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INTERVIEW

Tchad: l'un des fils de l'opposant disparu se confie à l'Humanité


Alwihda Info | Par - ҖЭBIЯ - - 8 Mai 2008


Nicolas Sarkozy nous a dit qu’il n’avait pas d’information sur la disparition de notre père, ce qui nous étonne compte tenu du lien entre la DGSE et la garde présidentielle et de la présence à la présidence d’un officier de liaison de la coopération militaire française. La France a soutenu Déby pendant l’avancée des rebelles mais elle aurait dû aussi soutenir l’opposition démocratique. Elle a laissé Déby profiter de ce moment de confusion pour décapiter l’opposition et reprendre ensuite le dialogue comme si de rien n’était.


Tchad: l'un des fils de l'opposant disparu se confie à l'Humanité

L'Humanité

Article paru le 7 mai 2008

Le fils d’un disparu tchadien témoigne
Tchad . Trois mois après l’arrestation d’Ibni Oumar Mohamed Saleh, porte-parole de la principale coalition et opposition, son fils témoigne.

Avez-vous des nouvelles de votre père disparu ?

Mohamed Saleh. Certaines rumeurs disent qu’il serait détenu et soigné à la villa Burkina, une des résidences secondaires du chef de l’État tchadien, mais rien n’a pu le confirmer. Par ailleurs, nous avons récemment obtenu de milieux proches du pouvoir des précisions sur son arrestation. Les hommes qui sont venus l’arrêter faisaient partie de la garde présidentielle. Ils étaient sous les ordres du chef d’état-major adjoint des armées et neveu du président Déby. L’ordre serait venu directement d’Idriss Déby.

Une commission d’enquête a été mise en place. Qu’en pensez-vous ?

Mohamed Saleh. Il faut remarquer que cette commission n’a même pas commencé à travailler. En fait, elle est surtout destinée à endormir la vigilance. Nous la rejetons aussi parce qu’elle est formée pour l’essentiel de proches du pouvoir. Quand il a reçu mon frère en mars, le président Sarkozy avait évoqué une commission d’enquête, associant le Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU ou des ONG comme la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), qui se pencherait sur le sort d’Ibni Oumar Mohamed Saleh. Mais Deby en a modifié le sens en demandant à cette commission de travailler sur toutes les disparitions d’opposants et sur l’attaque des rebelles sur la capitale début février.

Comment jugez-vous les efforts de la France en faveur de votre père ?

Mohamed Saleh. La première dame, qui a reçu notre mère lors du voyage à N’Djamena du président Sarkozy, a été très réceptive. Nicolas Sarkozy lui-même n’a pas été très convaincant quand il a reçu mon frère. Pendant l’entretien, il a martelé que le président Déby était légitime et qu’il était la seule personne capable de faire quelque chose. Ce genre de raisonnement m’amène à me demander si, pour la France, légitimité et démocratie vont ensemble.

Comment qualifier le président Déby de légitime quand, lors de sa dernière réélection, toute l’opposition a boycotté le scrutin et que seuls quatre partis alibis proches du pouvoir ont accepté de concourir ? C’est vraiment une marque de mépris pour tous ceux qui se battent pour faire que la démocratie soit une réalité au Tchad. Par ailleurs, Nicolas Sarkozy nous a dit qu’il n’avait pas d’information sur la disparition de notre père, ce qui nous étonne compte tenu du lien entre la DGSE et la garde présidentielle et de la présence à la présidence d’un officier de liaison de la coopération militaire française. La France a soutenu Déby pendant l’avancée des rebelles mais elle aurait dû aussi soutenir l’opposition démocratique. Elle a laissé Déby profiter de ce moment de confusion pour décapiter l’opposition et reprendre ensuite le dialogue comme si de rien n’était.

Entretien réalisé par Camille Bauer

http://www.humanite.fr/2008-05-07_International_Le-fils-d-un-disparu-tchadien-temoigne


Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)