N'DJAMENA, 2 février 2009 (IRIN) - A N’Djamena, capitale du Tchad, quelque 10 000 à 15 000 personnes ont été expulsées de leur domicile dans le cadre d’un programme public de démolition de logements qui, selon les autorités, se trouvent sur des terrains appartenant à l’Etat. Les démolitions, démarrées en 2008, sont en cours.
« On voit des quartiers entiers, où toutes les maisons sont marquées d’une croix blanche, pour être démolies », a expliqué Merlin Totinon Nguébétan du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-HABITAT) au Tchad. « Au moment où je vous parle, des bulldozers sont en train de démolir des maisons ».
Les habitants qui ont perdu leurs logements ont dit à IRIN qu’ils n’avaient reçu aucune indemnisation, ni aucune aide au relogement de la part du gouvernement.
« On ne nous a pas proposé d’argent pour la maison », a déclaré Ousmane Atief, dont la maison, située dans le quartier de Mursal, a été démolie le 23 janvier, a-t-il dit, environ un mois et demi après le marquage du bâtiment.
Certaines familles ont vu leur foyer démoli à peine quelques semaines après le marquage. « Nous avons essayé de calculer la valeur des logements, en fonction du nombre de pièces, mais personne n’est venu ici pour nous poser des questions à ce sujet », a poursuivi M. Atief.
Comme la plupart des familles expulsées, M. Atief et les 18 membres de sa famille ont fouillé dans les décombres pour récupérer quelques affaires, avant d’aller s’installer chez des parents.
La plupart des déplacés sont hébergés par des membres de leur famille, mais certains dorment dehors, ont indiqué les habitants de N’Djamena. D’autres retournent dans leur village d’origine.
Selon Ahmat Bashir, ministre de l’Intérieur, le gouvernement revendique simplement des terres qui appartiennent à l’Etat. Certains expulsés ont néanmoins montré à IRIN ce qui semblait être des titres de propriété, et ont appelé les magistrats à intervenir en leur nom. Mais bon nombre de déplacés, installés sur ces terres au fil du temps, ne possédent pas de titres de propriété.
Conséquences sociales
Entre autres problèmes, le gouvernement n’avait pas contrôlé l’installation de ces populations à l’époque, selon M. Nguébétan, d’ONU-HABITAT. « Et ce n’est que maintenant qu’ils expulsent les gens ».
Même si une municipalité a le droit d’expulser des squatteurs pour construire sur des terrains publics, a-t-il expliqué, les autorités doivent accompagner leur démarche de mesures visant à éviter le désordre et à empêcher que les personnes expulsées ne deviennent sans-abris.
M. Nguébétan, urbaniste de profession, a expliqué que le gouvernement tchadien avait conçu un programme de développement urbain, avec l’aide d’ONU-HABITAT et du Programme des Nations Unies pour le développement, mais que les lois sur l’urbanisme n’avaient pas encore été promulguées. « Sans ces [lois], il est difficile de maîtriser la situation ».
Injustice
Des magistrats ont informé IRIN qu’ils avaient tenté d’empêcher les démolitions pour les personnes affirmant être titulaires des documents requis, mais que les autorités locales avaient ignoré leurs appels à suspendre les opérations le temps d’étudier leurs cas. Le syndicat de la magistrature menace de faire grève pour protester.
« Si ça continue, notre système de justice n’aura plus aucune crédibilité », s’est indigné Mahamat Tadjadine, secrétaire général du Syndicat des magistrats du Tchad. « On ne fait aucun cas du processus juridique. Quelles conséquences cela aura-t-il sur l’image du Tchad, en particulier aux yeux des investisseurs ? ».
Malgré les tentatives répétées d’IRIN, le maire de N’Djamena n’a pas souhaité livrer de commentaires sur les allégations selon lesquelles les démolitions seraient illégales.
D’après M. Bashir, ministre de l’Intérieur, les autorités récupèrent uniquement des terres appartenant à l’Etat, sur lesquelles aucune construction n’aurait dû être entreprise. Le gouvernement dit avoir besoin de terrains pour mener de nouveaux projets de développement. Une maternité est notamment en cours de construction sur des terrains évacués par le gouvernement l’année dernière.
« Cela fait partie du travail habituel de la mairie », a déclaré M. Bashir à IRIN. « Si des personnes vivent sur des terrains qui appartiennent à l’Etat, elles doivent quitter les lieux. Ces terrains ne leur appartiennent pas et elles ne seront pas indemnisées ».
Le repaire des rebelles ?
Certains Tchadiens supposent néanmoins que ces démolitions, qui ont débuté peu après la tentative de coup d’Etat du début 2008, ont pour but de bouter les rebelles hors de la capitale.
Depuis plusieurs années, en effet, le gouvernement fait face aux attaques de groupes rebelles. « Certaines personnes pensent que le but véritable est plutôt de tenter de découvrir où habitent les rebelles qui semblent encore se trouver dans la ville », a estimé Jacqueline Moundeina, avocate spécialiste des droits humains.
