Me Max Loalngar, quel bilan fait Wakit Tama des douze mois de la transition au Tchad ?
Sur le plan des droits de l'homme, le bilan est catastrophique. A seulement douze mois, nous ne déplorons pas moins de 40 morts si vous prenez tous les théâtres des manifestations réprimées dans le sang, les conflits intercommunautaires dont l'origine est connue : Faya, Abéché, Sandana. Nous pensons que le CMT a crevé le plafond. Ce bilan est complètement négatif. Il n'augure vraiment rien de bon.
Sur le plan politique, nous assistons à plusieurs choses à la fois. La transition n'est pas circonscrite en de termes claires par un texte qui permettent te de connaître les responsabilités des différents acteurs. Il y a bien évidemment la charte qui a été décriée dont nous continuons à réclamer la révision. Il y a un gouvernement qui a été désigné par le CMT qui s'est rendu presque seul maître de son programme d'action, sans qu'il y ait un cahier de charges clair et net provenant de la volonté populaire. C'est une véritable navigation à vue !
Et s'il faut, en plus, noter l'organisation du dialogue qui semble être le vœu de tout le monde, on se rend compte que jusque-là, il y a preuve d’une mauvaise foi du régime qui fait que nous doutons de l'organisation d'un dialogue, pour sauver le Tchad.
Sur le plan socio-économique, il y a lieu de s'inquiéter. Le panier de la ménagère est devenu très léger, face à la flambée des prix sur le marché. A cela s'ajoute le fait que les services socio-sanitaires ne sont pas à un niveau optimal. La question de l'eau et l'électricité, ça fait du bruit dans toute la ville. Dans tout le Tchad, la question des soins de santé se traduit par d'innombrables morts comme si le Tchad vivait une épidémie. L'éducation est complètement par terre, et pour laquelle nous ne voyons aucune solution venant de ceux qui dirigent le Tchad.
Vous dressez un bilan assez sombre de la transition, mais est-ce qu'en 12 mois, le CMT n'a pas marqué quelques points ?
Non ! Je n'en vois pas. D'aucuns disent qu'ils sont parvenus à stabiliser la vie en repoussant les rebelles, en assurant la sécurité des Tchadiens. Mais si on considère les violations des droits humains, elles sont à 95% l'œuvre des forces de défense et de sécurité. Ils sont certes parvenus à repousser les rebelles, mais ils ne sont pas parvenus à assurer notre sécurité.
Et au quotidien, nous avons des scènes qui le démontrent. Non seulement, les manifestants à mains nues sont pris à parti, au point où on dénombre des morts, mais aussi vous avez le cas le plus expressif des magistrats qui ont été violentés par des agents de sécurité supposés être sous leur hiérarchie. Je partage parfaitement l’opinion de ceux qui disent que le Tchad est pris en otage.
Lorsque le ministre de la Communication a annoncé le maintien de la date du 10 mais, vous avez affirmé que le Tchad s'offre en spectacle...
La communication du ministre semblait mettre de la pression aux gens. C'était soit aux politico-militaires en pré-dialogue à Doha, soit aux acteurs de l'intérieur pour dire que la date du 10 mai doit être tenue vaille que vaille, comme pour nous emmener à une certaine position, mais qui ne serait pas être réfléchie.
Or concrètement, nous savons que le dialogue de Doha est en train de s'enliser. Ils sont partis pour deux semaines, ils en sont depuis presque un mois. Il nous revient que les groupes réunis à Doha rejettent le travail du CODNI. Nous de l'intérieur qui avons opposé un véto à l'entrée au CODNI ou même à la transition, il n'y a aucun dialogue noué concrètement avec nous, pour qu'on puisse s'en satisfaire et dire que les Tchadiens s'entendent, donc la date du 10 doit être tenue. Ce n'est pas le cas. C'est une incantation de Merlin.
C'est comme si par le biais d'une baguette magique, les Tchadiens vont se réunir, ça ne paraît pas logique. Vu que par le passé, ils avaient annoncé des dates qui n'ont pas été tenues. Ça sert à quoi d'annoncer une date qui ne sera pas tenue ? C'est offrir le Tchad en spectacle, c'est démontrer que nous avons une élite qui ne réfléchit pas, qui ne peut pas de façon concrète, proposer quelque chose à quoi s'en tenir. C'est pourquoi je dis qu'on doit apprendre à respecter ce pays. Le communiqué du ministre était de toute évidence irréaliste, orienté, je dirai même tendancieux.
Le pré-dialogue de Doha traîne, à l'intérieur, rien n'est "bien" fait. Vous souhaitez un éventuel report, ou la date du 10 mai est-elle raisonnable ?
Il va de soi que la date du 10 mai ne va être pas tenue. Très récemment, le PCMT a reçu une délégation de la communauté Saint-Egidio à qui on aurait demandé d'organiser le dialogue du 10 mai. J'aurais aimé qu'ils se prononcent eux-mêmes. Mais je ne pense que cette institution en vienne à organiser un dialogue sans écouter les différentes parties prenantes, ce qui n'est pas encore fait. Il faut définir de façon intelligente et réfléchie les critères de participation au dialogue. Nous sommes déjà en mi-avril. Il faut combien de temps pour faire ce travail avant de nous convier à un dialogue ? Ce n'est pas raisonnable ; c'est pourquoi en tant ministre de la Communication, je ne me serais pas précipité à faire une déclaration pareille, même pas pour les yeux de quelqu'un.
