Par Pape NDIAYE
Dans la lointaine banlieue constituée par des villes ou quartiers comme Pikine, Thiaroye, Guédiawaye etc., comme dans les quartiers de la proche banlieue (Grand-Yoff, Parcelles Assainies, Dalifort et autres), le phénomène de la lutte avec frappe et son corollaire, la violence urbaine, produisent des effets traumatiques. Et suscitent un sentiment de stigmatisation et de marginalisation. Car, dans l'imaginaire des Dakarois des beaux quartiers, la banlieue est par excellence et depuis toujours un monde en marge c’est-à-dire qui ne compte que des lutteurs, des agresseurs et des marginaux. Et ce même si des élèves et des étudiants de cette périphérie ne cessent de briller sur tous les plateaux de l’excellence. La preuve par le lycée Seydina Limamoulaye de Guédiawaye qui, chaque année, truste les premiers prix lors du prestigieux Concours général qui met en compétition la crème de notre système scolaire. De plus, malgré la mauvaise réputation qui leur colle à la peau, tous les jeunes de cette banlieue ne veulent pas être comme Balla Gaye 2, Modou Lo, Baye Mandione, Boy Niang, Eumeu Sène et autres lutteurs monnayant leur force pour réussir. Sans oublier les Abatabib Samb « Ino », Boy Djiné et autres « Mbaye Pakaa » rendus célèbres pour leur banditisme. Toujours est-il que les jeunes élèves et étudiants de Thiaroye-gare se sont démarqués du lot des « gros bras », montagnes de muscles et autres porteurs de machettes, pour faire valoir leurs capacités intellectuelles et hisser vers l’élite de futurs cadres. Pour ce faire, ils ont créé une Amicale pour la promotion des élèves et étudiants de Thiaroye (Apeet). Une structure qui a pour objectif l’amélioration des conditions de vie et d’études des élèves et étudiants de la localité. L’Apeet compte regrouper tous les élèves et étudiants afin qu’ils puissent se connaître et renforcer les liens qui les unissent. Surtout, elle compte « promouvoir l’Ecole sénégalaise et contribuer à son rayonnement dans l’espoir de convaincre tous les parents d’inscrire leurs enfants et les encourager sur le chemin de l’école ». Ses membres se disent également engagés dans la lutte contre les grossesses et mariages précoces, facteurs d’abandon. C’est en tout cas ce que nous a confié M. Moustapha Mbengue, vice-président de l’Afeet et étudiant en 7ème année de médecine à l’Ucad.
Depuis sa création, dit-il, l’Apeet n’a jamais cessé d’apporter sa pierre à l’édifice d’une localité voire d’une société de valeurs, de savoir et de responsabilité. « Malheureusement, les élus locaux ne nous ont jamais soutenus. Surtout le maire de Pikine, Pape Sagna Mbaye, et le maire de Thiaroye, Alioune Badara Diouck qui n’ont rien fait pour nous accompagner. Rien n’a été fait ou réalisé dans notre commune ! » se désole M. Mbengue au nom de l’Apeet. Et de souligner que « paradoxalement, c’est le maire des Parcelles Assainies, M. Moussa Sy, qui nous donne aide et assistance dans nos activités. Sans oublier Aziz Bouderballah qui nous soutient beaucoup ! » ajoute Serigne Ndiaye dit Niokho, étudiant et membre de l’Afeet tout en magnifiant les cours de renforcement que l’Amicale dispense aux élèves et étudiants de la localité. « Pendant les grandes vacances, nous organisons des cours moyennant 1.500 FCFA par élève pour pouvoir financer nos activités sociales et pédagogiques » explique Serigne Ndiaye.
Dans le but d’améliorer les conditions de vie et d’études de l’ensemble des étudiants et élèves de Thiaroye-gare et quartiers environnants, l’Apeet réclame une bibliothèque communale, histoire d’étancher la soif de connaissances de ses membres. « Dans toute la localité, il n’y a pas de bibliothèque, c’est une honte pour une commune aussi vaste que Thiaroye-Gare ! Parfois, les élèves et étudiants squattent la bibliothèque de l’église catholique de Thiaroye-Gare ou vont jusqu’à Yeumbeul pour se documenter » nous explique Moustapha Mbengue.
Au moment où lutteurs et promoteurs réclament une arène jusqu’à avoir obtenu une promesse ferme, les élèves et étudiants de Thiaroye, eux, courent depuis plus de 20 ans derrière une bibliothèque communale. Aujourd’hui, on vient de comprendre pourquoi les populations de cette banlieue veulent faire dégager leurs maires et autres élus locaux. À Aliou Sall ou au futur candidat à la mairie de Guédiawaye, « Le Témoin » lui souffle qu’il y a vraiment de la place à prendre dans cette localité de la banlieue !
Pape NDIAYE
« Le Témoin » N° 1154 –Hebdomadaire Sénégalais ( FEVRIER 2014)