« Un jour [les gendarmes] sont venus et nous ont dit que nous cachions des rebelles chez nous ; ils nous ont donné deux semaines pour partir. Nous avons tout perdu : les lits, les meubles, tout », a déclaré à IRIN Ismael Haj Madiri, un habitant de N’Djamena.
« On voit des quartiers entiers, où toutes les maisons sont marquées d’une croix blanche, pour être démolies », a expliqué Merlin Totinon Nguébétan du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-HABITAT) au Tchad. « Au moment où je vous parle, des bulldozers sont en train de démolir des maisons ».
Les habitants qui ont perdu leurs logements ont dit à IRIN qu’ils n’avaient reçu aucune indemnisation, ni aucune aide au relogement de la part du gouvernement.
« On ne nous a pas proposé d’argent pour la maison », a déclaré Ousmane Atief, dont la maison, située dans le quartier de Mursal, a été démolie le 23 janvier, a-t-il dit, environ un mois et demi après le marquage du bâtiment.
Certaines familles ont vu leur foyer démoli à peine quelques semaines après le marquage. « Nous avons essayé de calculer la valeur des logements, en fonction du nombre de pièces, mais personne n’est venu ici pour nous poser des questions à ce sujet », a poursuivi M. Atief.
Comme la plupart des familles expulsées, M. Atief et les 18 membres de sa famille ont fouillé dans les décombres pour récupérer quelques affaires, avant d’aller s’installer chez des parents.
La plupart des déplacés sont hébergés par des membres de leur famille, mais certains dorment dehors, ont indiqué les habitants de N’Djamena. D’autres retournent dans leur village d’origine.
Selon Ahmat Bashir, ministre de l’Intérieur, le gouvernement revendique simplement des terres qui appartiennent à l’Etat. Certains expulsés ont néanmoins montré à IRIN ce qui semblait être des titres de propriété, et ont appelé les magistrats à intervenir en leur nom. Mais bon nombre de déplacés, installés sur ces terres au fil du temps, ne possédent pas de titres de propriété.
Conséquences sociales
Entre autres problèmes, le gouvernement n’avait pas contrôlé l’installation de ces populations à l’époque, selon M. Nguébétan, d’ONU-HABITAT. « Et ce n’est que maintenant qu’ils expulsent les gens ».
Même si une municipalité a le droit d’expulser des squatteurs pour construire sur des terrains publics, a-t-il expliqué, les autorités doivent accompagner leur démarche de mesures visant à éviter le désordre et à empêcher que les personnes expulsées ne deviennent sans-abris.
M. Nguébétan, urbaniste de profession, a expliqué que le gouvernement tchadien avait conçu un programme de développement urbain, avec l’aide d’ONU-HABITAT et du Programme des Nations Unies pour le développement, mais que les lois sur l’urbanisme n’avaient pas encore été promulguées. « Sans ces [lois], il est difficile de maîtriser la situation ».
Injustice
Des magistrats ont informé IRIN qu’ils avaient tenté d’empêcher les démolitions pour les personnes affirmant être titulaires des documents requis, mais que les autorités locales avaient ignoré leurs appels à suspendre les opérations le temps d’étudier leurs cas. Le syndicat de la magistrature menace de faire grève pour protester.
« Si ça continue, notre système de justice n’aura plus aucune crédibilité », s’est indigné Mahamat Tadjadine, secrétaire général du Syndicat des magistrats du Tchad. « On ne fait aucun cas du processus juridique. Quelles conséquences cela aura-t-il sur l’image du Tchad, en particulier aux yeux des investisseurs ? ».
Malgré les tentatives répétées d’IRIN, le maire de N’Djamena n’a pas souhaité livrer de commentaires sur les allégations selon lesquelles les démolitions seraient illégales.
D’après M. Bashir, ministre de l’Intérieur, les autorités récupèrent uniquement des terres appartenant à l’Etat, sur lesquelles aucune construction n’aurait dû être entreprise. Le gouvernement dit avoir besoin de terrains pour mener de nouveaux projets de développement. Une maternité est notamment en cours de construction sur des terrains évacués par le gouvernement l’année dernière.
« Cela fait partie du travail habituel de la mairie », a déclaré M. Bashir à IRIN. « Si des personnes vivent sur des terrains qui appartiennent à l’Etat, elles doivent quitter les lieux. Ces terrains ne leur appartiennent pas et elles ne seront pas indemnisées ».
Le repaire des rebelles ?
Certains Tchadiens supposent néanmoins que ces démolitions, qui ont débuté peu après la tentative de coup d’Etat du début 2008, ont pour but de bouter les rebelles hors de la capitale.
Depuis plusieurs années, en effet, le gouvernement fait face aux attaques de groupes rebelles. « Certaines personnes pensent que le but véritable est plutôt de tenter de découvrir où habitent les rebelles qui semblent encore se trouver dans la ville », a estimé Jacqueline Moundeina, avocate spécialiste des droits humains.
« Un jour [les gendarmes] sont venus et nous ont dit que nous cachions des rebelles chez nous ; ils nous ont donné deux semaines pour partir. Nous avons tout perdu : les lits, les meubles, tout », a déclaré à IRIN Ismael Haj Madiri, un habitant de N’Djamena.