Vous avez suspendu les pourparlers avec le gouvernement en dénonçant sa mauvaise foi. Vous a-t-il recontacté ?
Il y a eu un contact officieux (d'ailleurs ils ont toujours agi de la sorte), pour comprendre pourquoi nous sommes partis. Cette explication, ils l'ont eue. Le même contact nous a demandé de revenir sur notre position. C'est l'assemblée générale qui décidera d'une reprise de contact ou pas. Nous disons que nous avons juste suspendu un contact avec le CMT et le gouvernement. Mais dans la mesure où ce monde s’oriente vers un dialogue national, dont les rennes viennent d'être confiées à une organisation connue, est-ce que c'est encore logique d'échanger avec qui que ce soit ? Non, nous sommes une partie prenante. Nous devons être considérés comme tels. Et si les gens voudraient nous voir au dialogue, il appartient à ceux-là qui ont pris les choses en main, de nous identifier ou ne pas nous identifier.
Et si le gouvernement, exaspéré de votre rigidité, décidait de tenir le dialogue sans Wakit Tama, que ferait-il ?
Si on nous exclut, il n'y a pas de problème. Nous sommes exclus de la gestion du Tchad depuis 31 ans et nous avons pris nos responsabilités. Si nous sommes exclus du dialogue, ça ne fera que confirmer ce qui s'est déjà passé depuis 31 ans et qui nous a emmenés la contestation populaire. Nous allons rester sur le terrain de la contestation populaire pour amener les gens à la raison et gagner notre droit de cité dans les rues, villes et villages du Tchad, parce que nous y sommes nés et personne ne peut nous en faire partir.
Craignez-vous une prolongation de la transition ?
C'est à redouter. On est en train d'y aller sauf qu'il y a des préalables qui ont été posées et pour lesquelles la communauté internationale qui s'est incrustée entre nous. Tout le monde dit qu'il ne fallait pas que cela soit prorogé. Moi je crois qu'on ne doit pas proroger, mais on doit faire un dialogue sincère pour qu'au terme des 18 mois, les structures que le dialogue mettra en place puissent reprendre la gestion du pays en main, étant donné que les acteurs actuels de la pré-transition ne devraient pas en faire partie.
Sur le plan des droits de l'homme, le bilan est catastrophique. A seulement douze mois, nous ne déplorons pas moins de 40 morts si vous prenez tous les théâtres des manifestations réprimées dans le sang, les conflits intercommunautaires dont l'origine est connue : Faya, Abéché, Sandana. Nous pensons que le CMT a crevé le plafond. Ce bilan est complètement négatif. Il n'augure vraiment rien de bon.
Sur le plan politique, nous assistons à plusieurs choses à la fois. La transition n'est pas circonscrite en de termes claires par un texte qui permettent te de connaître les responsabilités des différents acteurs. Il y a bien évidemment la charte qui a été décriée dont nous continuons à réclamer la révision. Il y a un gouvernement qui a été désigné par le CMT qui s'est rendu presque seul maître de son programme d'action, sans qu'il y ait un cahier de charges clair et net provenant de la volonté populaire. C'est une véritable navigation à vue !
Et s'il faut, en plus, noter l'organisation du dialogue qui semble être le vœu de tout le monde, on se rend compte que jusque-là, il y a preuve d’une mauvaise foi du régime qui fait que nous doutons de l'organisation d'un dialogue, pour sauver le Tchad.
Sur le plan socio-économique, il y a lieu de s'inquiéter. Le panier de la ménagère est devenu très léger, face à la flambée des prix sur le marché. A cela s'ajoute le fait que les services socio-sanitaires ne sont pas à un niveau optimal. La question de l'eau et l'électricité, ça fait du bruit dans toute la ville. Dans tout le Tchad, la question des soins de santé se traduit par d'innombrables morts comme si le Tchad vivait une épidémie. L'éducation est complètement par terre, et pour laquelle nous ne voyons aucune solution venant de ceux qui dirigent le Tchad.
Vous dressez un bilan assez sombre de la transition, mais est-ce qu'en 12 mois, le CMT n'a pas marqué quelques points ?
Non ! Je n'en vois pas. D'aucuns disent qu'ils sont parvenus à stabiliser la vie en repoussant les rebelles, en assurant la sécurité des Tchadiens. Mais si on considère les violations des droits humains, elles sont à 95% l'œuvre des forces de défense et de sécurité. Ils sont certes parvenus à repousser les rebelles, mais ils ne sont pas parvenus à assurer notre sécurité.
