Pauvre Hollande ! Quel dommage que John Kerry et Sergueï Lavrov, les chefs de la diplomatie américain et russe, soient parvenus samedi dernier à un accord à l’arraché à Genève sur les armes chimiques syriennes. Un accord au terme duquel ces dernières devront être détruites — et sous contrôle international — d’ici la mi-2014. Grâce à cet accord, toute perspective de bombardement « punitif » de la Syrie s’éloigne. En effet, sauf si le régime de M. Bashar Al Assad viole cet accord, il n’y aura plus de frappes sur des cibles stratégiques syriennes. En principe, donc, les nuages de guerre qui planaient sur le Moyen-Orient se dispersent. La diplomatie peut donc entrer en action pour essayer de trouver une solution politique à la guerre civile qui déchire la Syrie depuis plus de deux ans et qui a fait jusqu’ici plus de 100.000 morts.
Si les opinions publiques du monde entier — mais aussi le Vatican qui avait appelé à des prières dans tous les pays — ont poussé un ouf de soulagement face à l’éloignement d’un risque de guerre qui aurait pu embraser tout le Moyen-Orient, il y en a malheureusement que l’accord Kerry-Lavrov déçoit et mécontente au plus haut point. Parmi ceux-là, l’Armée syrienne libre (ASL) qui combat les armes à la main le régime syrien, et… François Hollande. Presque tous les grands pays du Vieux continent s’étant débinés, le président de la République français était le seul dirigeant européen à avoir enfilé son battle dress et chaussé ses rangers en vue d’une expédition militaire en Syrie. Il avait réuni son état-major et les avions de chasse étaient prêts à bombarder la Syrie en principe dans la nuit du 31 août dernier. Il avait même convoqué le Parlement de son pays pour le mercredi 4 septembre afin de lui expliquer — a postériori bien sûr — le bienfondé de
l’intervention militaire française dans cet orient « lointain et compliqué » comme le disait le général De Gaulle ! Traditionnel meilleur allié des Etats-Unis en Europe, la Grande Bretagne ne pouvait en effet pas faire partie de cette expédition punitive-ci. Et pour cause, le Premier ministre conservateur, David Cameron, n’a pas pu obtenir l’accord des députés de son pays. La perfide Albion avait donc dû, une fois n’est pas coutume, brandir le drapeau blanc. L’Allemagne, le Canada, l’Italie, l’Espagne et autres grands pays européens ayant refusé pour des raisons diverses de suivre les Etats-Unis dans leur projet de bombarder la Syrie, la France se retrouvait donc toute seule, à côté de la Turquie, dans une alliance internationale destinée à punir la Syrie pour avoir utilisé des armes chimiques contre des populations civiles. Hélas, tandis que les bombardiers français faisaient tourner leurs réacteurs, le président américain Barack Obama décidait brusquement, sans même informer l’ « allié » — en fait le vassal — français, de consulter d’abord le Congrès. Ce qui est bien le moins dans une démocratie ! Du coup, le président François Hollande se retrouvait tout seul à vouloir faire la guerre au Moyen-Orient ! Une guerre dont il n’avait pas les moyens, bien sûr, sauf à s’allier au « grand-frère » américain. Et alors qu’il ne désespérait pas malgré tout de bombarder Damas, voilà que les Russes, grands joueurs de poker devant l’Eternel, avançaient un pion qui bouleversait toute la stratégie américaine. En effet, en proposant de placer l’arsenal chimique syrien sous contrôle international, ils acculaient Washington et le contraignaient à ouvrir des négociations destinées à sauver la paix, au risque d’apparaître comme un dangereux va-t-en guerre. Une perche d’autant plus volontiers saisis par le président américain qu’il sait son opinion publique majoritairement hostile à toute intervention militaire en Syrie. Oh, l’opinion publique française aussi y est opposée mais voilà, le président François Hollande se fiche de ce qu’elle pense. Ce qui l’intéresse, lui, c’est de faire la guerre et de montrer qu’il est un grand chef militaire. Sa cote de popularité étant aux abysses dans les sondages, il estime donc qu’il n’y a rien de tel qu’une bonne petite guerre au Moyen-Orient pour la faire remonter. Et tant pis si cette guerre se traduit par des centaines de morts
supplémentaires en Syrie et si elle risque de mettre le feu à toute la région ! L’essentiel, pour Hollande, c’est qu’il soit dit qu’il est un grand chef de guerre. Tout le reste ne compte pas à ses yeux. N’avait-il pas déjà démontré, en janvier dernier, lorsque ses « Rafale » et « Mirage » avaient vitrifié les djihadistes qui occupaient le Nord-Mali, que la France reste une grande puissance militaire ? Mais peut-être bien que, finalement, les combattants islamistes du MUJAO et d’Ansar-Dine n’étaient pas des foudres de guerre. D’avoir vaincu sans péril ces barbus en Kalachnikov et autres armes puisées dans les arsenaux du défunt colonel Kadhafi, avait sans doute fait qu’Hollande avait triomphé sans gloire. Il lui fallait donc une cible autrement plus redoutable que ces djihadistes pour achever de faire la démonstration qu’il est un grand chef de guerre. Le bombardement de Damas aurait dû lui en offrir l’occasion, hélas ces « traitres » d’Américains l’en ont privé. Avec une croissance en berne qui flirte avec la récession, un chômage qui atteint des taux himalayens, un commerce extérieur en repli, une opinion qui lui a tourné le dos…, le pauvre Hollande n’entrevoit d’autre issue que dans la guerre. Laquelle, en plus de flatter son ego en montrant qu’il est un grand chef, présente aussi l’énorme avantage d’offrir un champ d’expérimentation grandeur nature aux armes françaises — notamment le bombardier « Rafale » dont aucun exemplaire ne s’est à ce jour vendu dans le monde ! Certes, l’intervention au Mali avait fait la publicité de cette merveille technologique, mais les clients ne s’étaient pas pour autant bousculés au portillon pour commander cet avion !
