et distinctions. Donc, il y a de quoi remercier le Bon Dieu !
Dix ans après votre départ à la retraite, certaines indiscrétions laissent entendre que vous étiez à l’époque dans le tableau des promus au grade de Général, à l’arrivée point d’étoiles ! N’étiez-vous pas déçu ?
Écoutez, je suis toujours tenu par l’obligation de réserve puisque j’étais dans une Armée organisée, républicaine et disciplinée. Et comme j’étais formé à bonne école, je ne peux pas dire certaines choses. Mais si je vous dis que je n’étais pas déçu à l’époque, je serais hypocrite ! Vous savez, tout le monde ne peut pas être général puisque le mérite et l’excellence d’un officier s’arrêtent au grade de colonel. Mieux, l’accession au rang de Général relève du pouvoir discrétionnaire du président de la République. Fort de cette philosophie, j’avais réussi à maintenir mon équilibre mental pour ne pas disjoncter. D’ailleurs à l’époque, mes anciens vous le diront, j’avais décliné l’offre d’une cérémonie d’adieu parce que je me sentais frustré. Après coup, je m’étais dit que c’était mon destin. Et Dieu avait déjà fait et tracé ma carrière militaire qui devait s’arrêter au grade de colonel. Heureusement que la vie ne s’est pas arrêtée là !
Comment votre épouse et vos enfants avaient vécu cette situation c’est-à-dire d’avoir vu des « étoiles filantes » qui vous filaient entre les épaules ?
Ils étaient tristes ! Finalement, dans leur conscience, ils avaient tous reconnu que je suis parti avec le sentiment du devoir accompli…
Propos recueillis par :
Pape NDIAYE
(Archives : « Le Témoin » année 2007)
Article paru dans « Le Témoin N° 1175 » –Hebdomadaire Sénégalais ( AOUT 2014)