Et au quotidien, nous avons des scènes qui le démontrent. Non seulement, les manifestants à mains nues sont pris à parti, au point où on dénombre des morts, mais aussi vous avez le cas le plus expressif des magistrats qui ont été violentés par des agents de sécurité supposés être sous leur hiérarchie. Je partage parfaitement l’opinion de ceux qui disent que le Tchad est pris en otage.
Lorsque le ministre de la Communication a annoncé le maintien de la date du 10 mais, vous avez affirmé que le Tchad s'offre en spectacle...
La communication du ministre semblait mettre de la pression aux gens. C'était soit aux politico-militaires en pré-dialogue à Doha, soit aux acteurs de l'intérieur pour dire que la date du 10 mai doit être tenue vaille que vaille, comme pour nous emmener à une certaine position, mais qui ne serait pas être réfléchie.
Or concrètement, nous savons que le dialogue de Doha est en train de s'enliser. Ils sont partis pour deux semaines, ils en sont depuis presque un mois. Il nous revient que les groupes réunis à Doha rejettent le travail du CODNI. Nous de l'intérieur qui avons opposé un véto à l'entrée au CODNI ou même à la transition, il n'y a aucun dialogue noué concrètement avec nous, pour qu'on puisse s'en satisfaire et dire que les Tchadiens s'entendent, donc la date du 10 doit être tenue. Ce n'est pas le cas. C'est une incantation de Merlin.
C'est comme si par le biais d'une baguette magique, les Tchadiens vont se réunir, ça ne paraît pas logique. Vu que par le passé, ils avaient annoncé des dates qui n'ont pas été tenues. Ça sert à quoi d'annoncer une date qui ne sera pas tenue ? C'est offrir le Tchad en spectacle, c'est démontrer que nous avons une élite qui ne réfléchit pas, qui ne peut pas de façon concrète, proposer quelque chose à quoi s'en tenir. C'est pourquoi je dis qu'on doit apprendre à respecter ce pays. Le communiqué du ministre était de toute évidence irréaliste, orienté, je dirai même tendancieux.
Le pré-dialogue de Doha traîne, à l'intérieur, rien n'est "bien" fait. Vous souhaitez un éventuel report, ou la date du 10 mai est-elle raisonnable ?
Il va de soi que la date du 10 mai ne va être pas tenue. Très récemment, le PCMT a reçu une délégation de la communauté Saint-Egidio à qui on aurait demandé d'organiser le dialogue du 10 mai. J'aurais aimé qu'ils se prononcent eux-mêmes. Mais je ne pense que cette institution en vienne à organiser un dialogue sans écouter les différentes parties prenantes, ce qui n'est pas encore fait. Il faut définir de façon intelligente et réfléchie les critères de participation au dialogue. Nous sommes déjà en mi-avril. Il faut combien de temps pour faire ce travail avant de nous convier à un dialogue ? Ce n'est pas raisonnable ; c'est pourquoi en tant ministre de la Communication, je ne me serais pas précipité à faire une déclaration pareille, même pas pour les yeux de quelqu'un.
Vous avez suspendu les pourparlers avec le gouvernement en dénonçant sa mauvaise foi. Vous a-t-il recontacté ?
Il y a eu un contact officieux (d'ailleurs ils ont toujours agi de la sorte), pour comprendre pourquoi nous sommes partis. Cette explication, ils l'ont eue. Le même contact nous a demandé de revenir sur notre position. C'est l'assemblée générale qui décidera d'une reprise de contact ou pas. Nous disons que nous avons juste suspendu un contact avec le CMT et le gouvernement. Mais dans la mesure où ce monde s’oriente vers un dialogue national, dont les rennes viennent d'être confiées à une organisation connue, est-ce que c'est encore logique d'échanger avec qui que ce soit ? Non, nous sommes une partie prenante. Nous devons être considérés comme tels. Et si les gens voudraient nous voir au dialogue, il appartient à ceux-là qui ont pris les choses en main, de nous identifier ou ne pas nous identifier.
Et si le gouvernement, exaspéré de votre rigidité, décidait de tenir le dialogue sans Wakit Tama, que ferait-il ?
Si on nous exclut, il n'y a pas de problème. Nous sommes exclus de la gestion du Tchad depuis 31 ans et nous avons pris nos responsabilités. Si nous sommes exclus du dialogue, ça ne fera que confirmer ce qui s'est déjà passé depuis 31 ans et qui nous a emmenés la contestation populaire. Nous allons rester sur le terrain de la contestation populaire pour amener les gens à la raison et gagner notre droit de cité dans les rues, villes et villages du Tchad, parce que nous y sommes nés et personne ne peut nous en faire partir.
Craignez-vous une prolongation de la transition ?
C'est à redouter. On est en train d'y aller sauf qu'il y a des préalables qui ont été posées et pour lesquelles la communauté internationale qui s'est incrustée entre nous. Tout le monde dit qu'il ne fallait pas que cela soit prorogé. Moi je crois qu'on ne doit pas proroger, mais on doit faire un dialogue sincère pour qu'au terme des 18 mois, les structures que le dialogue mettra en place puissent reprendre la gestion du pays en main, étant donné que les acteurs actuels de la pré-transition ne devraient pas en faire partie.