En octobre dernier, au lendemain de son fameux discours de Dakar adressé au continent africain, nous avions écrit un article titré : « Hollande n’a-t-il pas donc autre chose à offrir à l’Afrique que la guerre ? » Trois mois plus tard, il bombardait le Nord-Mali et y envoyait un corps expéditionnaire de 5.000 hommes ! Cela ne suffisant apparemment pas, il s’apprêtait à envoyer ses « Rafale » et « Mirage » bombarder Damas. Pour parodier la fameuse pub d’un modèle d’une marque automobile française, Hollande, dès qu’il s’agit de faire la guerre, il est toujours partant !
Et ce même si c’est sur d’autres fronts — celui de l’aide au développement en priorité — que les peuples du Tiers monde
attendent la France. Hélas, ses différents chefs, ces dix dernières années, ont pris plaisir à faire la guerre. Et singulièrement en Afrique ! Le prédécesseur de François Hollande, Nicolas Sarkozy, avait déjà eu ses guerres africaines. En effet, il avait profité d’une résolution onusienne instaurant une zone d’exclusion aérienne en Libye pour en profiter pour bombarder des cibles stratégiques dans ce pays, fournir des armes aux rebelles qui combattaient le guide libyen avant de finir par faire tuer ce dernier dont le convoi avait été dézingué auparavant par des bombardiers de l’Otan. Puis les hélicoptères de la force française Licorne basée en Côte d’Ivoire avaient bombardé le palais (cerné dans le même temps par des chars français !) de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo jusqu’à ce que ce dernier agite le drapeau blanc. Bref, la guerre, pour les chefs d’Etat français — à l’exception notable de Jacques Chirac qui avait résisté courageusement aux Américains à propos de l’Irak — est une seconde nature. Pour son attitude servile lors de la guerre d’Irak, l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair avait gagné le surnom de « caniche de Bush ». Eh bien, pour la même vassalité, il convient de saluer en Hollande le « toutou d’Obama » !
Mamadou Oumar NDIAYE
Témoin » N° 1137 –Hebdomadaire Sénégalais (Septembre 2013)
Si les opinions publiques du monde entier — mais aussi le Vatican qui avait appelé à des prières dans tous les pays — ont poussé un ouf de soulagement face à l’éloignement d’un risque de guerre qui aurait pu embraser tout le Moyen-Orient, il y en a malheureusement que l’accord Kerry-Lavrov déçoit et mécontente au plus haut point. Parmi ceux-là, l’Armée syrienne libre (ASL) qui combat les armes à la main le régime syrien, et… François Hollande. Presque tous les grands pays du Vieux continent s’étant débinés, le président de la République français était le seul dirigeant européen à avoir enfilé son battle dress et chaussé ses rangers en vue d’une expédition militaire en Syrie. Il avait réuni son état-major et les avions de chasse étaient prêts à bombarder la Syrie en principe dans la nuit du 31 août dernier. Il avait même convoqué le Parlement de son pays pour le mercredi 4 septembre afin de lui expliquer — a postériori bien sûr — le bienfondé de
l’intervention militaire française dans cet orient « lointain et compliqué » comme le disait le général De Gaulle ! Traditionnel meilleur allié des Etats-Unis en Europe, la Grande Bretagne ne pouvait en effet pas faire partie de cette expédition punitive-ci. Et pour cause, le Premier ministre conservateur, David Cameron, n’a pas pu obtenir l’accord des députés de son pays. La perfide Albion avait donc dû, une fois n’est pas coutume, brandir le drapeau blanc. L’Allemagne, le Canada, l’Italie, l’Espagne et autres grands pays européens ayant refusé pour des raisons diverses de suivre les Etats-Unis dans leur projet de bombarder la Syrie, la France se retrouvait donc toute seule, à côté de la Turquie, dans une alliance internationale destinée à punir la Syrie pour avoir utilisé des armes chimiques contre des populations civiles. Hélas, tandis que les bombardiers français faisaient tourner leurs réacteurs, le président américain Barack Obama décidait brusquement, sans même informer l’ « allié » — en fait le vassal — français, de consulter d’abord le Congrès. Ce qui est bien le moins dans une démocratie ! Du coup, le président François Hollande se retrouvait tout seul à vouloir faire la guerre au Moyen-Orient ! Une guerre dont il n’avait pas les moyens, bien sûr, sauf à s’allier au « grand-frère » américain. Et alors qu’il ne désespérait pas malgré tout de bombarder Damas, voilà que les Russes, grands joueurs de poker devant l’Eternel, avançaient un pion qui bouleversait toute la stratégie américaine. En effet, en proposant de placer l’arsenal chimique syrien sous contrôle international, ils acculaient Washington et le contraignaient à ouvrir des négociations destinées à sauver la paix, au risque d’apparaître comme un dangereux va-t-en guerre. Une perche d’autant plus volontiers saisis par le président américain qu’il sait son opinion publique majoritairement hostile à toute intervention militaire en Syrie. Oh, l’opinion publique française aussi y est opposée mais voilà, le président François Hollande se fiche de ce qu’elle pense. Ce qui l’intéresse, lui, c’est de faire la guerre et de montrer qu’il est un grand chef militaire. Sa cote de popularité étant aux abysses dans les sondages, il estime donc qu’il n’y a rien de tel qu’une bonne petite guerre au Moyen-Orient pour la faire remonter. Et tant pis si cette guerre se traduit par des centaines de morts
supplémentaires en Syrie et si elle risque de mettre le feu à toute la région ! L’essentiel, pour Hollande, c’est qu’il soit dit qu’il est un grand chef de guerre. Tout le reste ne compte pas à ses yeux. N’avait-il pas déjà démontré, en janvier dernier, lorsque ses « Rafale » et « Mirage » avaient vitrifié les djihadistes qui occupaient le Nord-Mali, que la France reste une grande puissance militaire ? Mais peut-être bien que, finalement, les combattants islamistes du MUJAO et d’Ansar-Dine n’étaient pas des foudres de guerre. D’avoir vaincu sans péril ces barbus en Kalachnikov et autres armes puisées dans les arsenaux du défunt colonel Kadhafi, avait sans doute fait qu’Hollande avait triomphé sans gloire. Il lui fallait donc une cible autrement plus redoutable que ces djihadistes pour achever de faire la démonstration qu’il est un grand chef de guerre. Le bombardement de Damas aurait dû lui en offrir l’occasion, hélas ces « traitres » d’Américains l’en ont privé. Avec une croissance en berne qui flirte avec la récession, un chômage qui atteint des taux himalayens, un commerce extérieur en repli, une opinion qui lui a tourné le dos…, le pauvre Hollande n’entrevoit d’autre issue que dans la guerre. Laquelle, en plus de flatter son ego en montrant qu’il est un grand chef, présente aussi l’énorme avantage d’offrir un champ d’expérimentation grandeur nature aux armes françaises — notamment le bombardier « Rafale » dont aucun exemplaire ne s’est à ce jour vendu dans le monde ! Certes, l’intervention au Mali avait fait la publicité de cette merveille technologique, mais les clients ne s’étaient pas pour autant bousculés au portillon pour commander cet avion !
En octobre dernier, au lendemain de son fameux discours de Dakar adressé au continent africain, nous avions écrit un article titré : « Hollande n’a-t-il pas donc autre chose à offrir à l’Afrique que la guerre ? » Trois mois plus tard, il bombardait le Nord-Mali et y envoyait un corps expéditionnaire de 5.000 hommes ! Cela ne suffisant apparemment pas, il s’apprêtait à envoyer ses « Rafale » et « Mirage » bombarder Damas. Pour parodier la fameuse pub d’un modèle d’une marque automobile française, Hollande, dès qu’il s’agit de faire la guerre, il est toujours partant !
Et ce même si c’est sur d’autres fronts — celui de l’aide au développement en priorité — que les peuples du Tiers monde
attendent la France. Hélas, ses différents chefs, ces dix dernières années, ont pris plaisir à faire la guerre. Et singulièrement en Afrique ! Le prédécesseur de François Hollande, Nicolas Sarkozy, avait déjà eu ses guerres africaines. En effet, il avait profité d’une résolution onusienne instaurant une zone d’exclusion aérienne en Libye pour en profiter pour bombarder des cibles stratégiques dans ce pays, fournir des armes aux rebelles qui combattaient le guide libyen avant de finir par faire tuer ce dernier dont le convoi avait été dézingué auparavant par des bombardiers de l’Otan. Puis les hélicoptères de la force française Licorne basée en Côte d’Ivoire avaient bombardé le palais (cerné dans le même temps par des chars français !) de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo jusqu’à ce que ce dernier agite le drapeau blanc. Bref, la guerre, pour les chefs d’Etat français — à l’exception notable de Jacques Chirac qui avait résisté courageusement aux Américains à propos de l’Irak — est une seconde nature. Pour son attitude servile lors de la guerre d’Irak, l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair avait gagné le surnom de « caniche de Bush ». Eh bien, pour la même vassalité, il convient de saluer en Hollande le « toutou d’Obama » !
Mamadou Oumar NDIAYE
Témoin » N° 1137 –Hebdomadaire Sénégalais (Septembre 2013)